Face à l’urgence climatique, réfléchissons, agissons et ralentissons ensemble avant d’atteindre le découragement
Accueillons la voie du perfectionnement mécanique et technologique dans laquelle nous sommes lancés sans raidissement et mettons-la au profit de la recherche de moyens de production verts.
Publié le 23-05-2023 à 10h44 - Mis à jour le 26-05-2023 à 08h04
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Une carte blanche de Jeanne Delépine, étudiante en 3e bachelier en sciences économiques et de gestion à HEC Liège – École de gestion de l’Université de Liège.
Notre niveau de conscience et de sensibilisation à l’urgence climatique peut être plus ou moins élevé. Il dépend de multiples facteurs tels que notre culture, notre éducation, notre exposition aux risques climatiques et bien d’autres. Parallèlement, notre disposition à agir de façon de durable et respectueuse de l’environnement est propre à chacun. En effet, entre ceux qui ne prennent pas en compte ces paramètres dans leur mode de vie, et ceux qui agissent quotidiennement en respect de ces principes, il y a place pour de nombreux individus sur ce continuum.
Pendant longtemps la corrélation entre ces deux éléments, conscience de l’urgence climatique et disposition à agir en conséquence, a pu sembler positive. Cela aurait-il un terme ? Pourrait-on arriver à un point où, sans directives globales et indications pratiques des changements à effectuer, la relation entre ces deux variables deviendrait négative ? Comment ne pas atteindre et dépasser ce point temporel critique, à partir duquel on observerait des individus avec une conscience de l’urgence climatique maximisée mais une disposition à agir faible, voire nulle, paralysés par un fatalisme destructeur “mon action isolée est insignifiante, c’est foutu, profitons une dernière fois !” ?
Hier vint la prise de conscience
Reprenons depuis le début, depuis l’après-guerre jusqu’au début du XXe siècle où, malgré les chocs pétroliers, consommation accrue rimait avec augmentation de l’activité économique et du progrès. L’objectif était la (re) construction, sans préoccupation de la préservation de l’environnement et la non-durabilité de ce fonctionnement.
Ensuite vint la prise de conscience. Des personnalités publiques ont émergé (Y.Arthus-Bertrand, J.Jancovici et d’autres), chacune défendant une cause faisant sens pour elle pour (r) éveiller la population face à la gravité de la situation et aux risques encourus. Certains alors optent pour des régimes alimentaires plus respectueux de la nature, se tournent vers le responsible-clothing, choisissent des moyens de transport vert,…
Aujourd’hui nous sommes sensibilisés mais mal informés
Aujourd’hui, ce stade awarness rise est atteint dans les pays occidentaux. Les jeunes et moins jeunes sont conscients de la non-durabilité du système actuel, à part peut-être une poignée volontairement inconsciente ou en déni. Peu importe, ne perdons pas de temps à tenter de conscientiser ces “inéveillables”. L’objectif n’est plus la diffusion de constats dramatiques mais l’allocation d’efforts à des actions précises aux résultats concrets. Une communication exclusive des nouvelles catastrophiques finirait par être contre-productive et décourager la population prête à agir.
Cette population est en quête d’indications sur comment bien agir. Un ado sait qu’il ne doit plus acheter chez Zara, mais où ? Un père de famille sait qu’il doit faire ses courses autrement, mais par où commencer ? Quand être certain de bien faire ? Cette communication de masse pour changer les habitudes de consommation a créé des opportunités de business et nourrit le greenwashing.
Demain, un autre mode de production
Demain (littéralement) il faut 1) mettre en place un système favorisant les entreprises satisfaisant des normes strictes quant au respect de l’environnement et des droits humains et empêchant celles qui dégagent des externalités négatives d’exercer, 2) privilégier la circularité et 3) donner à la population des injonctions précises. En raison de l’urgence climatique et parce que la population perd espoir et motivation. Ce n’est plus l’heure des petits pas. La croissance continue dans laquelle s’inscrit notre modèle économique n’est pas durable. Plutôt que la stopper brusquement, appliquons-nous à la maîtriser, la rendre mesurée, transparente et durable.
Accueillons la voie du perfectionnement mécanique et technologique dans laquelle nous sommes lancés sans raidissement et mettons-la au profit de la recherche de moyens de production verts. Par exemple, allouons les dépenses en R&D à la confection de vêtements sans externalité ou à la création d’avions zéro émissions ; ne nous limitons pas à dissuader les personnes d’acheter des vêtements et de prendre l’avion. La technologie, vecteur de progrès, peut améliorer les processus de production en les rendant plus efficients et durables, mais n’est porteuse d’espoir que si on s’en sert pour produire mieux, et non pour produire toujours plus.
Place à l’action
Le goal de “net-zero” d’ici 2050 devient mythique. Celui-ci implique de développer un système qui ne dégagera aucune émission mais aussi de mettre au point des technologies qui retireraient les particules se trouvant déjà dans notre air. Il y a là de quoi créer de l’emploi et de la valeur, mais il faut agir avant de perdre la relation positive entre la conscience et la disposition à agir.