Pauline Beugnies et Marie-Aurore d'Awans: "Oui, on a un prisme : la dignité des parents"
À l'affiche du KVS jusqu'au 8 octobre, le spectacle de Marie-Aurore d’Awans et Pauline Beugnies tournera jusqu’en janvier.
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Publié le 07-10-2021 à 10h08 - Mis à jour le 07-10-2021 à 11h04
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Nous rencontrons Marie-Aurore d'Awans et Pauline Beugnies après trois ans de travail et trois représentations de Mawda, ça veut dire tendresse. L'aboutissement d'un processus. Certainement pas une fin, ni un détachement. Ne fût-ce que parce que "dans nos vies il se passe des trucs réels avec des gens réels qui sont parfois liés à cette histoire".
Maintenant que le spectacle est né, les échos reçus rejoignent leurs espoirs. "On a réussi à faire passer l'indignation, les questions qui ont été escamotées lors du procès, relève Pauline Beugnies. Reste qu'on a des doutes sur ce qu'on aurait pu construire autrement..." Créer cet objet, c'était agir ? "Disons qu'on a l'impression d'être un tout petit peu moins impuissantes. C'est infime, mais c'est quelque chose."
La première de Mawda coïncidait avec l'ouverture à Mons du procès en appel de la peine requise envers Victor J., le policier auteur du tir fatal dans la nuit du 16 au 17 mai 2018. "Pour les parents, le premier procès avait déjà été d'une extrême violence. C'est incompréhensible qu'ils doivent en revivre un autre, à cause de l'homme qui a tué leur fille."
Que faire de l'indignation, de la révolte, de la colère face à ces faits ? "Quand nous sommes rentrées du Kurdistan, en juillet, et qu'il y avait la grève de la faim des sans-papiers ici, je me suis demandé pourquoi on faisait du théâtre. Le sens de tout cela se perdait", confie Marie-Aurore d'Awans, par ailleurs cofondatrice de l'association Deux euros cinquante et très impliquée dans la Plateforme citoyenne, entre autres. "Mais, si on ne finit jamais rien, à quoi bon ?"
Ces combats-là, rebondit Pauline Beugnies, "sont d'ordre symbolique. C'est important. S'il est possible pour les gens de penser que des 'migrants' peuvent risquer d'utiliser leur enfant comme bouclier dans une course-poursuite, on leur a raconté les choses à l'envers".
Nuance et profondeur
Le spectacle cite les premières hypothèses, les déclarations péremptoires, les contresens et autres récupérations de ce qu'on appellera l'affaire Mawda. "On veut soulever l'absurdité des situations qu'on fait vivre à des gens – et apporter de la nuance, de la profondeur, un changement de point de vue. Nous ne sommes plus aujourd'hui au même endroit qu'au début du processus. Ni au même endroit que ce que racontent les médias de masse."
"Je suis vraiment déçue, déclare Pauline Beugnies. Des politiques, je n'attends vraiment rien. Mais une part de moi croit encore un tout petit peu au contre-pouvoir des médias. Or, dans cette affaire, au lieu d'être contradicteurs, ils relaient – y compris les contradictions, d'ailleurs –, mais ça s'arrête là." Avec, en sous-texte, une pseudo-neutralité, dont d'aucuns reprocheraient à nos interlocutrices de manquer. "Bien sûr qu'on a un prisme : la dignité des parents. Qui d'ailleurs sont les seuls à en faire preuve lors du procès, où leur parole est dénigrée, où on leur dit clairement qu'on ne répondra pas à leurs questions. Ce sont ces personnes, Prhast et Shamdin, qui ont sauvé l'humanité de la situation."
- "Mawda, ça veut dire tendresse", infos: www.kvs.be