Amour, sexe, famille, religion… portrait d’une jeunesse incandescente
Ahmed Madani donne voix et légitimité aux jeunes des cités françaises. À voir !
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Publié le 10-11-2021 à 13h56 - Mis à jour le 10-11-2021 à 14h36
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Aboubacar, Ibrahima, Virgil, Marie, Julie, Philippe, Merbouha, Jordan et Izabela. Mardi soir, lors de la première d'Incandescences au Théâtre de Poche, ces neuf jeunes comédiens français non-professionnels ont mis le public en émois, touché par leur sincérité, leur fragilité et leur mise à nu, sans fard ni travestissement.
Nés de parents sénégalais, martiniquais, polonais, français, sino-cambodgiens…, tous ont grandi en banlieue. S'ils se retrouvent aujourd'hui sur scène, c'est parce qu'ils ont pris part au projet Face à leur destin de l'auteur et metteur en scène français Ahmed Madani, né en Algérie en 1952. Initiée en 2012, cette aventure socio-théâtrale emmène sur les plateaux de jeunes amateurs, dont les parents ont vécu l'exil et vivent dans des quartiers populaires. Objectif ? Faire entendre la voix de cette jeunesse souvent mise à la marge.
Conçu comme une trilogie, Face à leur destin s'est d'abord intéressé à la parole des jeunes hommes avec Illumination(s) en 2012, suivi de Flamme(s) en 2016, dédié à celle des jeunes femmes. Dernier chapitre, Incandescences réunit une distribution mixte, sélectionnée à l'issue d'une dizaine de stages-auditions en 2020 auxquels se sont présentés une petite centaine de jeunes habitant dans des cités.
C'est gorgé de leurs récits de vie, souvenirs recueillis auprès des aînés, confidences, questionnements… et dans un échange d'expériences de l'immigration qu'Ahmed Madani a tissé le fil d'Incandescences.
Chants et danses
De leurs racines familiales à leur propre projection de l'amour, de la sexualité et du couple, Aboubacar, Ibrahima, Virgil, Marie, Julie, Philippe, Merbouha, Jordan et Izabela (se) racontent et (s') interrogent, sans filtre ni concession, par le prisme de leur éducation, leur religion, leurs traumas, les codes de la vie en cité…, tout en étant chahutés par leurs désirs et pulsions intimes, leurs doutes, et l'envie de braver les interdits. "J'aime pas être dans une case !", clame Merbouha. "Moi non plus !", lui répondent les autres en chœur.
Telle une œuvre pointilliste, Ahmed Amadi procède par touches d’écriture : chaque interprète imprègne le corps de texte, précis et soigné, de son identité par des passages dans sa langue maternelle, des expressions propres à son quartier, une intonation, etc. Apparaît ainsi, peu à peu, un tableau chamarré de cette jeunesse incandescente. Touchant et poétique.
À leur parole s'allient harmonieusement des chants (dont un magnifique Ave Maria) et danses urbaines tandis que la projection de visages, de corps et de végétaux en gros plan (la création vidéo est signée Nicolas Clauss) soutient le propos et habille le plateau avec élégance.
--> Bruxelles, Le Poche, jusqu’au 27 novembre. Infos et rés. au 02.649.17.27 ou sur www.poche.be