Vouloir faire l’impasse sur l’État juif dans la lutte contre l’antisémitisme est absurde

Oui le gouvernement actuel de l’État d’Israël et, à bien des égards, racialiste, illibéral et antidémocratique. Mais les forces démocratiques en Israël n’ont pas disparu. Soutenons-les de toutes nos forces.

Protesters gather for an 11th straight week of protests against the government's controversial judicial overhaul bill in Tel Aviv on March 18, 2023. (Photo by JACK GUEZ / AFP)
Les forces vives et démocratiques couvrent chaque jour les rues d'Israël de milliers de drapeaux bleu et blanc ou de drapeaux arc-en-ciel. ©AFP or licensors

Par Benjamin Beeckmans, Président du Centre Communautaire Laïc Juif

Nous sommes nombreux à avoir été interpellés suite à la publication d’un article vendredi dernier dans La Libre : “Est-il judicieux de choisir l’État d’Israël comme partenaire privilégié dans la lutte contre l’antisémitisme ?”

Vouloir faire l’impasse sur l’État juif dans la lutte contre l’antisémitisme est absurde. Que l’on veuille ou non, que l’on soit “sioniste” ou non, et quelles que soient les turpitudes de ses gouvernements – ce que le Centre Communautaire Laïc Juif (CCLJ) que je préside désormais n’a jamais cessé de dénoncer -, Israël est une référence essentielle pour les juifs du monde entier. Cela est un fait.

Je suis régulièrement le travail de B’tselem, d’Amnesty International et d’autres associations, ils ne sont pas arrivés à me convaincre qu’il y ait un réel apartheid dans le territoire souverain de l’État d’Israël. Des discriminations, oui, l’apartheid, non. Tant en Belgique, où nous vivons, qu’en Israël, il faut résolument combattre les discriminations. Mais il faut que les mots gardent un sens.

Ma critique porte sur le gouvernement et non l’État

Ceci dit, il est vrai que le gouvernement actuel de l’État d’Israël, à bien des égards racialiste, illibéral et antidémocratique, ce gouvernement ne saurait être aujourd’hui un partenaire crédible ou utile dans la lutte contre l’antisémitisme, pas plus que dans n’importe quelle autre cause. Dont acte. Les gouvernements changent et c’est bien le propre des démocraties.

Ma critique porte sur le gouvernement et non l’État. Ce gouvernement est certes légal mais totalement illégitime au regard des valeurs juives. L’idée n’est pas de boycotter Israël mais de soutenir les partis et organisations qui entendent lutter contre les dérives racialistes et illibérales. C’est la feuille de route du CCLJ.

Évidemment nous ne souscrivons en rien aux appels au boycott de tous ceux qui profitent des malheurs démocratiques d’Israël pour justifier leur dégoût idéologique d’Israël. Nos amis marxistes appelaient déjà au boycott d’Israël au temps de Rabin, ou de Ben Gourion. Leur problème c’est l’idée même d’un État juif souverain, en rien la nature de son gouvernement. Idéologiquement, tout nous sépare et heureusement.

Ils manifestent chaque jour dans les rues du pays

Pour pousser ce gouvernement au changement, n’oublions pas qu’il existe en Israël, des chercheurs, des institutions et de nombreuses associations spécialisées dans la problématique de l’antisémitisme et dans la mémoire de tous les génocides et ce sont souvent celles-là mêmes qui sont en première ligne pour lutter contre toute forme de résurgence des discriminations, en Israël et ailleurs. Ces forces vives et démocratiques n’ont pas disparu, au contraire, elles couvrent chaque jour les rues du pays de milliers de drapeaux bleu et blanc ou de drapeaux arc-en-ciel pour conserver la vigueur de la diversité, du combat contre les discriminations et de la démocratie israélienne. Les voix sont nombreuses en Israël et l’attachement à la démocratie bien plus fort que jamais.

Que faire dès lors ? Il faut associer dans le combat contre l’antisémitisme et dans le combat contre toutes les discriminations, cette même société civile israélienne, qui fait preuve, jour après jour, d’une formidable vigueur démocratique. Il aurait été bon que les signataires de ce texte y fassent référence.

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