Diplo pour les nuls : Quand Joe Biden fait son Trump
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Publié le 25-01-2022 à 21h05 - Mis à jour le 25-01-2022 à 21h36
On aurait pu croire Donald Trump de retour. À un journaliste de la chaîne conservatrice Fox News qui lui demandait si l'inflation (au plus haut depuis quarante ans) serait un handicap pour les législatives de novembre, Joe Biden a répondu avec plus d'ironie que d'élégance. "C'est un grand atout. Davantage d'inflation. Quel stupide fils de p… !"
La différence, c’est que l’ancien Président se serait exprimé haut et fort - l’invective, l’insulte, l’injure étaient chez lui une seconde nature. Joe Biden, lui, pensait que le micro était coupé, alors que les journalistes quittaient la salle. La question lui avait été lancée dans le brouhaha par Peter Doocy, sans devoir mériter nécessairement une réponse.
Des gros mots présidentiels adressés à des journalistes, voilà qui n'est ni nouveau ni exceptionnel. Trump fut bien sûr un expert. Il qualifia Jonathan Karl (ABC) de "disgrâce" et April Ryan (CNN) de "bonne à rien". Il se moqua d'un reporter handicapé du New York Times. Il fit retirer son accréditation à Jim Acosta, le correspondant de CNN à la Maison-Blanche. Et il suggéra que Megyn Kelly avait ses règles quand elle lui posa - sur Fox News pourtant - des questions jugées agaçantes.
Alors gouverneur du Texas en campagne pour la présidence, George W. Bush avait dérapé en pointant du doigt Adam Clymer du New York Times, estimant, devant un Dick Cheney approbatif, que c'était "un trou du c… de première division".
La politique, aux États-Unis comme ailleurs, a ses règles, ou plutôt son absence de règles. On pourrait multiplier les exemples, même si l'on imagine mal un Barack Obama se comportant de la sorte. On pensait la même chose de Joe Biden, un homme politique d'une autre époque et d'une autre école. Mais, contrarié sans doute par des sondages en berne, il se montre plus volontiers irritable. La semaine dernière déjà, il avait qualifié de "stupide" une question sur l'Ukraine.
La leçon de bonne conduite, dans cette histoire, a été donnée par la victime. Doocy a d’abord plaisanté, en déclarant que rien ne prouvait le jugement du Président à son égard. Il s’est réjoui ensuite que Joe Biden l’ait appelé pour se faire pardonner. Il a enfin regretté qu’on monte l’incident en épingle alors qu’une guerre menace avec la Russie.
Une énigme demeure. Pourquoi l’écart de langage présidentiel a-t-il été retranscrit dans le compte rendu officiel de la rencontre ?