Les étranges visiteurs des Jeux d’hiver
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Publié le 07-02-2022 à 09h40 - Mis à jour le 07-02-2022 à 09h41
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Aux côtés de la poignée de dictateurs qui ont choisi de se rendre à Pékin pour assister aux Jeux olympiques d'hiver, on remarque deux ou trois chefs d'État européens qu'on s'étonnerait a priori de trouver en si mauvaise compagnie. C'est le cas du grand-duc Henri de Luxembourg, tellement empressé de participer à la fête qu'il fut le premier de ses pairs à débarquer dans la capitale chinoise, dès lundi dernier.
Des esprits chagrins penseront qu’il tenait à cœur au Grand-Duc de grossir les rangs de la délégation luxembourgeoise, réduite à deux athlètes, la jeune étoile du ski national Gwyneth Ten Raa (16 ans) et son collègue Matthieu Osch, qui fut l’unique représentant du Grand-Duché aux jeux de Pyeongchang. L’explication est plus prosaïque : Henri est membre du Comité olympique international depuis 1998.
Cela dit, l'occasion était belle de faire d'une pierre de curling deux coups. Cette année marque le cinquantième anniversaire des relations diplomatiques entre la Chine et le Luxembourg, lequel s'enorgueillit d'accueillir sept banques chinoises et se réjouit d'enregistrer un bond de 60 % dans ses échanges commerciaux avec Pékin. On comprend la volonté d'envoyer "un message fort" aux dirigeants chinois, la presse grand-ducale ne manquant pas de saluer "le soutien" apporté aux organisateurs des JO par l'ambassadeur Marc Hübsch dans une vidéo qui a fait les délices de la propagande communiste.
L’avantage évidemment, pour Henri, c’est qu’à la différence de ses compatriotes restés au pays, il ne doit pas se lever au beau milieu de la nuit pour suivre, compte tenu du décalage horaire, les performances des sportifs luxembourgeois. C’est probablement ce qui a motivé également le déplacement du prince Albert II de Monaco. L’ancien champion de bobsleigh, vétéran de cinq olympiades, ne pouvait pas imaginer de laisser seuls les bobeurs monégasques Rudy Rinaldi et Boris Vain - pas plus que le skieur Arnaud Alessandria.
L’honnêteté oblige à préciser qu’Albert est lui aussi membre du Comité international olympique. Tout le monde ne peut pas en dire autant (on se prend d’ailleurs à rêver d’appartenir à un club aussi select). C’est le cas du président polonais dont la présence à Pékin non seulement a enfreint le boycott diplomatique encouragé, plutôt mollement il est vrai, par l’Union européenne, mais défie aussi toute logique. Andrzej Duda est, en effet, hostile à la Russie, et il est venu se jeter dans les bras de la Chine, seul grand pays à défendre la posture agressive du Kremlin à l’égard de l’Ukraine.
L’intention, objectent sans rire les conseillers de Duda, était justement de briser l’axe Pékin-Moscou en faisant entendre une autre voix que celle de Vladimir Poutine - et non seulement à l’oreille de Xi Jinping, mais aussi à celles du secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres, et du… président du Comité international olympique, Thomas Bach. Ce dernier devrait, toutefois, être trop occupé puisqu’il avait promis de dîner avec Peng Shuai, et qu’il faut encore retrouver la championne de tennis, disparue sans laisser de trace depuis le mois de novembre.