Natacha Amal  : “Etre comédien, ce sont des hauts et des bas, mais dès le début”

Natacha Amal  : “Etre comédien, ce sont des hauts et des bas, mais dès le début”
©marie russillo

Elle, c’est Gigi Ortéga. Lui, c’est Hugo Martial. Deux acteurs vedettes, amants au faîte de leur gloire, mais, aujourd’hui, séparés et à la carrière en déclin. Par un coup du hasard, les voilà pourtant “contraints” de rejouer ensemble. Des retrouvailles plus amères que douces qui seront une épreuve pour eux et leur metteur en scène…

Écrite en 1996 par Josiane Balasko, la pièce Un grand cri d’amour réunit alors sur les planches la célèbre comédienne du Splendid ainsi que Richard Berry. Adaptée au cinéma et jouée de nombreuses fois en France, cette comédie a déjà traversé la frontière pour être mise en scène et interprétée chez nous, en 2006-2007, par Daniel Hanssens et Rosalia Cuevas. Douze ans plus tard, Daniel Hanssens en reprend la mise en scène, au Théâtre royal des Galeries, avec Natacha Amal et Alain Leempoel dans les rôles-titres.

S’ils se retrouvent pour la première fois ensemble sur scène, ils ont en commun d’avoir été formés au Conservatoire royal de Bruxelles par André Debaar. “Natacha est plus jeune que moi, explique Alain Leempoel, et puis elle est partie très vite à Paris et a eu le succès que l’on connaît à la télévision française (NdlR  : de 2000 à 2009, elle a été le procureur Elisabeth Brochène dans la série Femmes de loi). Moi, je suis un pur produit bruxellois de théâtre (NdlR  : on lui doit tout récemment la mise en scène de Festen ). Donc, on se connaît sans se connaître”.

Pour se glisser dans la peau des personnages de Gigi Ortéga et de Hugo Martial, il y a certes la technique de la comédie, “qui est une rythmique, une manière d’être, définit Alain Leempoel, mais il y a aussi nos personnalités”. “Quand Daniel (Hanssens) nous a parlé du projet, raconte-t-il, la seule chose était de ne pas faire du copier-coller, c’est-à-dire qu’il fallait qu’il parte de nos personnalités pour lui-même réinventer une mise en scène et voir ce que nous pouvions apporter et jouer avec ça. D’ailleurs, je ne suis pas sûr d’avoir vu beaucoup de choses d’Un grand cri d’amour. Et Natacha Amal de confirmer  : “Moi non plus  ! On n’est pas influencé ; on fait ce que l’on sent et on trouve beaucoup d’amusement et de plaisir, même un peu enfantin”.

“Papa partait jouer”

Particularité d’Un grand cri d’amour, on y découvre l’envers du décor d’une pièce de théâtre, loin des strass et paillettes qui auréolent le métier de comédien (ne). “Notre métier fait un peu rêver, reconnaît Alain Leempoel, mais notre quotidien n’est pas toujours rose. D’un autre côté, comme dit Natacha, on joue comme des gosses. Je me rappelle que, quand mes deux filles étaient plus petites, papa ne partait pas travailler, il partait jouer. C’est quand même magnifique  !”. Il reprend  : “Ce métier, on le fait par passion, plaisir, envie,…, mais ce n’est pas pour ça que tout est rose ou facile. Ici, ce qui est amusant, pour le public, c’est qu’il va voir deux starlettes sur le retour qui, de surcroît, étaient un peu les Burton-Taylor à une époque, qui se retrouvent et s’entre-déchirent, et on voit en même temps les coulisses des répétitions. C’est ça la force de la pièce. Et c’est très gai à jouer parce qu’on montre au public des choses auxquelles il n’a pas droit  : le comédien qui ne connaît pas son texte, qui s’énerve parce que l’autre prend trop de place et trop de lumière,… Donc, on fait passer dans cette pièce les humeurs que normalement les comédiens doivent essayer de garder pour eux”.

Deux tiers de rôles d’hommes

La pièce met également en lumière l’implacable dureté des carrières de comédien (ne) qui s’essoufflent. “Il n’y a pas de mauvais genre au théâtre, il y a des mauvais spectacles, tient à préciser Alain Leempoel. Qui plus est, en Belgique, il n’y a pas de vedette, donc à quel moment peut-on dire que quelqu’un est une vedette ou n’est plus demandé  ? On est dans des castes. À Bruxelles, le théâtre est subventionné à 99  %. Ce qui nous plaît en tant que comédien, c’est quand on nous demande éventuellement quelque part – c’est déjà pas mal. Ensuite, quand on a accepté la chose, on la fait comme si notre vie en dépendait”. Natacha Amal enchaîne  : “Le métier de comédien, ce sont des hauts et des bas, mais depuis le début, depuis qu’on est tout jeune  ! Moi, dans les ‘90, j’ai eu, je suis désolée de le dire, une putain de traversée du désert. Mais le charme de la Belgique par rapport au théâtre, c’est qu’il n’y a pas de star system. Néanmoins, il y a un biais, un peu terrible et dur  : passé un certain âge, les acteurs sont un peu plus déconsidérés, car il y a beaucoup de jeunes acteurs qui arrivent derrière ou des acteurs d’âge moyen qui poussent les portes…” Elle confie  : “Toute jeune, bien avant de réussir, j’étais déjà formatée et conditionnée à penser que passé un certain âgé, c’était la merde”. Sans compter, souligne Alain Leempoel, que “les femmes représentent 2/3 du métier alors qu’il y a 2/3 de rôles d’hommes pour 1/3 de rôles de femmes”.

Bruxelles, Théâtre royal des Galeries, du 17/10 au 18/11. Infos et rés.  : 02.512.04.07. – www.trg.be

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