Vibrant hommage à Brel du rappeur Mochélan
Le Grand Feu embrase l'Ancre à Charleroi. A la croisée du théâtre et de la musique, Jacques Brel comme vous ne l'avez jamais entendu. Montée en puissance et en émotion pour une soirée en crescendo.
- Publié le 11-10-2018 à 17h12
- Mis à jour le 16-10-2018 à 16h09
Rentrer. Écouter Brel en boucle. Encore et encore... Envie chevillée à l'âme après une soirée au coin du Grand Feu, titre du spectacle qui, depuis le 9 octobre, date anniversaire des quarante ans de la mort de Jacques Brel , enflamme le Théâtre de l'Ancre à Charleroi. L'accueil est tel qu'une représentation supplémentaire vient d'être ajoutée au calendrier. Tant Mochélan, Simon Delecosse de son vrai nom, enfant du pays, mais aussi rappeur reconnu, sacré Octave de la musique en 2015, et féru des chansons du grand Jacques, a posé la voix et les gestes avec justesse, humilité et vérité. Brel en rap ? S'étonnera-t-on. Pourquoi pas? Répondra celui qui le considère comme le premier rappeur de l'histoire. Un défi, une aventure folle, partie d'une blague en fin de soirée lorsque Mochélan s'est mis à chanter Les Bourgeois en rap et que Jean-Michel Van den Eeyden, directeur de l'Ancre et metteur en scène, a imaginé de monter un spectacle.
Nous y voici, dans l'antichambre d'abord, avec Rémon JR, affalé sur un vieux canapé qui sample, un ou deux morceaux.
Puis, Mochélan, qui brandit ce Grand Feu, la revue scoute dans laquelle Brel signa un éditorial révélateur de celui que deviendrait le chanteur. Où il célèbre la nature, les forêts, les ruisseaux, la fraternité, le retour à soi et la quête de vérité.
Avec son air dégingandé
Commencent alors les répétitions. Mochélan passe à l'avant-plan, se déplie, se déploie, ouvre les bras, donne de la voix.
La ressemblance est troublante. Le rappeur n'imite pas Brel. Il se l'approprie et parfois, sans le vouloir, avec son air dégingandé, sa voix caverneuse, son visage émacié et sa tendresse brouillée, s'emporte, s'enfièvre, entre dans le costume du chanteur, et lui rend vie, sous sa ferveur à lui.
A mi-chemin entre théâtre et musique, en dialogue avec le DJ qui donne un bel écho à l'aventure, la justifie avec ses artifices électroniques, deux textes de Mochélan en alternance avec des chansons, Le Diable, Les Filles et les chiens, Marieke, en flamand, L'Ivrogne ou Jaurès, "Le Grand Feu" s'embrase de plus en plus , monte en puissance pour nous livrer, dans cette chambre sans berceau, quelques incontournables tels ces Vieux qui ne parlent plus, mais auquel le rappeur renvoie un peu d'adrénaline, sans pour autant sacrifier à l'émotion. Avant d'entamer, avec le coffre de mise, ces Flamingants tant décriés à l'époque. Et tellement précurseurs. L'ambiance répétition s'efface peu à peu au profit de ce qui ressemble de plus en plus à un concert, avec, en toile de fond, des mapping vidéos, d'une franche délicatesse, chers au metteur en scène . Soudain seul au piano, Mochélan convainc également pendant que le public se laisse emporter par l'émotion. Avant le final, le noir, le micro suspendu au plafond la voix de Jacques Brel, cette fois, pour chanter sa Quête, cette inaccessible étoile qui vous arrache des larmes.
Le Grand Feu, un rendez-vous avec Brel et son œuvre, au Théâtre de l'Ancre, 122 rue de Montigny, 6000 Charleroi, jusqu'au 20 octobre. Infos & rés.: 071.314.079, www.ancre.be
A La Ferme du Biéreau, le 26 octobre
Au Mars - Mons arts de la scène, du 11 au 13 février 2019.