La trapéziste Chloé Moglia ose la psychose
Entourée de deux acolytes, la célèbre artiste revisite l'histoire de la femme. Et de la création.
Publié le 19-11-2018 à 16h11
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Led Zeppelin et son Stairway to the heaven ouvrent le danse, le chemin vers le ciel, ce paradis, mérité, ou non, vers lequel tend une femme, dans sa solitude, aux prises avec un morceau du monde dont les dimensions et la complexité la dépassent.
D'une, elles deviendront trois. Voici Chloé Moglia et ses deux acolytes en piste pour Ose, une création dans laquelle la célèbre trapéziste, metteure en scène, n'était pas censée intervenir sinon, en remplacement, comme ce fut le cas, vendredi soir aux Halles de Schaerbeek, dans le cadre de Glaz Circus, festival du cirque breton.
Entourée de deux de ses élèves, Carla Farreny Jimenez et Viivi Roiha qui lui ressemble de plus en plus, mais toujours grande maîtresse et prêtresse du genre, Chloé Moglia, fatiguée par la profusion d'objets, de paroles, de sollicitations, poursuit son exploration du trapèze au ralenti, celui qui virevolte et exalte peut-être moins mais qui renvoie à l'intériorité, au rapport à la lenteur. Celui, surtout, qui accroît, mine de rien, la douleur tant il faut de puissance pour tenir en immobilité.
Cette douleur, à force de l'accepter, de l'intégrer, à force aussi d'arts martiaux et énergétiques, l'artiste a fini par l'apprivoiser, l'accueillir, la maîtriser quasiment, sans pour autant trop contrarier son corps.
Toujours en suspension, pendue la tête en bas à ce trapèze qui n'en est pas vraiment un, accrochée à la manière des paresseux, elle joue de la corde qu'elle roule et déroule à l'envi. Mais aussi des mots qu'elle aime tant, dessine à la craie sur un tableau noir ou plan incliné, trace les lettres à l'aide de la corde, d'ose à psychose en passant par narcose, overdose et métamorphose.
Si elle aime partager ses réflexions, mêler le cirque à la science, elle le rapproche également, comme dans Ose de la libération de la femme en revisitant la manière dont on raconte la création dans ce jardin d'Eden qui n'en était peut-être pas un.
Si cette partition, cette fois partagée, ne suscite pas la même fascination que d'autres pièces de la compagnie Rhizome telles Aléas ou Rhizikon, elle finit cependant par emporter, hypnotiser, loin d'ici, vers d'autres lieux, d'autres limbes, d'autres pensées. Et cela reste très beau.