La difficile recherche de logements sociaux pour les familles monoparentales à Bruxelles (OPINION)
Publié le 04-03-2018 à 14h59 - Mis à jour le 04-03-2018 à 15h00
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Une opinion de Gérard Warnotte, bénévole à l’asbl "Les Amis d’ACCOMPAGNER"
La recherche d’un nouveau logement pour nombre de familles monoparentales et pour des familles de réfugiés quand elles dépendent du CPAS, se révèle être un casse-tête insoluble à Bruxelles. D’autant plus lorsqu’elles doivent louer des appartements de deux à trois chambres.
Le constat est sans appel. Ainsi observe-t-on le combat solitaire et désespérés de femmes séparées ou divorcées ainsi que celles, seules ou en couple, qui ont obtenu le statut de réfugiés qui cherchent un logement adapté à leurs enfants d’âges différents. Elles se heurtent à des propriétaires privés toujours plus sélectifs exigeant des fiches de salaires qu’elles n’ont pas.
Quand bien même un logement leur est proposé, le montant du loyer est trop élevé au regard de leurs ressources ce qui les conduit à subir une précarité toujours plus importante, source d’un stress immense et d’un sentiment d’insécurité extrême.
Ce fait n’est pas nouveau. Bon nombre d’études le montrent en tirant la sonnette d’alarme sans pouvoir y proposer de solutions.
Des années d'attente qui profitent aux marchands de sommeil
Seules les sociétés de logements sociaux proposent des logements dont le calcul du loyer tient compte du revenu modeste de ces familles mais les délais d’attente pour des appartements de plusieurs chambres avoisinent les 10 à 15 années. Autant dire que la recherche d’un logement en urgence relève de la gageure ! Une brochure récente sous forme de bande dessinée : "Panique sur le logement social" en fait une démonstration éclatante : 43.000 ménages sont en attente d’un logement social à Bruxelles. La production de logements sociaux est de 111 par an.
Le secteur locatif privé serait en principe plus accessible si les prix pratiqués pour les loyers n’étaient si élevés qu’ils constituent l’équivalent de 70% à 80% de leurs revenus. La simple allusion au fait qu’elle dépend du CPAS lui ferme généralement les portes avec une fin de non-recevoir, même si la famille accepte de réduire ses dépenses de nourriture, de soins de santé pour payer le loyer, elle ne peut y avoir accès.
Seuls les "marchands de sommeil" avec des logements non conformes au code du logement car généralement insalubres, leur offrent encore cette possibilité de location, mais à un prix exorbitant au regard de l’état du logement.
Si des aides au logement ont vu le jour sous l’impulsion des Pouvoirs publics pour aider ces familles à réduire la facture du loyer, il faut constater que les procédures pour l’obtenir sont complexes avec une multiplication de justificatifs et de contrôles. Outre le fait d’allonger les délais, ces procédures exigent des compétences qui nécessitent un accompagnement social.
Des prix inaccessibles
Il faut se rendre à l’évidence, le droit au logement pour certaines familles est une illusion tant les logements sur le marché locatif privé et public leur sont inaccessibles.
On peut comprendre les difficultés à la lumière d’expériences vécues dans l’association "Les Amis d’accompagner", fréquemment consultée par ces familles qui demandent un accompagnement dans la recherche d’un logement.
Un exemple frappant est celui d’un couple de réfugiés avec quatre enfants qui s’est vu signifier la résiliation de son bail. Le propriétaire qui envisage d’y faire des travaux leur laissait peu de temps pour quitter le logement. Ils eurent recours au CPAS de la commune qui se montra totalement impuissant à les aider ne possédant pas de logements disponibles. Il leur conseille de prospecter le marché locatif dans toutes les communes de Bruxelles, ce qui est tout aussi aléatoire tant le marché est saturé et les loyers élevés. Sans solution, la famille risque de se retrouver à la rue avec pour seule issue un séjour temporaire dans une maison d’accueil.
Le problème majeur est que le nombre de ces familles en quête d’un logement abordable explose littéralement sans trouver de réponse à leur désarroi.
La Constitution dit "Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine. Ce droit comprend le droit au logement" - Article 23.
Tributaires des choix politiques
Pourquoi les services sociaux sont-ils dans l’incapacité d’aider ces familles alors qu’elles sont confrontées à des situations d’exclusion qui justifient une intervention pour leur permettre de vivre dans la dignité humaine ?
Lorsqu’on interroge les CPAS à ce sujet, la réponse est qu’ils sont dépassés car ils sont tributaires des choix politiques des communes dont ils dépendent. Les communes n’ont pas mis comme priorité la construction et la rénovation de logements pour répondre aux besoins croissants de familles avec des enfants à faible revenu.
L’impression est qu’à l’échelon communal, mais aussi régional, on tarde à dégager des crédits pour construire ou rénover des bâtiments et en faire des logements habitables pour familles avec de faibles ressources. Cela qui n’est pas porteur électoralement.
Il faut dire que les familles monoparentales et les familles de réfugiés pèsent peu en tant qu’ « électeurs ». Elles ne méritent donc pas autant d’investissements que dans les domaines de la culture ou du sport.
Il est urgent qu’aux élections communales, les partis politiques mettent dans leurs priorités la défense de celles et ceux qui luttent pour trouver un logement décent et dégagent des budgets pour la construction et la rénovation de nouveaux logements accessibles aux familles à revenus modestes.