Un édito de Vincent Braun.
La première chose qui sautait aux yeux, et surtout aux oreilles, en arpentant les rues de Tunis durant la "révolution du jasmin" - dont l’acte fondateur s’est écrit le 17 décembre 2010, il y a tout juste dix ans - c’était la libération débridée de la parole individuelle. En conversant avec les Tunisiens, l’on pouvait sentir leur envie irrépressible, parfois timide encore, parfois maladroite, d’exprimer publiquement ce qu’ils pensaient, de la manière dont ils le souhaitaient. Laisser entendre librement ce qu’ils avaient si longtemps contenu. Refuser de dire ce que l’on attendait d’eux, le contraire de leur pensée, ou ce qui leur était arraché en cas d’interrogatoire dans ce régime répressif qu’était la Tunisie.