La place pour le spectacle d'été à Villers-la-Ville bientôt plus chère de deux euros? "Je ne comprends pas pourquoi la ministre a décidé de couper les vivres”
Patrick de Longrée (DEL Diffusion) ne comprend pas la décision de la ministre de la Culture de le priver du subside de 40 000€.
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- Publié le 25-08-2022 à 17h56
- Mis à jour le 25-08-2022 à 17h59
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Après deux étés difficiles en raison du Covid, l'Abbaye de Villers-la-Ville a pu, dès le 13 juillet, accueillir à nouveau, pour sa 36e édition, une super-production : Roméo et Juliette de Shakespeare, mis en scène par Thierry Debroux . Un spectacle haut en couleur qui a été applaudi par quelque 21000 spectateurs. "C'est un excellent chiffre qui place notre spectacle au premier rang des spectacles les plus fréquentés cette saison en Communauté française de Belgique" , se félicite Patrick de Longrée, scénographe et co-producteur (DEL Diffusion).
Manque de parité de genres
Malgré ce résultat encourageant, Patrick de Longrée ne peut toutefois pas cacher une certaine amertume. En cause ? "La ministre de la Culture (Ecolo) a décidé de couper les (maigres) subventions (une aide pluriannuelle de 40 000 euros, NdlR) pourtant accordées à nos projets depuis leur création en 1987 par douze ministres successifs." Ne bénéficiant pas d'un contrat-programme, l'ASBL DEL Diffusion était, jusqu'il y a peu, soutenue par la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) via un régime de conventions. Mais, à deux reprises, en mai 2020 et en mai 2021, la Commission des arts vivants, chargée d'analyser le dossier de demande d'aide pluriannuelle, a remis un avis négatif. Avis que la ministre de la Culture a scrupuleusement suivi. "L'octroi des subventions se base sur les avis des instances compétentes, en l'occurrence, ici, la Commission des arts vivants, composée d'experts et mise en place dans le cadre du décret pour une meilleure gouvernance et davantage de transparence , explique-t-on au cabinet de Bénédicte Linard. Et la ministre a pour principe de suivre ces avis" .
Concrètement, la Commission motive son refus en se fondant sur trois critères : "1° l'absence de parité de genres et de renouveau dans le choix des metteurs en scène ; 2° le peu de place accordée à l'écriture contemporaine ; et 3° le fait que son soutien n'est pas nécessaire au regard de l'apport des différents co-producteurs, des subventions publiques déjà accordées, des recettes importantes et du cadre de production qui fait peu évoluer la démocratisation culturelle, de par le prix très élevé des places sur lequel la subvention demandée aurait peu d'effets" .
Des billets plus chers de 2 euros?
Ces motivations laissent Patrick de Longrée "pantois" . Concernant la parité de genres, "ce n'est pas faux , reconnaît-il, mais, autour de ces metteurs en scène, la plupart des collaborateurs sont… des collaboratrices" . Et de citer Roméo et Juliette pour lequel ont travaillé Émilie Guillaume (maître d'armes), Emmanuelle Lamberts (chorégraphies) , Catherine Couchard (assistante à la mise en scène), Anne Guilleray (costumes), etc. Quant au manque d'auteurs contemporains, Patrick de Longrée rappelle que "notre créneau a toujours été le registre du théâtre de répertoire ou de l'adaptation d'œuvres littéraires majeures" . "Donc, oui, on monte Molière, Shakespeare, Hugo…, mais c'est oublier qu'on a monté Camus, Ghelderode, Saint-Exupéry, Éric-Emmanuel Schmitt…"
Enfin, M. de Longrée est "estomaqué" d'apprendre que, vu le succès des spectacles d'été à Villers-la-Ville, "nous n'avons pas besoin d'un soutien financier". "Un spectacle à Villers coûte, en moyenne, 900 000 euros. Les seules recettes d'entrées ne suffisent pas , expose-t-il. Donc, je dois trouver de l'argent partout : auprès des pouvoirs subsidiants (Province, Région wallonne et FWB), des sponsors privés et de la Loterie nationale" . Et d'alerter : "À quoi sert une subvention ? À rendre un spectacle possible, à le rendre accessible au plus grand nombre et, implicitement, à en réduire le prix. Or, cette subvention de 40 000 euros représente 2 euros par spectateur puisque nous en accueillons 20 000 chaque été… Je ne comprends donc pas du tout pourquoi la ministre a décidé de couper les vivres"…