Après la crise, menons une révolution verte à Bruxelles

Contribution externe
Après la crise, menons une révolution verte à Bruxelles
©Unsplash

Une opinion de Filip Salmon, Flamand, habite et travaille à Bruxelles dans la communication et le marketing.

Une campagne marketing pour revitaliser notre capitale après la crise liée au Covid? Seulement si nous sommes capable de continuer la révolution verte qui commence et qui est nécessaire pour sauver Bruxelles.

On sent l’odeur de la révolution à Bruxelles aujourd’hui. Pas comme en 1830 – il n’y a pas une indépendance en jeu. Mais on réalise que les choses doivent changer, qu’une rupture est nécessaire avec le passé. Aujourd’hui, pas besoin d’un opéra, comme dans le temps, mais d’une crise corona. Cette crise est devenue le catalyste d’un grand mouvement : un mouvement pour une ville dans laquelle on aime vivre – et pas une ville dans laquelle on doit survivre…

Il y a un an et demi que, par amour pour une Bruxelloise, j’ai décidé de déménager à Bruxelles après vingt ans à Leuven. Ce fut un grand choc au début. Le soir je trouvais difficilement une place pour ma voiture d’entreprise (hé oui…). La ville était sale et bruyante et je me souviens encore qu’à chaque fois que je sortais d’un magasin à Saint-Gilles je pensais ‘ok, encore un lieu où on ne parle absolument pas le néerlandais’. Bruxelles me prouvait immédiatement sa réputation de ville hostile. Mais en même temps, elle me montrait son potentiel. Sa diversité. Sa richesse culturelle et gastronomique. Sa culture des apéros qui durent toute la soirée. Son caractère. Et moi, je changeais, au rythme de la ville. J’échangeais mon Audi adorée contre un abonnement Cambio (oui, ça m’a fait mal, mais j’ai réalisé que c’était juste plus pratique à Bruxelles). J’acceptais que le français était une sorte de ‘lingua franca’ qui liait tous les nationalités qui vivent ici. Et surtout : je prenais mon vélo pour aller au travail chaque jour (un vieux GranVille, vingt ans au compteur et un cadre bien dégeu, très efficace contre le vol.)

Le vélo à Bruxelles

Prendre le vélo fut une révélation pour moi – et en même temps un constat assez dur. Une révélation parce que Bruxelles est vraiment une ville faite pour le vélo ! On traverse notre capitale du nord au sud ou d’est en ouest en une demi-heure maximum. Eh oui, ça monte parfois beaucoup – et après ça descend, mais avec un petit peu de soutien électrique, si on veut, ça marche très bien. Bref : le vélo est le moyen de transport le plus rapide et facile dans la ville – point final.

En même temps, mes tours en vélo furent un bon reality check. Beaucoup d’automobilistes ne tiennent absolument pas compte des cyclistes ou les considèrent comme un effet secondaire assez pénible. Il faut toujours faire très attention. Très souvent il y a des voitures garées sur les pistes cyclables (“juste cinq minutes monsieur!”), et la bonne infrastructure n’est pas encore là… Parfois je repense aux années 1990 quand je suis arrivé à Leuven pour faire mes études. Le vélo était déjà bien installé dans la ville, qui restait quand même le royaume de la voiture. Trente ans après, tout a changé.

Nous en sommes peut-être à ce stade, à Bruxelles : vingt ou trente ans de retard par rapport à Leuven et à Gent en ce qui concerne la mobilité, mais en même temps tellement de potentiel et d’espoir ! L’espoir que je vois littéralement dans les rues de notre capitale avec tous ces nouveaux vélos neufs et brillants qui se multiplient depuis quelques semaines. L’espoir que je sens sur les pistes cyclables qui viennent d’être inaugurées. L’espoir que je respire quand il n’y a plus de voitures tout d’un coup, plus de gaz d’échappement mais juste l’air... Au début du confinement, on sentait même l’odeur des champs situés autour de Bruxelles. C’était complètement dingue pour le Bruxellois !

Même un enfant peut comprendre que Bruxelles n’est plus une ville pour des milliers de voitures chaque jour

Voilà donc où on est arrivé. Le moment où les Bruxellois rêvent de "plus de vert, moins de voitures et moins de déchets dans les rues". Le moment où ils voient leur futur comme "un paradis vélo vert". Ce sont les conclusions d’un grand dossier que Bruzz, l’hebdomadaire Bruxellois, présentait ces deux dernières semaines. Et ça sera vraiment possible si… on travaille ensemble. Mais cette ‘union qui fait la force’ est un point difficile à Bruxelles – et à fortiori dans toute la Belgique. Même si la plupart des Bruxellois a clairement fait entendre sa voix pour plus de durabilité et plus de vert dans la ville aux dernières élections communales, les interventions tellement évidentes et normales dans d’autres villes flamands (plus de pistes cyclables, un centre à circulation limitée, priorité pour les usagers faibles, investissements dans les parcs…), même sans crise Covid, sont à Bruxelles immédiatement regardés comme dogmatiques ou "le début du fin" de la coopération avec les autres régions.

C’est tellement triste. Car même un enfant peut comprendre que Bruxelles n’est plus une ville pour des milliers de voitures chaque jour. Ca n’a aucun avantage, ni pour les habitants ni pour les navetteurs qui stressent pendant des heures dans les bouchons (moi aussi j’ai connu ça). La mobilité dans la ville a besoin d’un changement en 2020. ‘Ma voiture, ma liberté’, comme on disait dans les années 1980, a fait son temps. Les villes comme Leuven, Antwerpen et Gent ont bien compris ça. Et Copenhague, Amsterdam et Bordeaux également. Bruxelles aussi doit changer, en dialoguant avec les régions voisines. Et la question ne doit pas être si des voies réservées aux voiture doivent disparaitre, mais comment on va compenser ces disparitions pour les habitants et les navetteurs.

Imaginez qu’on puisse faire ça ensemble, avec les 19 communes bruxelloises, avec la Flandre et la Wallonie. Ce serait beaucoup plus efficace pour la qualité de vie à Bruxelles et pour son image nationale et internationale que n’importe campagne marketing, qui est surement en train d’être préparée pour être lancée après la crise. Et vous pouvez me croire, je suis un professionnel du marketing.

Titre de la rédaction. Titre original : "Après la crise, une révolution à Bruxelles svp"

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