Les jeunes désirent changer d'alimentation. Saisissons cette opportunité
Nous, membres du Forum des Jeunes, proposons trois voies d’action pour accélérer la transition de nos systèmes alimentaires : informer le grand public, réduire la précarité alimentaire et augmenter l’offre durable et accessible grâce à la mise en place de stratégies de transition alimentaire.
Publié le 17-04-2021 à 19h14
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Une carte blanche de Jérôme Ransquin, Nadège Carlier, Norman Vander Putten, membres du Forum des Jeunes.
Nous y sommes ! Pour les jeunes, les perspectives s’ouvrent “malgré le virus”, la vie semble reprendre peu à peu ses couleurs. Les plaisirs imminents de terrasses ensoleillées ne doivent en revanche pas nous faire oublier les innombrables utopies, questionnements et cartes blanches qui ont émergé durant cette épreuve sanitaire. Un domaine, en particulier, a attiré notre attention : l’alimentation. Selon un sondage Ipsos d’octobre, plus de 80% des Belges souhaitaient alors “privilégier les circuits courts pour l’alimentation” après la crise du Covid.
Nous avions le sentiment que les jeunes belges étaient, en général, préoccupés par la nécessité de s’alimenter d’une manière durable, mais qu’elles et ils rencontraient des obstacles à lever au plus vite. Le Forum des Jeunes a donc mené une vaste consultation auprès des jeunes belges francophones sur leur vision de l’alimentation durable. Il ressort de notre enquête, à laquelle 1150 jeunes (16-30 ans) ont répondu, que la jeune génération est véritablement porteuse de changement, y compris sur les questions d’alimentation.
Les éléments qui nous rappellent l’urgence de réaliser une transition alimentaire ne manquent pas : contribution du système alimentaire aux émissions globales de gaz à effet de serre à hauteur de 15 à 28 % dans les pays développés, nombre croissant de cas d’obésité liés au régime alimentaire occidental ou précarité alimentaire touchant plus de 168 000 personnes en Belgique.
Confrontés à la nécessité d’opérer une transition sociale-écologique pour faire face aux grandes urgences de notre temps, les jeunes incarnent une forme de rupture générationnelle. Ce qui nous frappe, c’est l’importante sensibilisation et la volonté de changement quant à ces enjeux : 70% des répondants estiment faire attention à la durabilité de leurs habitudes alimentaires. Chez celles et ceux qui ont quitté le domicile familial, une même proportion se nourrit de façon plus durable que ce dont elles et ils avaient l’habitude auparavant. Elles et ils sont également près de quatre sur cinq à exprimer une ferme intention de diminuer l'empreinte environnementale et sociale de leur mode d'alimentation. L’on constate toutefois l’existence d’obstacles empêchant une transition plus rapide vers une assiette plus durable. La demande de changement est là, le monde d’après doit donc commencer maintenant !
Sur la base de notre enquête, nous proposons trois voies d’action pour accélérer la transition de nos systèmes alimentaires : informer le grand public, réduire la précarité alimentaire et augmenter l’offre durable et accessible grâce à la mise en place de stratégies de transition alimentaire.
L’urgence d’informer, encore et toujours !
Une grande méconnaissance des enjeux de durabilité alimentaire subsiste chez les jeunes, d’une part quant à l’impact environnemental réel de l’alimentation et, d’autre part, quant à la façon d’opérer une transition effective. Un exemple parmi d’autres : alors que les avantages d’une alimentation locale sont très bien compris, plus de la moitié des personnes interrogées ne sait citer que peu (moins de cinq) voire aucun fruits ou légumes de saison. Il est grand temps de prendre l’éducation alimentaire au sérieux et d’être plus ambitieux dans les initiatives existantes.
Autre volet : l’information des consommateurs au moment de l’acte d’achat. À cet égard, notre enquête révèle combien le label Nutriscore est connu, bien qu’il soit très récent. Tout indique qu’un score environnemental à la logique similaire mériterait d’être mis en place. Des initiatives concrètes existent déjà à ce sujet, telles que l’initiative citoyenne européenne (European EcoScore), également portée par des jeunes.
L’alimentation durable, une question d’argent ? Oui, mais pas seulement.
Une transition alimentaire passe aussi par un accès pécuniaire aux aliments environnementalement compatibles avec nos limites planétaires ! Plus de la moitié des personnes interrogées étaient d’accord avec le fait qu’elles mangeraient d’une manière plus respectueuse de l’environnement si elles en avaient les moyens financiers. La précarité alimentaire est une réalité en Belgique et doit être réduite structurellement.
Ceci étant dit, si un manque de moyens est un frein à une consommation alimentaire plus durable pour une moitié des jeunes interrogés, à peu près la même proportion de jeunes estime que la situation financière n’est pas déterminante. Même les personnes qui déclarent avoir une situation financière difficile à très difficile ne sont pas plus de 15 % à indiquer que le prix est un des obstacles principaux qui empêche d’adopter une alimentation durable. Une alimentation bas carbone, saine et abordable, c’est possible !
Visibiliser et soutenir les alternatives grâce à des stratégies de transition, en concertation avec nos agriculteurs
L’information n’est pas la seule clé ! Les jeunes semblent globalement insatisfaits de l’offre qui leur est proposée dans les réseaux classiques de distribution. Alors que 62% des personnes interrogées citent la provenance des aliments comme un critère important de leur alimentation, elles estiment ne pas être suffisamment informées des initiatives locales qui existent à proximité de chez elles.
Ici aussi, le chantier est vaste pour que chacun puisse avoir accès à un repas environnementalement responsable dans chaque lieu de formation et/ou de travail : mener une politique d’approvisionnement ambitieuse dans les cantines publiques ; s’assurer que la transition alimentaire soit juste pour les producteurs et consommateurs ; s’attaquer aux marges trop élevées de la grande distribution sur les produits bio et, surtout, utiliser le budget de la Politique Agricole Commune en Belgique à bon escient. L’argent du contribuable doit soutenir une agriculture véritablement engagée dans la transition.
Dans ce monde d’après que nous avons à présent la responsabilité de construire, nous aspirons à une transition qui devient chaque jour plus urgente. Pour éviter que les nombreux appels au changement souvent exprimés durant les confinements ne s’essoufflent, il faut dès à présent cueillir l’envie de transition alimentaire des jeunes.
>>> L’avis officiel du Forum des Jeunes est consultable ici : https://forumdesjeunes.be/actualites/avis-officiel-cueillir-pleinement-lenvie-de-transition-alimentaire-des-jeunes/
>>> Titre de la rédaction. Titre original: "Alimentation durable selon les jeunes : Le monde d’après commence maintenant"