Pour un élargissement rapide de l’Union européenne

La politique d’élargissement de l’Union européenne est profondément affectée par la nouvelle donne géopolitique, résultat de l’onde de choc du conflit en Ukraine. Cette nouvelle donne appelle à une refonte complète de cette politique, tout particulièrement en ce qui concerne les Balkans occidentaux.

<p>Des drapeaux de l'Union européenne et de l'Ukraine flottant devant le Parlement européen à Strasbourg, le 24 février 2023</p>
Des drapeaux de l'Union européenne et de l'Ukraine flottant devant le Parlement européen à Strasbourg, le 24 février 2023. ©AFP/Archives

Une opinion de Jean F. Crombois, Maître de conférences en études européennes à l’Université américaine en Bulgarie

L’octroi, en juin dernier, à l’Ukraine et à la Moldavie, du statut de pays candidats à l’adhésion à l’Union européenne remet en question les fondements de la politique d’élargissement.

La politique d’élargissement de l’Union européenne est profondément affectée par la nouvelle donne géopolitique, résultat de l’onde de choc du conflit en Ukraine. Cette nouvelle donne appelle à une refonte complète de cette politique, tout particulièrement en ce qui concerne les Balkans occidentaux.

Si la décision de juin 2022 a reçu le soutien officiel des pays des Balkans occidentaux, ceux-ci ont toutefois déploré le fait que tant le Kosovo et la Bosnie en étaient exclus alors que les discussions avec la Macédoine du Nord restaient au point mort. La situation s’est ensuite en partie débloquée avec la levée du veto bulgare conditionné à une réforme de la constitution macédonienne [voir plus bas]. En décembre, la Bosnie se voyait octroyer le statut de pays candidat à l’adhésion.

Certes, la politique d’élargissement avait été revue, après le refus, en octobre 2019, d’entamer des négociations d’adhésion avec la Macédoine du Nord et l’Albanie. Dans la foulée, la France qui comptait parmi les pays opposés à cette ouverture des négociations proposa alors une révision de la politique d’élargissement. Cette révision a conduit la Commission européenne à dévoiler, en février 2020, une nouvelle méthodologie de l’élargissement qui accorde une implication plus importante aux États membres tout en y incluant des mécanismes d’évaluation afin d’éviter toute régression dans les domaines déjà clôturés.

Le piège de l’unanimité

Cela étant, cette nouvelle méthodologie change peu de choses. L’élargissement est basé une approche essentiellement technique, faites de critères à satisfaire. De plus, les prises de décisions en cette matière sont encore sujettes à l’unanimité, ce qui conduit certains États membres à exporter leurs problèmes bilatéraux avec les pays candidats au niveau européen.

La situation entre la Macédoine du Nord et la Bulgarie en est un bon exemple. Le différend historico-linguistique qui oppose les deux pays a conduit la Bulgarie à se montrer extrêmement critique à la poursuite du processus d’adhésion de son voisin. Ce différend tire son origine dans l’histoire enchevêtrée des deux pays donnant lieu à l’appropriation réciproque de leurs héros nationaux et les demandes de reconnaissance de minorités nationales. À ce jour, la situation est toujours bloquée dans l’attente du changement de la constitution macédonienne reconnaissant la minorité bulgare sur son territoire. Ce changement est demandé par la partie bulgare pour toute reprise des négociations.

Une adhésion sans cesse repoussée

Cela étant, l’octroi du statut de pays candidat ne veut pas dire adhésion dans un avenir proche. Soyons honnêtes, la situation politique dans les Balkans occidentaux n’est guère encourageante. Chacun des pays a connu, à des degrés divers, une régression démocratique sans compter les actions perturbatrices de la Russie pour empêcher tout règlement des conflits comme entre le Kosovo et la Serbie ou encore en Bosnie. Dans ce contexte, une adhésion de ces pays risque de se réaliser bien après 2025, date à l’époque mentionnée par Jean Claude Juncker, pour le Monténégro et la Serbie. Cette attente est insupportable pour la jeunesse et pour les forces progressistes dans ces pays, et ne peut qu’y renforcer l’influence néfaste de la Russie.

Inversons la logique

La solution : inversons la logique. Accélérons l’adhésion de ces pays tout en renforçant de manière considérable les mécanismes de respect de l’État de droit et de la lutte contre la corruption au sein de l’Union européenne. Nous pouvons, en effet, difficilement accepter, alors que des pays membres sont plus qu’en délicatesse avec Bruxelles dans ces domaines, d’en exiger encore plus des pays candidats.

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