”Je vais vous dire où sont passés les jeunes pour le climat !”
La vague de ces milliers de jeunes pour le climat est devenue un mouvement de fond, énergique et multiforme. Ils et elles sont passés de la rue à l’action, aux initiatives, aux projets. Pour dénoncer, résister, innover. Voici des exemples, allumez vos projecteurs.
- Publié le 04-04-2023 à 10h31
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Une chronique “J’assume” d’Adélaïde Charlier, “Jeune pour le climat et les droits humains”
Parfois on me demande, “Où sont passés les jeunes pour le climat ?” ; je réponds, “Dans l’ombre de votre attention”.
Non, ces jeunes n’ont pas disparu.
En 2019, une vague de milliers de jeunes s’est levée aux quatre coins du monde pour demander que la crise climatique, objectivée par les scientifiques, soit gérée par les responsables politiques et économiques à la hauteur de sa gravité.
L’onde a provoqué quelques réactions comme le Green Deal au niveau européen, une augmentation des énergies renouvelables, quelques plans politiques plus ambitieux, plus de conscientisation des enjeux auprès des citoyens. Mais, au regard de l’urgence, répétée par le rapport du GIEC ce 20 mars dernier, ces frémissements sont trop timides.
Pandémie : un voile sur le message climatique
La pandémie a ligoté la présence physique dans les rues et mis un voile sur le message climatique. Pourtant, la crise Covid n’a pas fait disparaître la crise climatique, elle l’a simplement ignorée. Elle n’a pas éteint la frustration des jeunes, leur colère parfois ; leur envie d’inventer un futur plus lucide ne s’est pas évaporée. Brisée sur le rocher Sanitaire, la vague a diffusé son énergie plus profondément. Aujourd’hui, présents sur tous les continents, des jeunes forts de leur désir de vie et portés par l’onde de changement d’une génération nouvelle, sont (re) passés de la rue à l’action, aux initiatives, aux projets. Pour dénoncer, résister, innover.
Lutzerath, HEC Paris ou Parlement européen
Ces jeunes, on les revoit sur des zones à défendre, de Liège à Lutzerath, pour résister contre l’agrandissement du béton ou de mines de charbon, parce qu’ils perçoivent l’incohérence de ces projets dans la lutte contre le dérèglement climatique. La désobéissance pacifique reste une expression des mouvements climatiques, elle s’affiche par une présence physique sur des espaces de terre privés de parole.
Ces jeunes, on les retrouve aussi dans leurs universités où ils multiplient travaux, thèses, recherches sur des réponses aux enjeux climatiques. Ils dénoncent dans les forums de recrutement (comme à l’UCL ou HEC Paris) la présence d’entreprises figées dans des projets fossiles, ils refusent de travailler pour des employeurs qui ne s’engagent pas dans la transition, ils s’organisent en collectif pour mobiliser le monde du travail et de l’enseignement.
On les voit devant des lieux de décisions politiques, comme le Parlement Européen, pour lutter contre l’exploitation des fonds marins, contre le projet EACOP, contre l’écocide (STOPEcocide), contre la PAC et le Mercosur.
Sortir des énergies de l’ombre
Il y a encore tous ces jeunes qui créent déjà demain par leur innovation d’économie circulaire, de mobilité partagée, d’achat de terre collective, de ferme à taille humaine, de réseaux de ceinture alimentaire ou énergétique autour des villes… ils font l’économie, ils font l’agriculture, ils font la mobilité…
Sans oublier, les créateurs de nouveaux médias, journalistes et influenceurs, alertant sur les enjeux sociaux et environnementaux et collectant des exemples de l’onde vitale déjà à l’œuvre.
Et puis, il y a ces jeunes qui déploient leurs talents artistiques pour chanter, danser, déclamer le message de l’urgence et du changement ; du simple flashmob en rue aux festivals les plus prisés, du théâtre au cinéma, une génération Z décline son engagement pour le vivant.
Ces jeunes mériteraient un coup de projecteur et une sortie de l’ombre.
Les spots ne s’allumant que trop rarement ou qu’exclusivement sur quelques jeunes qui, frustrés par la surdité et la désinvolture de décideurs, provoquent l’opinion par une action spectaculaire (comme celle du tableau de Van Gogh). Ces jeunes-là sont fondamentalement désespérés, déchirés par l’écart entre la dégradation de la terre et l’inertie des politiques.
Or, c’est plutôt de ce désespoir, guettant une génération lucide, dont il faut se préoccuper. Tout en reconnaissant ceux qui, avec un réalisme passionné, créent déjà de nouvelles manières de vivre. Conscients de l’interdépendance des espèces vivantes dont l’humain fait partie et des limites planétaires. Connectés à leur élan vital, ils se laissent toucher par les pertes de biodiversité et l’impact climatique, au risque de ressentir jusque dans leur chair ces dérèglements.
La vague de jeunes pour le climat s’est dissipée sous de multiples formes mais constitue un mouvement de fond dont le courant, pas toujours visible, n’en est pas moins bien présent.
”J’assume !”, le rendez-vous du mardi midi
Avec” J’assume !”, La Libre propose chaque mardi midi, sur son site, un nouveau rendez-vous d’opinion. Six chroniqueurs, venus d’horizons de pensée différents et complémentaires, proposent leurs arguments semaine après semaine sur des questions polémiques et de société.
Vous y retrouverez l’essayiste et militante laïque Nadia Geerts, l’auteur et comédien Ismaël Saidi, l’avocat et directeur général adjoint de l’Institut Thomas More Aymeric de Lamotte, la chargée de projets dans l’administration publique Margherita Romengo, Rik Torfs, professeur de droit canonique, écrivain, recteur honoraire de la KU Leuven, et Adelaïde Charlier, étudiante en sciences politiques et sociales UGent&VUB, connue comme activiste climat et droits humains.
Tous s’expriment à titre personnel. Ils ont pour ambition de vivifier un débat impertinent mais de qualité aux côtés des grands entretiens, des opinions, des chroniques et des cartes blanches que La Libre publie au quotidien. Comme pour toutes les opinions, le contenu des textes n’engage que les auteurs et n’appartient pas à la rédaction du journal.