Rapatrions les enfants belges de Syrie
Publié le 03-03-2020 à 15h36 - Mis à jour le 04-03-2020 à 11h48
Une opinion de plus de 150 citoyens qui plaident en faveur du rapatriement des enfants belges détenus dans le nord-est de la Syrie avec leurs mères. Ce texte est soutenu par Bernard De Vos, délégué général aux droits de l’enfant (*).
Le noir s'installe dans la salle. Et, dès les premières images, on est bouleversés. Des enfants en guenilles courent sous les bombardements, d'autres assistent impuissants à l'embrasement de leur maison sous le feu nourri des canons. Un autre encore, brûlé sur la totalité de son petit corps, hurle sur un lit d'hôpital, suppliant qu'on mette fin à son calvaire.
Nous étions deux cents, il y a trois semaines, dans une salle de cinéma bruxelloise pour visionner Europe's Children Of ISIS d’Anelise Borges. Le reportage, tourné à la fin de l’été dernier, raconte la triste histoire de ces enfants qui ont été emmenés au djihad avec leurs parents ou qui sont nés en Syrie, sous les bombes et dans les camps de détention où ils séjournent désormais. Nous avons été à la fois émus et scandalisés du sort intolérable réservé à ces enfants retenus dans les camps au Nord-Est de la Syrie. Le film donne à voir, sans fard ni artifice, les conditions de vie indignes, inhumaines, auxquelles sont abandonnés des milliers d'enfants innocents, loin des regards, livrés à la peur, à la faim et aux conditions climatiques extrêmes, à peine à l’abri de tentes de fortune, sous la seule protection de l’amour de leur mère. De toute évidence, les principes fondamentaux de respect des droits et de l'intérêt supérieur de ces enfants, auxquels l'ensemble des pays du monde ont souscrit, sont quotidiennement bafoués.
Parmi ces très jeunes enfants abandonnés, une soixantaine d'enfants belges passent désormais leur troisième hiver, dans des camps transformés en champs de boue à la suite des tempêtes et des inondations du dernier automne.
La majorité d'entre eux ont ouvert les yeux, dès leur naissance, sur des territoires dévastés par des combats et des bombardements, dont leurs parents ont été témoins et parfois auteurs. De nombreux pères sont décédés alors que les mères étaient transférées avec leurs enfants dans ces camps prisons.
Porter secours à ces enfants
Lors du débat qui a suivi le film, le fait que "l'opinion publique" soit majoritairement opposée au retour de ces enfants a été évoqué à plusieurs reprises pour tenter d’expliquer le manque de volonté politique et pragmatique vis-à-vis de ces enfants pourtant en danger de mort. A cause, notamment, des images de propagande d’enfants, parfois très jeunes, armés de kalachnikovs, diffusées par Daesh il semble légitime, pour beaucoup, de poser la question du danger que pourraient représenter ces enfants, une fois rapatriés. Ce que montre le documentaire d’Anelise Borges, c’est tout l’inverse : des petits garçons et des petites filles qui demandent d’aller à l’école, qui peuvent encore compter sur leur désir de vivre, leur créativité et leur résilience pour trouver de quoi jouer dans ces camps dévastés.
Après avoir été informés et sensibilisés à ces réalités, nous pensons que nous ne pouvons pas nous taire et que nous avons la responsabilité, en tant que citoyens, de dénoncer les mauvais traitements infligés à ces enfants. Nous ne voulons plus céder à la peur et aux fantasmes qui prennent le pas sur le bon sens et la raison dès qu’il est question, de près ou de loin, de terrorisme.
Certes, nous ne sommes pas "l'opinion publique", mais nous en sommes une partie. Et nous souhaitons que notre voix soit entendue pour que cesse cette inertie politique dont sont victimes des enfants belges, depuis trop longtemps à la merci de tous les dangers. Nous ne voulons pas nous rendre plus longtemps complices d’un tel déni d’humanité.
C’est pourquoi nous demandons d’urgence que le gouvernement belge leur porte secours en les rapatriant, tous, dans les plus brefs délais et les meilleures conditions. Et au regard du respect de leurs droits et de leur intérêt supérieur, nous demandons que ces enfants soient rapatriés avec leur mère, afin ne pas encore leur ajouter un traumatisme.
(*) : Liste des signataires :
Il est toujours possible de signer cet appel : ici