Iran: la première des libertés gagnée
Un édito de Vincent Braun.
/s3.amazonaws.com/arc-authors/ipmgroup/907af01e-7b9c-4133-bc5e-d4804534654d.png)
- Publié le 17-09-2023 à 00h00
- Mis à jour le 17-09-2023 à 00h01
:focal(379x260:389x250)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/WHWGGER75NA7PHBBOFYYT36EAM.jpg)
Ils étaient peu nombreux, en comparaison avec les grandes manifestations du mouvement Femme, Vie, Liberté de l’an dernier, mais ils étaient au rendez-vous. Des centaines, peut-être des milliers de personnes au total sont descendues dans la rue, par petits groupes, aux quatre coins de l’Iran. Elles ont bravé les interdictions et mené des actions symboliques, ce samedi 16 septembre, afin de marquer le premier anniversaire de la mort suspecte en détention de l’étudiante Mahsa Amini, devenue le symbole de l’oppression des femmes. De petites actions, furtives ou durables, où l’on a vu exhiber bien haut un voile ôté, signe ostentatoire de la résistance, allumer des brasiers à l’aide de pneus, crier des slogans antirégime. Autant de façons pour les Iraniens de montrer qu’ils existent et qu’ils n’oublient pas. Preuve, s’il le fallait encore, que la peur d’être arrêté, emprisonné, battu ou abattu en pleine rue, a déserté une bonne partie de la population. À commencer par la jeunesse, fer de lance de la contestation.
Les autorités iraniennes savent très bien que leur légitimité expire auprès de ces jeunes gens. Elles ont perdu le contact avec cette génération de jeunes adultes, indignés par la violence d’un régime à l’idéologie archaïque, assoiffés d’une liberté qu’ils osent désormais revendiquer, abreuvés de références à des quotidiens non contraints auxquels ils aspirent. Sept Iraniens sur dix sont nés après la révolution islamique de 1979 et ils sont de plus en plus nombreux à vouloir se débarrasser des codes sociaux – comme la ségrégation sexuelle – ou de la diète économique que cette République religieuse qui en a émané leur propose pour tout horizon. La culture de la résistance ne fait pas rêver cette jeunesse. Encore moins sous la contrainte.
Ainsi, les petits-enfants de la révolution se retournent aujourd’hui d’emblée contre elle. Ceux-ci ont en effet un avantage indéniable sur leurs aînés: ils ont été éduqués par ceux qui ont commencé à dire non et à battre en brèche le respect des codes. Ne jouissant d’aucune réelle liberté, ils n’ont donc rien à perdre… Il n’y a aucune raison que ce mouvement s’arrête. Braver l’interdit est déjà une liberté gagnée.