"La Belgique n’est pas encore prête pour sortir du confinement, c’est tout" (OPINION)

Contribution externe
"La Belgique n’est pas encore prête pour sortir du confinement, c’est tout" (OPINION)
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La situation sanitaire nécessite un délai de l’implémentation de la phase 1a du plan de déconfinement.

Une opinion de Marc Wathelet, docteur en science.


Chère Madame Wilmès, chers membres du gouvernement et du parlement belge,

Le document du gouvernement qui décrit les mesures prises par le Conseil national de Sécurité du 24 avril 2020 spécifie que "l’ensemble des dates qui suivent sont susceptibles de changer en fonction de la situation sanitaire et de l’évolution du virus."

L’importance de cette condition sur l’implémentation des différentes phases a été soulignée publiquement par Madame Wilmès et autres représentants du gouvernement à plusieurs reprises.

Les critères de décision pour le passage d’une phase à l’autre ne sont pas connus publiquement, mais les principes de santé publique qui devraient guider ces décisions sont bien établis.

Marc Van Ranst nous donne une indication sur ces critères par Twitter le 26 avril:
"Als criterium voor de start van de exit gaat het NIET over het aantal doden (zoals verkeerdelijk in de krant stond) maar over het aantal nieuwe ziekenhuisopnames. Dit aantal daalt al een week niet meer en blijft hangen boven de 200 per dag".

Marc Van Ranst a également indiqué dans la presse le même jour qu’il était nécessaire que ce chiffre descende en-dessous de 100 pour pouvoir commencer la sortie du confinement..

Je ne sais pas comment Marc Van Ranst arrive à ce chiffre rond, mais je note que Yves Van Laethem nous informe le 29 avril que "le taux de reproduction du nouveau coronavirus en Belgique mesuré entre le 20 et le 26 avril était de 0,79." indiquant que la transmission continue malgré le confinement, même si elle est ralentie.

Ce chiffre de 0,79 est si près de 1 qu'il ne faut pas grand chose pour repasser au-dessus de 1. Le taux de reproduction dépend de la fréquence et de la diversité des contacts entre individus, et si les mesures du 4 mai n’y suffisent pas, celles du 11 mai parviendront à nous faire dépasser 1. Dès qu'on est au-dessus de 1, on est reparti dans la croissance exponentielle du nombre de cas.

D’un point de vue santé publique, le Dr. Drosten suggère que même avec un taux de reproduction inférieur à 0,2, le risque de résurgence est grand. Pourquoi un taux de reproduction de 0,79 est-il trop grand ? Parce que les équipes de dépistage et traçage ne pourront pas suivre. Dans le rapport des experts du GEES: "sans un tracing extrêmement efficace […], la stratégie de déconfinement présente un risque important de résurgence."

Le gouvernement aurait constitué une équipe de 2.000 enquêteurs pour assurer le traçage selon cette source, mais est-ce suffisant ? Les pays qui contrôlent bien la transmission du coronavirus y parviennent en testant chaque jours environ 33 fois plus de personnes que de cas positifs. Sur les 7 derniers jours nous avons en moyenne 599 cas positifs (PCR) par jour, donc il faudrait pouvoir tester au strict minimum 19,767 individus par jour. Cependant ce chiffre est sous-estimé puisque en pratique trop peu de personnes sont testées aujourd’hui.

En prenant les chiffres de nouvelles hospitalisations pour les 7 derniers jours, 155 par jour en moyenne, et en multipliant par 5.26 (19% des patients symptomatiques nécessitant une hospitalisation) on obtient 816 cas positifs par jour, mais il semble que la Belgique n’a hospitalisé qu’une fraction de ceux qui auraient dû être hospitalisés et donc un nombre plus réaliste pourrait aller jusqu’au double. Multiplié par 33, il faut donc pouvoir réaliser entre 26.928 et 53.856 tests PCR par jour, et ce en plus des tests nécessaires pour suivre l’évolution des patients.

Cette capacité de tests peut probablement être atteinte sans trop de difficultés pour la limite inférieure mais nous sommes loin de pouvoir couvrir toute la fourchette. Un facteur encore plus limitant est le prélèvement des échantillons nécessaires, nous sommes loin de cette capacité semble-t-il (<15.000/jour).

Pour le traçage, la contagiosité du virus impose que le dépistage et l’identification des contacts se fassent en un jour, et il faut compter 5 enquêteurs par cas positif, à savoir entre 4.080 et 8.160 enquêteurs. Avec seulement 2.000 enquêteurs en cours de formation, la Belgique n’est simplement pas prête pour la phase 1-a débutant le 4 mai.

En ne suivant pas les recommandations du GEES de compter deux semaines entre chaque phase pour pouvoir évaluer l’impact de chaque changement sur la dynamique de contagion (puisqu’il y a un délai de 10-15 jours entre infection et hospitalisation), vous garantissez que lors du prochain CNS du 8 mai, l’augmentation du nombre de cas hospitalisés sera assez faible pour passer à la phase 1-b le 11 mai.

Cette décision ouvrirait les portes à une recrudescence de cas que nous ne pourrons pas contrôler avec nos capacités de dépistage et de traçage actuelles (sauf si le changement de saison avait un effet dramatique sur la dynamique de transmission du virus, ce sur quoi nous ne pouvons pas compter). Nos premières lignes sont épuisées et traumatisées, elles ne méritent pas ça.

Il ne viendrait jamais à l’esprit d’un médecin de dire à un patient qui veut retourner travailler une semaine après avoir enduré une fracture complète du tibia : "pas de soucis, je vous enlève le plâtre, retournez travailler et on verra si elle tient cette jambe".

La Belgique n’est pas encore prête pour sortir du confinement, c’est tout. Ce serait galvauder les efforts de toute la population que d’en sortir trop tôt, il faudrait alors confiner à nouveau et à plus grand coût économique. Il faut attendre que le taux de reproduction du virus soit inférieur à 0,2 et avoir le système de collection d’échantillons, le système de dépistage et de traçage tous en place, chacun à la capacité requise, et avec protection adéquate du personnel, nous n’y sommes toujours pas !

Et il faut que le gouvernement puisse offrir des masques chirurgicaux à toute personne active économiquement, des pays bien plus pauvres en sont capables. Pourquoi pas nous ? Aucune des mesures indispensables ne sont suffisamment en place : la sortie du confinement est donc prématurée.

Madame Wilmès, vous vous êtes offusquée lorsque le mot mensonge a été utilisé par Jérôme Colin pour caractériser certains des messages du gouvernement, et vous avez répondu "Des mensonges, il n’y en aura pas. Il ne peut pas y en avoir." Je suis bien d’accord, il ne peut pas y en avoir.

Le mot mensonge implique la notion d’intention et c’est une polémique qui ne m’intéresse pas. Ce que nous ne pouvons pas tolérer, en fait, ce sont les contre-vérités : qu’elles soient énoncées sciemment, le fameux mensonge, ou par ignorance ou incompétence importe peu finalement. Ce qui compte c’est que le gouvernement puisse se baser sur des vérités à propos de la réalité qui nous confronte.

Quelques soient leurs intentions, des contre-vérités sont malheureusement répétées par des médecins qui représentent la position du gouvernement et qui se permettent une position anti-scientifique. Les critères de décision restent obscurs, les avis divergents sont ignorés sans débats, et ces contre-vérités sont reprises par les médias, et amplifiées. Il est impossible de combattre efficacement un ennemi, ce nouveau coronavirus, si notre intelligence à son propos est à ce point fautive. Ce sont des contre-vérités qui tuent, pour appeler un chat un chat.

Les scientifiques et les médecins qui n’appartiennent pas au cercle des experts reconnus par le gouvernement et les médias ont des difficultés énormes à se faire entendre. Ils se retrouvent dans la position absurde d’essayer de convaincre un médecin qu’un virus respiratoire se transmet par la voie respiratoire…, que l’absence de preuve n’est pas preuve d’absence …, et que de fait il n’y a pas absence de preuve, il y a toutes les évidences nécessaires dans la littérature scientifique qui permettent de démontrer que la voie respiratoire, la transmission par microgouttelettes suspendues dans l’air en aérosol, est le mode dominant de transmission de COVID-19. (Voir liens ajoutés à la fin de cette chronique).

Si malgré ces évidences incontournables, ces médecins avaient encore des doutes sur la transmission aérosol de COVID-19, déontologiquement le principe de précaution leur enjoint d’agir comme si cette maladie se transmettait par aérosol. Ce qu’ils ne font pas, c’est donc une faute professionnelle qui ne peut avoir que des conséquences désastreuses.

Il est donc simplement inacceptable qu’en réponse à la question d’un journaliste sur le rôle potentiel de la climatisation sur la propagation du virus,Yves Van Laethem se permette de dire : "La propagation du coronavirus se fait essentiellement par des grosses gouttelettes que nous émettons à proximité de nous, à maximum 1m ou 1m20 à peu près, en tout cas dans les circonstances climatiques que nous connaissons dans nos régions. Mais aussi par le transfert lié aux mains qui auraient touché ces gouttelettes. L'importance des microgouttelettes qui restent en suspension dans l'air est peu important pour la maladie elle-même en dehors du milieu des soins intensifs, comme dans les centres commerciaux et les magasins qui utilisent de l'air conditionné. Dans le contexte extra-hospitalier, il n'y a donc pas de crainte à avoir par rapport aux systèmes d'air conditionné."

Quand une telle contre-vérité est maintenue comme la position officielle du gouvernement, la conséquence est qu’aucun effort public ne sera consacré à l’indispensable inspection des systèmes de chauffage, ventilation et climatisation à travers notre pays pour s’assurer qu’ils ne soient pas opérés dans des conditions qui favorisent la transmission du virus ou qu’ils soient modifiés pour permettre un fonctionnement sans danger. La littérature à ce sujet est très claire. ( https://tinyurl.com/ybf36tp4 , https://tinyurl.com/y8vsutld , https://tinyurl.com/y84ofn7f , https://tinyurl.com/ybzzle77, https://tinyurl.com/y7ebz85y).

Si cette grossière erreur n’est pas corrigée, la deuxième vague sera suivie d’une troisième vague encore plus importante à partir d’octobre, quand les chauffages aérauliques seront remis en route et la ventilation naturelle minimisée. Les systèmes de chauffage, ventilation et climatisation concerne non seulement les bâtiments mais aussi tous les moyens de transport publics. C’est une source de contamination massive.

De même, Herman Goossens nous dit à propos de la transmission du virus par les enfants: “Kinderen zijn absoluut geen risico voor volwassenen en zelfs waarschijnlijk niet voor oudere mensen. Absoluut niet. Er is nog geen enkele studie die heeft aangetoond dat een kind een volwassene of oudere persoon heeft besmet, nog geen enkele tot nu toe.”

Cette affirmation par Herman Goossens est anti-scientifique : dire qu’il n’y a absolument aucun risque de transmission d’un enfant à un adulte n’est basé sur aucune évidence solide, mais plutôt sur l’absence d’étude qui prouverait cette transmission. On note que ce serait difficile d’avoir une évidence épidémiologique de cette transmission puisque les écoles sont fermées depuis la mi-mars. Encore une fois, absence de preuve n’est pas preuve d’absence. Les données scientifiques solides dont nous disposons sont que la quantité de virus présent dans un frottis ne dépend pas de l’âge de l’individu : il n’y a pas de différence significative dans la distribution de charges virales quand on compare des tranches d’âge d’enfants et d’adultes, et c’est validé par trois méthodes d’analyse statistique.

En d’autres mots, la concentration de virus infectieux dans l’air expiré par un enfant contagieux est, en moyenne, la même que celle dans l’air expiré d’un adulte contagieux. L’adulte certes expire une plus grande quantité d’air, et donc de virus, qu’un enfant, mais l’air expiré par un individu infecté est contagieux quelque soit son âge. Il n’y a donc pas de base scientifique pour exclure la transmission par des enfants.

Il pourrait s’avérer que COVID-19 est peu transmis par les enfants dans les écoles, nous ne le savons pas puisque nous n’en avons pas l’expérience. Certainement nous voulons mettre tout en place pour limiter cette transmission et le bon usage de masques pourrait nous permettre d’atteindre ce but. En absence de masques, il serait surprenant qu’il y ait peu de transmission dans les écoles sachant que pour les autres virus respiratoires qui se transmettent de manière asymptomatique et donc par aérosol, comme le fait COVID-19, la transmission à travers les écoles est substantielle et bien documentée. La position de Herman Goossens aujourd’hui reste une hypothèse, et prendre cette hypothèse comme justification pour la réouverture des écoles est encore une fois ignorer le principe de précaution, pourtant si cher au corps médical. Pourquoi ?

La possibilité que COVID-19 puisse être lié à une forme sévère d’une maladie vasculaire chez les enfants, qui nécessite des soins intensifs, qui peut toucher le cœur et qui présente des caractéristiques de la maladie de Kawasaki, a été signalée par des pédiatres dans plusieurs pays : au St Mary's Hospital et par la Pediatric Intensive Care Society au Royaume-Uni, au Centre de référence des malformations cardiaques Necker à Paris en France, en Italie, en Espagne, en Belgique, et à l'Hôpital national pour enfants de Washington aux USA. Ces pédiatres sont tous préoccupés par l’augmentation importante et significative du nombre d'enfants de tout âge présentant un état inflammatoire multisystémique nécessitant des soins intensifs. Ne serait-il pas prudent de considérer sérieusement ces alertes plutôt que de directement les minimiser, comme l’on fait Yves Van Laethem et Dimitri Van der Linden ?

Rouvrir les écoles quand les conditions ne permettent pas d’assurer la sécurité, ni des enfants, ni du personnel des écoles, ni à terme celle des parents et du reste de la population, alors qu’un nouveau virus circule pour lequel nous n’avons ni traitement, ni vaccin, et alors que ce virus peut causer une maladie sévère ou même la mort, c’est en fait conduire une expérience sur des êtres humains, comme le reconnaît Nathan Clumeck. Une expérience sur des êtres humains nécessite moralement et légalement le consentement éclairé des participants.

Ce consentement n’est pas correctement informé à cause des contre-vérités émises sur la situation par le gouvernement ou ses représentants. Les parents peuvent choisir ou pas d’envoyer leurs enfants à l’école. Le personnel des écoles peut choisir de continuer ou pas à travailler, un choix pas vraiment libre quand un salaire est à la clé. Mais ce choix n’est pas offert à la partie de la population qui n’a pas voix au chapitre, tous ceux qui peuvent être infectés suite à la contamination dans les écoles. Soumettre une partie de la population à une telle expérience sans son consentement informé est en contravention avec nos principes moraux, nos lois et le code de Nuremberg.

Porte-parole de la "Belgian Pediatric Covid-19 Task Force," Dimitri Van der Linden nous dit "Porter un masque n’est ni nécessaire ni réaliste à cet âge [5-12 ans], les enfants doivent vivre normalement. Nous ne devons pas leur imposer cette charge mentale et créer une génération d’anxieux."

On se demande comment un groupe de pédiatres peut d’abord penser que ce n’est pas réaliste pour des enfants en école primaire de porter un masque. Regardons en Chine, les enfants en sont capables, et de fait les enfants aiment imiter les comportements adultes : si nous le faisons, ils nous suivront. Ensuite, il n’y a aucune raison que cela génère de l’anxiété chez les enfants, les enseignants se feront un plaisir d’expliquer que la science nous permet de savoir que le virus est dans l’air même si nous ne pouvons pas le voir, et que nous mettons tous un masque pour nous protéger les uns les autres.

Peut-être que les plus jeunes mettrons quelques jours avant d’être à l’aise, comme pour tout apprentissage. Ils apprennent à regarder des deux côtés avant de traverser une rue, à mettre leur ceinture de sécurité en voiture, à se brosser les dents, tous des gestes qui ne peuvent que réduire l’anxiété quand on comprend comment ils nous protègent. On se demande comment un groupe de pédiatres peut penser que la charge mentale de porter un masque, si elle existait, puisse être supérieure au traumatisme pour un enfant d’être le responsable, bien involontairement, d’une maladie grave dans sa famille ?

Madame Wilmès, depuis le tout début de cette crise, le gouvernement et ses experts ont minimisé la réalité du danger posé par ce nouveau coronavirus. Hélas, cette erreur persiste, le gouvernement et ses experts minimisent encore et toujours la réalité du danger posé par ce nouveau coronavirus. C’est toxique. Le résultat est que la population est confuse et que le gouvernement prend des décisions qui ne sont pas basées sur la réalité du virus.

Vous défendez l’intelligence collective pour aborder cette crise et s’il ne peut y avoir de mensonge, il ne peut pas y avoir non plus de contre-vérité. Le motto de mon alma mater est Scientia vincere tenebras, mais la science est bien impuissante quand le pouvoir politique décide de n’écouter que les voix qui lui conviennent. Il semblerait qu’en Europe l’âge des lumières a fait place à un nouvel obscurantisme, et il vous incombe en tant que chef de gouvernement de tout faire pour répudier ces contre-vérités et diriger le pays sur base de la raison.

Je vous avais déjà communiqué mon plan rationnel pour sortir la Belgique du confinement, et pour les membres du gouvernement et du parlement qui n’en aurait pas connaissance, il est notamment publié dans le Journal du Spécialiste.

Quand vous prenez vos décisions au prochain Conseil national de Sécurité, on peut certes dire que les considérations économiques respectent les considérations sanitaires, mais la politique veut qu’un compromis soit atteint. Un virus n’a cure de compromis, il se transmet comme nous respirons lorsque nous interagissons. La réalité d’aujourd’hui est simplement que nous ne sommes pas encore prêt à sortir du confinement. Je ne peux pas maintenir ma confiance dans un gouvernement qui continuerait à rejeter le principe de réalité, un sentiment qui ne peut qu’être de plus en plus partagé dans notre pays.

Je reste à votre disposition.

Bien à vous,

Marc Wathelet.
Liens à consulter par rapport à la transmission par aérosol:

tinyurl.com/y7lm33cp, tinyurl.com/y8865rhp, tinyurl.com/y7gctbms, tinyurl.com/y8865rhp, tinyurl.com/y8czgf4k, tinyurl.com/uyfchvk, tinyurl.com/yc8yyas4, tinyurl.com/y9zlardu, tinyurl.com/y8m598a2, tinyurl.com/y7prwatutinyurl.com/y8mlkr9z, tinyurl.com/yax345ax, tinyurl.com/tsqbx8o, tinyurl.com/y9hwt8je, tinyurl.com/y77lw6ov, tinyurl.com/y7ebz85y, tinyurl.com/v97x8x7, tinyurl.com/ycsmj7zmtinyurl.com/ycxgsczatinyurl.com/uypzd8v, tinyurl.com/y8e5dctf, tinyurl.com/vsjswf5, tinyurl.com/qnu3cjd, tinyurl.com/y7m4tuaq.

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