”Puissant.es” : “Pouvoir exprimer ce que l’on ressent renforce et rend fort.e”
La compagnie 3637 présente sa nouvelle création collective au Jean Vilar, “Puissant.es”. Ou quand trois ados collent à coups de slogans leur colère sur les murs. Un spectacle accessible dès 14 ans. À voir du 25 septembre au 2 octobre.
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- Publié le 19-09-2023 à 14h11
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Cette après-midi-là, sur la scène du Studio 12 du Jean Vilar, de grands morceaux de papier sont chiffonnés en boule à côté de trois grands pans de mur gris. Trois micros sur pied occupent le devant du plateau. À une semaine de la première de leur nouvelle création collective, Puissant·es (par la compagnie jeune public 3637), Coralie Vanderlinden et Lisa Cogniaux, co-autrices avec les comédiennes Annette Gatta et Sophie Linsmaux, sont dans la dernière ligne droite et ses milliers de détails à régler. Dont, ce vendredi, “où acheter en vitesse de la colle à tapisser ?”…
Des slogans dans les couloirs de l’école
”En 2016, nous avons créé le spectacle Des illusions, qui raconte l’histoire d’une adolescente qui doit se positionner par rapport à son choix de métier, retrace Coralie Vanderlinden. Elle se demandait si, au final, la société était bien adaptée à elle ou si c’était elle qui devait s’adapter à la société”. Comme à chacune de ses créations, la compagnie 3637 organise des ateliers et bords de scène. “Parfois, des ados nous interpellaient : 'C’est bien beau de vouloir être hors de la société, mais que fait-on si on ne s’y sent pas bien ?', se souvient Coralie Vanderlinden. Cette question m’intéressait vraiment”.
En 2018, à l’initiative de Greta Thunberg, s’organisent un peu partout dans le monde des manifestations d’élèves et d’étudiants, chaque vendredi, pour réclamer une justice climatique. C’est le mouvement Youth for Climate. Malheureusement, la pandémie de Covid y mettra un sérieux coup de frein. Au sortir de la crise sanitaire, “beaucoup de jeunes s’interrogeaient s’il fallait ou pas reprendre ces manifestations, continue la comédienne. Certains défendaient que oui ; d’autres, non. En tant qu’adulte et artiste, je trouvais ça intéressant de montrer sur scène que tout peut avoir de l’impact, notamment intimement, dans sa force intérieure”.
Tandis que la compagnie poursuit son travail pédagogique avec différentes classes sur les thèmes de la colère, l’action, les manifestations, la police, etc., “on a abordé le sujet des colleuses féministes de Paris (ces militantes qui dénoncent à l’aide de collages en lettres noires sur fond blanc tout type de violences faites aux femmes, dont, à l’origine, les féminicides, NdlR) et, tout de suite, les élèves ont eu envie de créer des slogans et de les afficher dans les couloirs de leur école. On tenait quelque chose”.

Dénoncer sans casser
Fortes de ce constat, “on a eu envie de poursuivre [notre travail de création] dans la voie de cette lutte, avec une envie de dire, d’être écouté, d’avoir de l’impact et de reprendre l’espace public, sourit Coralie Vanderlinden, sans que cela soit dangereux”.
On s'adresse à des scolaires, qui n'ont pas spécialement choisi de venir au théâtre. Or, pour moi, tout le monde doit avoir accès à nos spectacles."
”Bien sûr, il y a des émeutes, des sabotages (par exemple le blocage d’Engie), des vitrines cassées pendant des manifestations auxquels participent parfois des jeunes, enchaîne Lisa Cogniaux, mais on avait du mal à imaginer que nos spectateurs et spectatrices (Puissant·es est accessible dès 14 ans, NdlR) se disent : 'Waouh ! Je me sens concerné·e' ou 'Je me sentirais capable de faire ça'. De même, on ne voulait pas que ce soit politiquement clivant”. Et Coralie Vanderlinden de préciser : “On s’adresse à des scolaires, qui n’ont pas spécialement choisi de venir au théâtre. Or, pour moi, tout le monde doit avoir accès à nos spectacles. La question de la lutte et de la mise en action est intime. Donc, notre façon d’en parler est plus proche que de mettre en scène des émeutes ou des vitrines cassées”.
Un trio de comédiennes sur scène
Pour que les personnages de la pièce, trois ados, se mettent en mouvement, il leur fallait une cause. “Une cause n’est pas meilleure qu’une autre, mais, pour “choisir”, nous sommes parties de notre propre vécu, explique Lisa Cogniaux. Personnellement, je suis très féministe et, dans la compagnie, tout le monde est convaincu par cette cause-là. Au plateau, le casting est féminin : Annette Gatta, Sophie Linsmaux et Coralie Vanderlinden. Donc, nous nous sentions légitimes pour en parler”. Puis, “il y a une forme de féminisme qui est un point d’entrée pour énormément de combats (exploitation du corps des femmes, anticapitalisme, écologie…) et qui, dans le spectacle, permet aux personnages de développer une pensée politique et une lutte plus globales”.
”Au cours de cette fable, les trois personnages, qui sont donc trois colleuses, vont évoluer, décrit Coralie Vanderlinden. Elles vont être en difficulté puis il va y avoir une libération. On voulait que cette libération ait lieu en direct, pour voir cet “empouvoirment”, cette force qui revient dans leur corps ; qu’elles puissent faire, à la fin du spectacle, des choses qu’elles n’auraient pas crû possibles. C’est pour cela que le spectacle s’appelle Puissant·es : pouvoir exprimer ce que l’on ressent, ça renforce et ça rend fort·e”.
→ Louvain-la-Neuve, Jean Vilar (Studio 12), à partir de 14 ans, du 25 septembre au 2 octobre. Infos et rés. au 0800.25.325 ou sur www.levilar.be