Tout David Bowie à la Philharmonie de Paris
Si vous l'avez manquée à Londres, ne ratez pas l'exposition David Bowie Is, accueillie jusqu'au 31 mai, à la Philharmonie de Paris.
Publié le 11-03-2015 à 08h44 - Mis à jour le 11-01-2016 à 08h58
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Même celles et ceux qui ont vu la première version de l'exposition David Bowie Is, au Victoria & Albert Museum de Londres, en 2013, reverront celle de Paris d'un oeil neuf. Car plus qu'un copier-coller, elle apparaît légèrement revue et, même, augmentée de quelques pièces plus spécifiquement françaises liées à l'artiste. La nouvelle Philharmonie de Paris, de surcroît, dont c'est la première exposition, offre plus d'espace que les salles exiguës du Victoria & Albert Musuem londonien. Et l'exercice difficile d'exposer un artiste musical fut bien rôdé à la Cité de la Musique, avec des dispositifs sonores accompagnant le parcours, tantôt discrètement, tantôt enveloppant. Ici, les audioguides sont équipés de capteurs, qui géolocalise le parcours du visiteur, adaptant commentaires et musiques instantanément. Le parcours se complète d'un montage d'extraits de concerts ou de performances télévisuelles, dont le son a été remastérisé pour une immersion surround.
1. L'avant-gardiste
Plus que tout autre, David Bowie est l'artiste musical qui se prête le mieux à l'exposition. D'abord parce que c'est un artiste complet - presque total. La musique et la scène rock ont été ses supports, mais il fut inspiré par les arts plastiques, le cinéma, la littérature, la poésie - et en a tâté lui-même avec plus ou moins de bonheur. Il fut le plus prolifique créateur de sa génération, un inégalé avant-gardiste butineur (c'est plus sympa que le sempiternel "vampire" qu'on lui accole) qui endossa six identités en autant d'années et sept albums, tous des fondamentaux du rock, de la pop et de l'électro modernes. Aujourd'hui, rare sont les groupes ou les artistes solos qui produisent un seul album sur le même intervalle...
2. Le transformiste
Créateur d'avatars scéniques, Bowie est un objet culturel idéal, miroir de son époque, parfois en avance de sept ans de réflexion : post-hippie avec son album Hunky Dory (1971), extra-terrestre androgyne avec Ziggy Stardust et Aladdin Sane (1972-1973), glam-rock décadent dans Diamond Dogs (1974), playboy disco avec Young Americans (1975), dandy éthéré en Thin White Duke époque Station to Station (1976), pré-new wave post-romantique avec sa trilogie berlinoise Low-Heroes-Lodger (1977-1979), pop star des années frics eighties (1983-1987), aliené international et pré-techno (Outside-Earthling ; 1995-1997). Sa discographie alimenta dès lors une garde-robe flamboyante, griffée au fil des décennies pars Kansai Yamamoto, Freddie Burretti ou Alexander McQueen, autant de jalons à revoir sur mannequin moulés à ses mensurations hors-normes.

3. Le collectionneur
Ambitieux conscient de son destin de star, David Robert Jones collectionna ses propres memorabilia dès qu'il devint David Bowie. Au nombre de 75 000, ils sont stockés à New York, sous la supervision de son archiviste, Sandy Hirshkowitz. L'essentiel de l'exposition provient de cette manne, complétée par des collections privées, comme celle de Kevin Cann, qui a récupéré des pièces estimables auprès du premier manager de Bowie, Kenneth Pitt.
4. Le créateur
Il est rare de pouvoir accéder de la sorte à l'intime - certes contrôlé - d'un créateur. On peut ainsi découvrir les bouts de cut-ups utilisés en 1977 pour les paroles de Blackout (Heroes). La boite de carte de stratégie oblique, imaginée par Brian Eno et Peter Schlidt et que Bowie utilisa abondamment durant sa période berlinoise. Des croquis de sa main pour des costumes ou décors de scène - comme celle de la tournée Diamond Dogs inspirée du Metropolis de Fritz Lang couplée à un story-board de la main de l'artiste en vue d'un petit film inspiré du roman 1984 de George Orwell.

5. Deus ex Machina
Le titre de l'exposition résume bien le personnage, sa démarche et le propos de l'événement : David Bowie Is - David Bowie Est. Formule ouverte qui permet d'y adjoindre toutes ses identités (scéniques, sexuelles, artistiques). Formule existentielle qui sous-entend que si Bowie "est", c'est d'abord qu'il "pense" - en dessinant, écrivant, absorbant toutes les impulsions créatrices de son environnement. Formule quasiment incantatoire, qui renvoie au mythe des stars : Bowie, dieu de la scène rock statufié de son vivant.