L’inclusion à l'école, un enjeu de société fondamental

L’intégration permet à un enfant de recevoir un accompagnement individualisé. Retour sur expérience.

Contribution externe
L’inclusion à l'école, un enjeu de société fondamental
©Alexis Haulot

Une chronique enseignement de Christophe Dechêne, instituteur, directeur d'école primaire.

Ce papa ponctua son discours en s’écriant : "Jamais !" Pourtant, après avoir épuisé tout l’arsenal pédagogique, les acteurs de l’école étaient unanimes pour conseiller une orientation vers le spécialisé. C’est sans grande conviction que l’on tira une ultime salve. "Il reste une solution ! Ni spécialisé ni redoublement. Et pourquoi pas l’intégration ?" Celle-ci allait permettre à cet enfant à besoins spécifiques de recevoir un accompagnement individualisé.

L’intégration

C’est ainsi que l’intégration fit sa joyeuse entrée dans notre école. Les inconnues suscitaient alors certaines inquiétudes, dont celle de la gestion des classes avec des enfants accusant parfois jusqu’à deux ans de retard ! Pour eux, enfants porteurs d’un handicap, de troubles de l’apprentissage ou de l’attention, il fallait croire en ce projet, le porter en équipe et surtout le pérenniser.

Cependant, tout change sans cesse. En effet, depuis 2009, ce décret Intégration a connu 18 amendements. Pourtant, s’est développée au fil des ans, entre tous les acteurs, parents compris, une réelle énergie collaborative, dynamisée par des concertations permanentes. Elle a permis d’affiner les fonctionnements et pratiques pédagogiques au service des enfants à besoins spécifiques. Outre l’adaptation des documents, sont arrivés les tablettes et leur gestion, les casques anti-bruit, caches de lecture, fiches outils… Que d’aménagements dits raisonnables au service de ces enfants courageux et volontaires. Souvent pris en charge individuellement par l’instit, la logopède ou la kiné d’intégration, c’est accompagné par deux ou trois pairs, eux aussi porteurs de troubles, que l’enfant en intégration se sent moins différent.

Expertise

Il y a trente ans, on rencontrait des écoles spécialisées qui organisaient jusqu’à huit classes de "type 8", enfants dys ou porteurs du trouble de l’attention. Aujourd’hui, on est loin de cette réalité car ces élèves se retrouvent en grande majorité en intégration dans l’enseignement ordinaire.

Dans notre école par exemple, ce mécanisme a permis à 5 % de nos élèves de ne pas quitter leurs amis et leur école. Ils ont surtout pu poursuivre leur scolarité dans l’enseignement ordinaire avec une confiance retrouvée et, parfois même, une réussite au CEB. Malheureusement, 10 % de nos demandes d’intégration ont essuyé un refus de parents qui ne désiraient pas inscrire administrativement leur enfant dans une école spécialisée. La nouvelle réforme abrogera cette inscription inutile.

Le gain principal de l’intégration touche aux pratiques professionnelles. La cohabitation constante d’enseignants du spécialisé et des titulaires, mais aussi de logopèdes, coopérant ensemble au service d’enfants à besoins spécifiques dans une même classe a provoqué un réel enrichissement mutuel. Cependant, malgré les indispensables deux à trois heures d’aide par semaine pour accompagner un enfant en intégration, le défi permanent de nos instituteurs est aussi de pouvoir continuer à nourrir les plus demandeurs, comme de différencier leur enseignement dans des classes parfois composées d’un tiers d’enfants porteurs de troubles. Travail admirable qui requiert énergie, aide et surtout une fameuse expertise. Ceci pose avec acuité la question de la formation initiale et de la taille des classes.

La promesse

On perçoit aisément les deux missions essentielles au cœur de la réforme. D’une part, l’accompagnement individuel des élèves à besoins spécifiques avec malheureusement, pour certains, une réserve émise quant à un suivi permanent, sur base des besoins définis dans leurs protocoles. D’autre part, celui des instits de l’ordinaire pour qu’ils valorisent leurs pratiques au regard des aménagements raisonnables pour tous.

S’il reste bien des questions comme celle de la répartition des heures permettant à chacun de ces enfants de bénéficier d’un suivi, il y a aussi ces convictions. Oui à une collaboration encore plus active avec le PMS. Oui au fait d’assurer le suivi de ces élèves grâce à une transition du primaire au secondaire au sein d’une même école spécialisée. Et puisque ces aménagements raisonnables seront désormais proposés à tous les élèves à besoins spécifiques, oui à la pérennisation de cette riche cohabitation entre enseignants dans les classes, sans surcharge administrative excessive.

Et, évidemment, "OUI" à une école plus inclusive.

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