Ces conflits qui n’intéressent pas notre monde
Depuis trois semaines, le Soudan est plongé dans une guerre qui a poussé à l'exil des centaines de milliers de personnes dans l’indifférence quasi générale.
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Publié le 04-05-2023 à 23h57
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Les images ont été vues ad nauseam. Des hommes en uniforme ou en civil, armes en bandoulière. Le regard noir. La moustache fière. Derrière eux des quartiers entiers rasés. Des maisons brûlées. Des cars éventrés. Des marchés pillés. À l’autre bout de cette chaîne mortifère, toujours les mêmes images de femmes enveloppées dans de longs voiles de couleurs vives. Elles sont assises, le regard perdu. Leurs enfants entre leurs jambes, sous des abris de fortune. Parfois, elles sont en rang serré devant des camions pansus qui déversent leur aide alimentaire.

Ensuite, il y a les mots. Les mêmes. Répétés comme un mantra. “Drame humanitaire”. “Situation d’extrême urgence”. "Bilan provisoire”. Et puis, c’est la litanie des chiffres. Les exilés. Les déplacés. Les blessés. Les morts. La guerre qui a éclaté il y a trois semaines au Soudan n’échappe pas à ce scénario. Mais derrière ces images, ces mots, ces chiffes… Rien.
Les Occidentaux sont intervenus rapidement pour… exfiltrer leurs ressortissants ou les ayants droit. Les Soudanais n’ont qu’à se débrouiller entre eux. Comme ce fut le cas il n’y a pas si longtemps en Érythrée, comme c’est toujours le cas au Yémen. Au Mozambique. En Centrafrique.
Ces conflits sans image. Ces guerres qui ne rentrent pas dans notre grille de compréhension habituelle n’intéressent pas notre monde. Pourtant, les périls migratoires sont énormes. Cette guerre au Soudan porte en elle les ferments d’une crise migratoire majeure et déstabilisatrice pour de nombreux États fragilisés de la région. Le Soudan du Sud, le Tchad, la Centrafrique, l’Éthiopie, l’Erythrée, la Libye et même l’Égypte ont des frontières communes avec ce pays en guerre. La majorité de ces États ne pourront supporter seuls la charge de cette vague migratoire.
Abandonner le Soudan, c’est prendre le risque majeur de voir toute une région s’effondrer. De voir s’intensifier ces images de femmes et d’enfants sans avenir, de voir des jeunes séduits par des idéologies criminelles.
Il faut s’intéresser au Soudan.