Une France quasi ingouvernable
Un édito de François Mathieu
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Publié le 01-02-2023 à 22h37
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S’il y a des réformes compliquées à mener, ce sont bien celles liées aux retraites. Mis à mal par les baisses de cotisations, soit en raison du recul régulier du nombre de cotisants en raison du vieillissement de la population soit par décisions politiques (pour favoriser l’emploi), le système de répartition vit des heures difficiles là où il est appliqué.
La France est l’un de ces pays où le financement à long terme des pensions légales pose question. La réforme voulue par Emmanuel Macron est légitime. Mais elle se heurte à un double mur : politique et social. Là où Nicolas Sarkozy était passé par le chas de l’aiguille pour imposer un allongement de l’âge légal de la retraite à 62 ans il y a plus de 10 ans, l’actuel locataire de l’Elysée dispose d’une marge de manœuvre plus étroite encore. Face à la mobilisation sociale – il est encore possible de discuter, en France ? - et aux chantages politiques d’une droite très revancharde, sa proposition de réforme des pensions risque de passer à la trappe. Le président français fait une nouvelle fois l’expérience de l’ingouvernabilité. La France peut-elle être réformée ? On ne l’imagine en tout cas pas demander à sa Première ministre de tordre une nouvelle fois le bras à l'Assemblée nationale (via la procédure "49.3") pour passer en force sur une réforme aussi symbolique.
Le président français peut s’en prendre pour une part à lui-même : invoquer l’urgence et la cohésion sociale, et se prendre entre 1 et 2 millions de personnes dans la rue à chaque manifestation, cela dit aussi beaucoup du manque de pédagogie et de conviction des explications gouvernementales. Ce déficit d’informations est évidemment regrettable pour une réforme aussi complexe que nécessaire. Quant à la gauche, elle aussi en perdition, n’aura pas profité de l’aubaine pour redéfinir son rapport au travail. Elle a préféré rester au balcon. C’est regrettable là aussi.
La probabilité est grande qu’on se dirige, en France comme en Belgique, vers une réformette qui pourra passer la rampe sociale, mais qui n’empêchera pas les discriminations et les inégalités de persister. Au bout du compte, les grands perdants de cet aveuglement collectif français seront toutefois les générations futures, c’est une certitude.