Tour du monde en 2h30 au Parc

Ils ne sont "que" neuf en scène mais on a l’impression qu’ils sont cinq fois plus nombreux Pendant deux tours d’horloge, les comédiens du "Tour du monde en 80 jours" entrent et sortent du plateau du Théâtre royal du Parc à un rythme soutenu, dans une sarabande de types nationaux divers qui nous font traverser les cinq continents.

Philip Tirard
Tour du monde en 2h30 au Parc
©Isabelle De Beir

Ils ne sont "que" neuf en scène mais on a l’impression qu’ils sont cinq fois plus nombreux Pendant deux tours d’horloge, les comédiens du "Tour du monde en 80 jours" entrent et sortent du plateau du Théâtre royal du Parc à un rythme soutenu, dans une sarabande de types nationaux divers qui nous font traverser les cinq continents.

Depuis sa parution en 1873, le roman le plus célèbre de Jules Verne n’a cessé de faire l’objet d’adaptations théâtrales, puis cinématographiques, en bandes dessinées voire en film d’animation. L’auteur lui-même - qui débuta sa carrière d’écrivain par des pièces pour le Théâtre-Historique d’Alexandre Dumas et fut secrétaire du Théâtre-Lyrique à Paris - en signa la première version scénique, dont le succès planétaire fit sa fortune financière.

A la différence de ses modèles littéraires Poe et Baudelaire, Verne témoigne d’un indécrottable optimisme. "Le Tour du monde" fut un des "blockbusters" absolus de la fin du XIXe siècle. Le spectacle de Thierry Debroux, grâce notamment aux prouesses scénographiques de Ronald Beurms, renoue avec l’enchantement des féeries exotiques d’antan, avec leurs numéros musicaux (en l’occurrence des chansons de Pascal Charpentier) et leurs animaux vivants en scène.

Point de pachyderme en chair et en os sur le plateau ici mais, par le truchement de l’extraordinaire décor avec ses transformations virtuoses à vue, l’évocation d’une randonnée à dos d’éléphant, d’une ascension en montgolfière, d’un steamer en pleine tempête, d’un train du Far West assailli par des Sioux façon Mack Sennett. Les réactions du public de matinée du dimanche, où se mêlent en toute complicité spectateurs en culottes courtes et seniors "en dimanche", témoignent du puissant attrait ludique de la chose.

Les comédiens se donnent sans compter. Autour du flegmatique Phileas Fogg campé de manière britishissime par Alain Leempoel, le bondissant Othmane Moumen mène le bal à une cadence d’enfer en Passepartout. A peine engagé par le métronomique gentleman londonien, chez qui il croit pouvoir mener une existence paisible réglée comme une horloge suisse, le voici précipité dans un trépidant tour du globe.

Le binôme est poursuivi par un inspecteur de Scotland Yard psychorigide (irrésistible Stéphane Fenocchi), convaincu que Fogg a dérobé 55 000 livres sterling à la Bank of England. Le scénario de l’adaptateur Thierry Janssen est bel et bien un voyage initiatique doublé d’une course-poursuite burlesque digne du cinéma muet. Pierre Poucet, Gérald Wauthia et Xavier Percy incarnent une trentaine de personnages plus hauts en couleur les uns que les autres. Jouant avec les codes de la représentation théâtrale, ils font mine de se tromper d’entrée en scène, annoncent le prochain spectacle du Parc ("L’Ange bleu"), font des allusions à l’actualité, confient leurs accessoires aux spectateurs du premier rang, etc.

L’élément féminin dans cet univers très masculin est assumé au deuxième degré par une Jasmina Douieb épatante en princesse Aouda, tissant une chaste idylle avec Mr Fogg dont le code Hayes lui-même aurait approuvé la retenue. C’est frais, drôle, à peine impertinent, divertissant en un mot.


Bruxelles, Théâtre royal du Parc, jusqu’au 22 octobre. Durée : 2h30 entracte compris. De 5 à 22€. Tél. 02.505.30.30 - www.theatreduparc.be.

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