”Mes pensées vont vers cette maman qui vit une véritable tragédie”

”Ce qui s’est passé à Gilly est un drame qui reflète la réalité des mères”.

Hal : Kathy a oublié Guy, son bébé de 5 mois, dans son Maxi-Cosi toute une journée dans sa voiture en plein soleil, entrainant inévitablement la mort de l'enfant. Parking de l'entreprise où Kathy travaille.
"Ce qui s'est passé à Gilly est un drame qui reflète la réalité des mères" (illustration) ©Benoit Vanzeveren

Une opinion de Axelle Ballieu, créatrice de podcast autour de la parentalité

Ce qui s’est passé à Gilly n’est pas un simple fait divers. C’est un drame qui reflète la réalité des mères, des jeunes parents, et qui fait éclater au grand jour les lourdes conséquences d’une charge mentale trop élevée.

Pour ceux et celles à qui cet événement ne dit rien, il s’agit de l’histoire d’une jeune mère partie travailler, dont le bébé est resté dans la voiture et est décédé des suites d’une hyperthermie. Mes pensées vont vers cette maman qui vit une véritable tragédie.

À travers ce message, je souhaite pousser un coup de gueule. Je suis révoltée face à ce que je lis sur les réseaux sociaux, mais surtout abasourdie par cette déferlante de haine et d’insultes.

Qui sommes-nous, ou oserais-je dire, qui êtes-vous pour oser poser un jugement ? Nous ne connaissons pas l’histoire de cette femme, de cette mère, de cette employée de l’hôpital Saint-Joseph de Gilly. Comment pouvez-vous la traiter de mère indigne ? De meurtrière ?

L’avalanche de critiques qui s’abat sur cette maman, sur cette famille, me dépasse. Et vous savez pourquoi ? Parce que je peux concevoir que cela puisse arriver.

En tant que mère, et je parle de ma propre expérience, il m’est moi-même arrivé de perdre pied tellement la charge mentale est intense, tellement un enfant demande d’être sur tous les fronts en même temps. Je me trouvais dans un tunnel si noir que je n’en voyais pas le bout. J’ai souvent pensé que jamais je n’allais en sortir. J’avais le cerveau en compote, incapable de parler par moments en raison de l’épuisement abyssal qui me terrassait. Je suis certaine que la plupart d’entre nous, jeunes parents, reconnaîtront ces sentiments, ces sensations.

N’est-il pas possible de soutenir cette mère, de mettre en évidence les difficultés qui entourent la parentalité, plutôt que de l’accabler ? Comment pouvez-vous savoir qu’elle n’était pas, elle aussi, en pilote automatique, comme nous, parents, l’avons tous été à un point ou à un autre ?

Pour accabler et juger, les courageux se bousculent derrière leurs écrans, mais pour aider et s’entraider, il n’y a plus personne. Les mères et les pères “parfaits” n’hésitent pas à y aller de leur critique, bien cachés derrière leur téléphone. Pourquoi n’utiliseriez-vous pas votre précieux smartphone pour tendre la main à de jeunes parents, pour changer ? Pour leur proposer un repas, un brin de nettoyage, quelques courses par-ci, par-là… Pour passer du temps avec eux et leur bébé, leur proposer de le bercer, juste le temps d’une douche ou d’un simple caca, par exemple. Pour leur permettre de se préparer à manger, de faire autre chose que de porter, bercer, allaiter, calmer, occuper bébé, même pour quelques minutes.

Devenir mère, devenir parent, est déstabilisant. Et malheur à ceux qui diront le contraire. Tous les sentiments et émotions sont exacerbés et majorés par une bonne dose de fatigue et de stress. La maternité, la paternité, c’est ambivalent. Beau et horrible à la fois. Doux et épineux, intuitif et incroyablement difficile. Épuisant et magique. Mais surtout intensément intense.

C’est précisément pour ces raisons, ces émotions multiples, que je ne peux concevoir qu’un autre parent puisse faire preuve d’une hypocrisie pareille. Car qu’on se le dise : personne n’est parfait.

La vie de cette maman est brisée : cet incident lui a tout coûté et rien ne pourra jamais apaiser cette famille. Un accident. Un terrible accident, voilà ce que c’était. Sa fille, l’amour de sa vie, la personne pour qui elle aurait donné la sienne, est morte. Son bébé n’est plus. Et cette maman est déjà suffisamment punie, car elle doit vivre avec la mort de son bébé sur la conscience.

Quel bénéfice tirez-vous de ce tourbillon de haine ? Comment ne pouvez-vous pas comprendre, imaginer, qu’un accident puisse arriver ? Qu’un oubli puisse arriver ? Qu’une mère à bout puisse commettre une erreur et rester une bonne mère malgré tout ? Eh bien laissez-moi vous le dire : les accidents existent. Et pire, ils se produisent. Et j’espère du fond du cœur que ce message résonnera dans votre mémoire quand les rôles seront inversés et que les victimes, ce sera vous. Car un jour, ce sera vous.

Ma déclaration touche à sa fin et j’espère avoir réussi à ouvrir vos esprits, à susciter chez vous un sentiment de solidarité. Je dédie ce post à toutes les mères, à tous les pères, qui sont actuellement dans ce tunnel si noir qu’ils n’y voient plus la lumière. Je m’adresse aussi aux autres, à ceux et celles qui voient la vie en rose. Vous êtes des pères-le rares. Vous êtes mère-veilleuses. N’oubliez jamais ce que vous avez vécu, vos expériences les plus belles et les plus terribles, et tendez la main. Une demi-heure de temps peut signifier tellement pour un parent épuisé… Et à toi, chère maman, chère employée de l’hôpital Saint-Joseph de Gilly, rappelle-toi que derrière la tempête se cache toujours un arc-en-ciel…

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