Pipigate : surréaliste, oui. Et vraiment gênant
Un édito de François Mathieu
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- Publié le 07-09-2023 à 23h59
- Mis à jour le 08-09-2023 à 10h14
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Exemplarité, sens des responsabilités et de l’intérêt général, conduite constructive des départements gérés, de concert avec les acteurs de terrains concernés… Voilà en résumé ce qu’on attend d’un ministre, encore plus s’il est titulaire d’une compétence régalienne comme la justice.
Pour Vincent Van Quickenborne, le doute subsistera, vu que l’usage des caméras de surveillance – dont il promeut par ailleurs l’usage, ce qui est embêtant – n’avalise ni la thèse de sa non-responsabilité ni celle de syndicats policiers furieux du comportement supposé irrespectueux du ministre de la Justice et de ses invités. Il fallait s’y attendre : la énième mise sur le gril d’un ministre en Commission durant cette législature a juste servi à entretenir l’indignation d’une opposition ravie d’abîmer un peu plus l’image de la Vivaldi, après la saga de l’Irangate. L’essentiel est ailleurs. En Finlande, avec l’affaire de la soirée arrosée de la Première ministre Sanna Marin ou en Grande-Bretagne, avec le “partygate” de feu le Premier ministre Boris Johnson, une fuite de vidéos a montré l’impact politique énorme qu’elle pouvait déclencher. Le surréalisme de ce “pipigate” est d’autant plus gênant que les affaires qui font la Une de l’actualité judiciaire depuis des mois en Belgique – Qatargate, trafic de stupéfiants, insécurité croissante dans les grandes villes…- montre tout l’intérêt d’accorder les violons entre justice et police. Le dossier de la criminalité organisée, dont le ministre lui-même subit les conséquences suite à une tentative d’enlèvement avortée, est typiquement un des enjeux majeurs qui demande une plus grande coopération et concertation entre police et justice, au travers d’une police judiciaire que pas un seul expert n’oserait dire qu’elle n’est pas désargentée, démunie de moyens.
Plus largement, une allocation optimale des moyens nécessite que départements “justice” et “intérieur” travaillent davantage ensemble. Pour pathétique qu’il soit, ce “pipigate”, et le manque de respect à l’égard de la police, remettent à l’avant-plan l’énorme problème de coopération que l’on connaît en Belgique pour mieux lutter contre la criminalité sous toutes ses formes (financière, drogue, traite des êtres humains, fraude fiscale, blanchiment d’argent, etc.). Le manque de communication entre la police et la justice ne date pas d’hier ; il reste un des grands maux de ce pays. Le ministre Van Quickenborne n’a malheureusement rien fait pour arranger les choses. Les excuses (et louanges) à la police et l’acte de contrition louable dont le ministre a fait preuve en Commission de la Justice ce jeudi ne suffiront pas.