Un sommet du G20 hanté par les absents
Un édito de Philippe Paquet.
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- Publié le 10-09-2023 à 22h03
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En dehors de l’opportunité qu’ils offrent aux grands de ce monde de se congratuler devant les caméras ou, au contraire, de se dire leurs quatre vérités entre deux portes, les sommets annuels du G20 peinent à démontrer leur utilité. Ainsi, face à l’urgence climatique, les dix-neuf économies les plus développées de la planète et l’Union européenne, réunies ce week-end à New Delhi, ont échoué à réclamer le renoncement aux énergies fossiles (mais elles ont malgré tout acté le nécessaire triplement du renouvelable d’ici à 2030).
La déclaration finale réussit, par ailleurs, l'exploit de condamner le recours à la force pour conquérir des territoires sans jamais mentionner la Russie et l'Ukraine. Encore aura-t-il fallu, pour concevoir ce morceau de bravoure diplomatique, plus de 200 heures de négociations, 300 réunions bilatérales et 15 moutures successives du compromis. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergeï Lavrov, s'en est naturellement félicité, heureux qu'on n'ait pas "ukrainisé" le sommet, tandis qu'à Kiev, on estimait que le G20 "n'a pas de quoi être fier".
Le Kremlin trouve sa satisfaction là où il peut, en sachant qu’on retiendra avant tout de ce sommet l’absence de Vladimir Poutine et de Xi Jinping, les deux chefs d’État associés à l’agression contre l’Ukraine. Cette absence a laissé toute la place à Joe Biden, qui a pu ainsi pousser tranquillement ses pions auprès des puissances émergentes que Pékin et Moscou s’efforcent de courtiser ; et en premier lieu auprès du pays hôte, l’Inde, avec laquelle les États-Unis poursuivent un spectaculaire rapprochement.
Dans la foulée, le président américain a entamé dimanche une visite au Vietnam. Sans doute la démarche n'a-t-elle plus le caractère sensationnel du voyage historique de Bill Clinton, qui avait tourné la page de la guerre en novembre 2000, ou la dimension symbolique du séjour de Barack Obama, seize ans plus tard. Il n'empêche que l'objectif est, cette fois, de conclure un "partenariat stratégique étendu" entre Hanoï et Washington. Un bond en avant considérable entre deux ennemis qu'on croyait jadis irréductibles, et qui résonne encore plus quand on se rappelle que Chinois et Vietnamiens se flattaient, au temps de la lutte contre l'impérialisme, d'être "aussi proches que les lèvres et les dents".