Edito: Querelle d’ego entre Turquie et Etats-Unis
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Publié le 14-08-2018 à 06h45 - Mis à jour le 14-08-2018 à 06h50
Un édito de Vincent Braun.
Les tensions diplomatiques entre la Turquie et les Etats-Unis continuent d’inquiéter la sphère économico-financière turque - et bien au-delà. Car, au contraire du complot politique envisagé par le président turc Recep Tayyip Erdogan, c’est bien l’inquiétude de ces milieux d’affaires qui a fait dégringoler la livre turque. Celle-ci a touché ce lundi un second plancher historique d’affilée pour enregistrer, depuis le début de l’année, une décote globale de 40 % de sa valeur par rapport au dollar américain.
Si la situation s’est envenimée cet été avec l’affaire du pasteur Brunson, un citoyen américain emprisonné en Turquie pour "espionnage" et "terrorisme" et dont Washington exige la relaxe, ces tensions sont le fruit d’une longue séquence de querelle entre ces deux Etats alliés au sein de l’Otan. Et force est de constater que l’interventionnisme des deux pays dans la guerre en Syrie contribue largement à entretenir la querelle.
Cela fait longtemps que la Turquie reproche aux Etats-Unis leur appui aux milices kurdes syriennes, qu’elle considère comme de dangereux terroristes associés aux Kurdes turcs (du PKK) honnis par Ankara.
Ces divergences d’intérêts ont déjà failli - et pourraient, suite à l’actuelle escalade des tensions - coûter aux Américains l’accès à la base aérienne d’Incirlik, dans le Sud de la Turquie, qui sert de centre opérationnel à la coalition internationale contre l’Etat islamique, dirigée par Washington et à laquelle participe Ankara.
L’ambition régionale de la Turquie, qui a profité de l’imbroglio militaire en Syrie pour y engager ses soldats dès 2017 afin d’éliminer toute présence kurde à sa frontière, a contrecarré celle des Etats-Unis - qui a perdu tout espoir d’y exercer une quelconque influence.
Enfin, il ne faut pas sous-estimer cet élément: suite à la récente restauration des sanctions américaines à l’égard de Téhéran, la Turquie a assuré l’Iran de son appui, lui promettant de maintenir leur important partenariat énergétique. Ce qui a, sans doute, contrarié une nouvelle fois la Maison-Blanche et favorisé l’imposition de restrictions à la Turquie.