Et, à la fin, il reste le pragmatisme
Un édito de François Mathieu.
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Publié le 03-01-2022 à 06h31
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La Commission européenne, en proposant de considérer comme durables les investissements énergétiques dans le gaz et le nucléaire, sous certaines (strictes) conditions, ne va pas seulement permettre aux investisseurs de savoir précisément quelles sont ces activités "durables" ou "de transition". Elle risque aussi d’échauffer encore un peu plus les esprits sur ce dossier de la transition énergétique, et pas seulement en Belgique, qui n’en finit pas de sortir du nucléaire. La proposition de la Commission remet en effet le pragmatisme à l’avant-plan. Et les idéologues abhorrent le pragmatisme. Pourtant, la Commission a des atouts à faire valoir. Les discussions sur les règles budgétaires qui vont recommencer en ce début d’année risquent en effet de considérer ces dépenses labellisées "durables" en tout ou en partie hors du budget des États membres. Pour les finances publiques européennes, davantage fragilisées par la crise sanitaire, ce serait une vraie bouffée… d’oxygène. D’autant qu’il faut investir beaucoup en peu de temps.
Mais les enjeux sont aussi et surtout environnementaux et géostratégiques. Dans les faits, la transition énergétique n’est assurée quasi nulle part en Europe. La diminution drastique des émissions à effet de serre de 55 % en 2030 et la neutralité carbone en 2050 ne peuvent actuellement pas être supportées par les seules énergies renouvelables ou autres innovations technologiques pour réduire la consommation.
Par ailleurs, l’envolée des prix de l’énergie a montré que l’Europe, face à ce choc majeur, n’avait pas réussi à réduire sa dépendance énergétique à l’égard de l’étranger, de la Russie en particulier.
Le pragmatisme de la Commission de favoriser ces investissements dans le gaz ou le nucléaire "2.0" ne manquera pas de heurter les sensibilités politiques très "polarisées" sur ce dossier, c’est une certitude, mais il a le mérite de remettre les yeux en face des trous. Les détracteurs de cette proposition pourront toujours dire qu’elle fait plaisir aux ténors européens que sont la France (pour le nucléaire) et l’Allemagne (pour le gaz), faisons le vœu que le pragmatisme de la Commission aide plutôt à dépassionner le débat, pour avancer concrètement et efficacement. Ce serait une avancée majeure, sous peine de ne jamais décider pour l’avenir de notre planète à plus long terme.