Bienvenue en Hongrie
On sait que Viktor Orban a décidé de subsidier le carburant, mais uniquement pour les citoyens hongrois - ils ne doivent donc pas se mêler aux étrangers lorsqu’ils font le plein.
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- Publié le 01-08-2022 à 22h03
- Mis à jour le 01-08-2022 à 22h04
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Le Premier ministre hongrois n'aime pas les mélanges. Il l'a encore répété, le 23 juillet, dans un discours qui a suscité l'indignation. " Nous ne voulons pas devenir une race mixte ", avait alors déclaré Viktor Orban, en déplorant que "les migrations aient coupé l'Europe en deux". Ou plutôt, avait-il précisé, "elles ont coupé l'Occident en deux. Une moitié forme un monde où les peuples européens et non européens vivent ensemble. Ces pays ne sont plus des nations" .
Le touriste venu goûter, malgré tout, l'hospitalité hongroise est confronté à cette théorie fumeuse (quand on songe aux multiples métissages dont la Hongrie actuelle est le fruit) en un lieu pour le moins inattendu : la station-service. À peine arrêté dans une grande enseigne Shell des environs de Budapest, il assiste à un énervement général. La gérante surgit prestement, elle qui connaît quelques mots d'anglais. "Vous pouvez utiliser la pompe 7 ou 8 !" lance-t-elle. "Mais pourquoi pas celle-ci ? Quelle différence avec celles-là ?" rétorque-t-il, éberlué. "Le prix !" assène-t-elle en guise d'explication suffisante et définitive.
On sait que Viktor Orban a décidé de subsidier le carburant, mais uniquement pour les citoyens hongrois - ils ne doivent donc pas se mêler aux étrangers lorsqu’ils font le plein. Certaines stations ont tout prévu : des pompes sont affublées d’une pancarte "NON H" et réservées ainsi aux métèques. D’autres stations sont trop petites pour permettre pareille distinction. Elles n’en sont pas moins très bien organisées : quand le conducteur d’un véhicule immatriculé à l’étranger décroche le pistolet, le prix normal du litre d’essence (480 forints, environ 1,2 euro) disparaît comme par enchantement de l’écran et est remplacé par le montant "sans ristourne" (788 forints). Stupéfiant miracle de la technologie...
On dira que les Hongrois récupèrent ainsi une partie leurs impôts, privilège dont n’ont pas à jouir les étrangers (et notamment les frontaliers). Cette discrimination contrevient, cependant, à la législation européenne : Bruxelles a rappelé Budapest à l’ordre plusieurs fois déjà. Et il est piquant de se souvenir que la pratique d’une tarification différente pour les étrangers était jadis l’apanage des pays communistes (en Chine, par exemple, ils payaient le double pour le même billet de train). La comparaison n’est guère flatteuse, veut-on croire, pour le régime de Viktor Orban.