Qu’a fait Matthieu de son épouse ? “Ramsès II”, un “thriller hilarant” au théâtre
La Comédie de Bruxelles clôture sa saison 2022-2023 avec une comédie déroutante de l’auteur français Sébastien Thiéry. À voir au Centre culturel d’Auderghem du 4 au 9 avril, puis à Uccle (du 18 au 23 avril).
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Publié le 28-03-2023 à 15h43
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Initialement programmée en 2020-2021, la pièce Ramsès II a dû être reportée à de multiples reprises en raison de la crise sanitaire. C’est donc non sans une certaine émotion que Daniel Hanssens, directeur de la Comédie de Bruxelles, clôture la saison 2022-2023 de sa compagnie avec cette comédie déroutante du Français Sébastien Thiéry, dont la tournée s’achèvera à Bruxelles.
En pleine tourmente du Covid et de la valse des ouvertures-fermetures des salles de spectacle, “on s’est dit qu’on allait abandonner”, se souvient Daniel Hanssens. “Mais je n’aime pas abandonner un projet. J’aime aller jusqu’au bout. Donc, on a décalé le spectacle, encore et encore. Heureusement, l’auteur, Sébastien Thiéry, a accepté de le reporter, car les droits sont toujours libres pour dix-huit mois maximum.” Un soulagement et une joie pour toute l’équipe technique et de comédiens, formée de Daniel Hanssens lui-même, Marie-Hélène Remacle, Clément Manuel (qu’on a pu découvrir, dans la série Ennemi public, aux côtés de Daniel Hanssens) et Inès Dubuisson.
Une histoire “complètement dingue”
Ce projet, le directeur de la Comédie de Bruxelles y tient tout particulièrement, car il a eu un vrai coup de cœur pour cette “histoire complètement dingue”. “Sébastien Thiéry a vraiment un grain de génie dans son écriture, s’enflamme-t-il. J’ai commencé à lire cette pièce pendant la nuit en me disant que je la terminerais le lendemain matin. Mais, non, je l’ai lue d’une traite jusqu’au bout. Je l’ai posée puis je l’ai relue jusque 5h du matin. Une heure plus tard, à 6h, j’introduisais ma demande auprès de la SACD (Société des auteurs et compositeurs dramatiques) pour obtenir les droits”.

Le pitch ? Jean (Daniel Hanssens) et Elisabeth (Marie-Hélène Remacle) ont invité leur fille Bénédicte (Inès Dubuisson) et son époux Matthieu (Clément Manuel) dans leur maison de campagne. Le couple, qui rentre d’un voyage en Égypte, est attendu pour le déjeuner. Mais Matthieu arrive seul… Pourquoi sa femme n’est-elle pas avec lui ? Matthieu, au comportement très étrange, ne parvient pas à expliquer l’absence de Bénédicte. Où est-elle ? Le jeune mari aurait-il des choses à cacher ? Pourquoi cette famille, qui semblait aussi solide que la pyramide de Kheops, s’effondre-t-elle brutalement ?
À partir du moment où le texte embarque les spectateurs, il les agrippe jusqu’au bout et ne les lâche plus."
”C’est un thriller hilarant : il y a du Stephen King, du Francis Weber…, décrit Daniel Hanssens qui met également la pièce en scène. Au départ, les spectateurs assistent à une situation normale, puis, au fil de la pièce, ils découvrent que cela devient de plus en plus étrange, même carrément très étrange. Ils éclatent de rire, jusqu’au moment où la situation devient tellement énorme qu’ils se disent que ce n’est pas possible. Sébastien Thiéry pousse certaines choses très loin, à la limite de ce que les spectateurs sont prêts à accepter. Ça, c’est génial !” Et de commenter : “Dans Ramsès II, les situations sont vraiment énormes. Alors, peut-on rire de tout ? Oui, jusqu’à une certaine mesure, je pense. En tout cas, ce qui est extraordinaire, c’est qu’à partir du moment où le texte embarque les spectateurs, il les agrippe jusqu’au bout et ne les lâche plus”.
”Sans aide, cela devient insupportable”
Voici bientôt vingt ans que Daniel Hanssens porte la Comédie de Bruxelles à bout de bras (la compagnie fêtera ses vingt ans la saison prochaine, en 2024). Un chemin pavé d’incroyables aventures artistiques et humaines, mais aussi de nombreux obstacles. “En vingt ans, je suis passé par beaucoup de stades différents, confie-t-il. Il y a dix ans, cela a été tellement dur que j’ai vendu ma maison pour subvenir aux besoins de ma boîte et sauver l’emploi. Mais je ne le ferai pas deux fois”.
Si le producteur, comédien et metteur en scène adopte un ton aussi déterminé, c’est parce que, comme de très nombreux opérateurs culturels, il a remis une demande de contrat-programme (soit une demande de subvention) auprès de l’Administration de la Culture. Les montants octroyés devraient être annoncés à l’automne prochain. “Si la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) décide que le travail de la Comédie de Bruxelles – qui fait de l’humour, du populaire de qualité, du divertissement, mais qui fait réfléchir les spectateurs – n’est pas essentiel pour elle et le public, et bien, j’aviserai si je continue ou pas, soupire-t-il, amer. Mais, sans aide [de la FWB], je ne vois pas très bien comment je pourrais tenir, car, pour les opérateurs privés, cela devient insupportable”.
Depuis la crise sanitaire, en effet, “il y a une perte de fréquentation de 20 à 40 % des spectateurs”, déplore Daniel Hanssens. “Alors, les théâtres qui fonctionnement avec un public d’abonnés remplissent leur salle, et tant mieux, relève-t-il, mais, au-delà de ça, il y a des spectacles qui ne fonctionnent pas, tant dans les théâtres subventionnés que privés”.
J'adore le théâtre. C'est ma passion. Mais je ne vais pas me tuer une seconde fois à la tâche."
Il poursuit : “Pour ma part, je ne vais plus me sacrifier pour du théâtre. C’est fini ! Ou la FWB reconnaît le travail de la Comédie de Bruxelles ou ce sera au revoir et on fera autre chose”. Et d’exposer : “Dans la boîte, c’est moi qui m’occupe des contrats, des tournées, de la comptabilité ; qui paie les factures ; etc. Tout cela en plus de mes casquettes de producteur, metteur en scène et comédien. À un moment donné, je n’ai plus de vie. Je l’ai déjà payé financièrement et de ma santé. Donc, là, ça va trop loin. J’adore le théâtre. C’est ma passion. Mais je ne vais pas me tuer une seconde fois à la tâche”.
-- > En tournée : du 4 au 9 avril au Centre culturel d’Auderghem ; le 11 avril à Dinant, le 12 avril à Ottignies, le 14 avril à Huy ; et du 18 au 23 avril au Centre culturel d’Uccle. Infos et rés. au 02.560.21.21 ou sur www.comediedebruxelles.be