"La France ne domine pas la langue française"
Emmanuel Khérad, le présentateur de La Librairie francophone, estime que le français devrait se créoliser, s'enrichir d’expressions ou de dialectes africains. Et résister à s'angliciser, comme le Quebéc le fait très bien.
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- Publié le 17-09-2023 à 08h14
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Un éclaireur, un combattant
Paris. Paris. Avenue du Président Kennedy, 116. L’immeuble de la Maison de la radio domine le quartier. Il abrite quantité de bureaux, de studios d’enregistrement de toute taille : c’est une machine à neurones, à émotions, à réflexions, à sensations. À coups de gueule et d’éclats. Première radio de l’Hexagone, France Inter a ses fidèles et ses adversaires tenaces. Je l’attends dans le petit salon des invités : au mur des photos de Jane Birkin en duo avec Etienne Daho, d’Angèle, d’Alain Souchon et Benjamin Bioley et bien d’autres. Emmanuel Khérad y travaille depuis une vingtaine d’années, dont 17 ans passés à préparer et à présenter La Librairie francophone, un voyage culturel dans la francophonie, consacrée aux livres mais aussi à d’autres formes d’art.
Chemise blanche, jeans et veston gris clair, chaussures de sport assorties, Emmanuel Khérad, teint subtilement hâlé, revendique son attachement au sud et à la créolisation de la langue française. “La France, dit-il, fait partie de la francophonie. Elle ne la domine plus. C’est terminé, cela." Il insiste : La Librairie francophone est un travail d’équipe : les radios publiques de quatre pays y participent chaque semaine. Résultat en audience cumulée plus de 800 000 auditeurs en France et quelque 3 millions dans toute la francophonie, maître mot de ses émissions (diffusé le dimanche midi sur la Première, RTBF).
Khérad lance un appel : les radios publics doivent faire beaucoup plus pour promouvoir la francophonie. Elle est fragile et est pourtant un rempart contre le fondamentalisme. Rencontre franche, avec Khérad est un élargisseur d’esprit – pardon pour ce néologisme – un éclaireur qui avec les auteurs et artistes qu’il reçoit, trace le sillon culturel vers plus de liberté, d’égalité, de générosité.
Gamin, je détestais lire !
Dans quelle famille avez-vous grandi ?
Une famille de professeurs : ma mère enseignait le français, mon père le droit. Une famille littéraire mais, quand j’étais gamin, je détestais… lire ! Ce goût est arrivé lorsque j’étais au collège quand j’ai été obligé de lire Le père Goriot de Balzac. Je devais faire un résumé du livre. Je n’y arrivais pas. Pendant les vacances, mes parents m’ont consigné quelques heures, tous les jours, dans ma chambre pour que je progresse dans la lecture. Cela a été une souffrance et, en même temps, je me suis pris au jeu. Progressivement, j’ai lu toute l’œuvre de Balzac et me suis pris d’affection pour cet auteur.
Vous avez grandi à Nice, vous avez des origines corses. Vous le soulignez souvent : vous êtes un homme du sud…
J’ai toujours de la famille, mon meilleur ami, mon filleul en Corse et j’y vais très souvent. Je me sens appartenir à la Région Provence Alpes Côte d’Azur et à la Corse. Je suis un homme du sud de la France et du sud, au sens plus large : quand je vais à la Réunion, au Liban, au Maroc, en Algérie, je me sens bien. J’ai besoin de la chaleur, du soleil. C’est physique et intellectuel. J’ai besoin d’une sorte de dénuement. C’est d’ailleurs qui m’a gêné en arrivant à Paris pour y travailler : c’est “l’attirail” pour se vêtir, faire des représentations. Il y a un “costume” obligatoire à Paris qu’on a moins dans le Sud. Là-bas, on n’est pas tout le temps en tong et en short, mais la chaleur permet d’ôter le veston et la cravate. L’Outre-mer me convient très bien.
Quel enfant étiez-vous ?
Assez timide, très angoissé jusqu’à ne pas pouvoir prendre le bus seul. Je ne sais pas d’où cela vient. J’ai manqué d’innocence pendant plusieurs années. J’ai toujours beaucoup réfléchi sur la vie, sur les autres et sur moi-même. J’ai toujours été tourné vers les autres, mais j’étais à la fois inquiet et affectueux. Et cela générait en moi beaucoup de questions. Je ne suis pas devenu adulte très vite parce que je suis encore un ado dans ma tête. Je ne suis jamais devenu adulte. Mais j’étais dans un questionnement de la vie, tout le temps. Cela m’a handicapé dans mon enfance et m’a empêché d’aller vers les autres.
Pourquoi avoir choisi des études et le métier de journaliste ? Était-ce une manière de surmonter les appréhensions qui vous hantaient ?
…L’histoire est particulière. J’en parle très peu. Même ici, à France Inter, peu de gens la connaissent. Mais c’est important pour moi de vous la raconter. En seconde, j’avais un ami très proche, Marc. Nous étions tout le temps assis l’un à côté de l’autre. Un jour ses parents m’ont appelé pour m’informer qu’il était malade et m’ont demandé de leur apporter ses cours. Il avait une leucémie. Je ne connaissais pas cette maladie. Sa situation se dégradait : il fallait trouver, vite, un donneur de moelle osseuse. J’ai dit : “je m’en occupe !” Je me suis renseigné partout, j’ai appelé Nice matin et j’ai raconté l’histoire à un journaliste. Il est venu me voir au lycée le lendemain et en a fait une page. Il n’y avait pas de réseaux sociaux mais il y a eu un élan incroyable de solidarité. Toutes les chaînes de télévision française sont venues à Nice pour m’interroger. L’appel a été relayé dans plusieurs pays. Nous avons créé une association, multiplié les activités. Les hôpitaux de Nice étaient avec nous. Mais la santé de Marc devenait très critique. Un ami qui travaillait dans l’association, a déboulé chez moi. J’étais en train de rédiger un travail sur un vieux Mac. Il a débranché d’un coup l’ordinateur et a dit : “Marc est mort”.
Aucun donneur compatible ne s’était manifesté ?
… Non… C’était et cela reste compliqué. Une infirmière, impliquée à nos côtés, nous a conseillé de maintenir notre association et d’en faire un “Club santé”, qui a été très actif dans la prévention contre le sida. Cela a pris de l’ampleur. Avec la FNES, Fondation nationale des étudiants contre le sida, nous avons organisé chaque année des journées de sensibilisation en rassemblant des actions dans tous les lycées de France. J’ai été invité chez Christophe Dechavanne : je me suis à nouveau retrouvé dans les médias…
Alors qu’entre-temps, vous aviez entrepris des études de génie mécanique…
Je me préparais pour faire “math sup”. Et un jour, j’ai dit à mes parents : je veux être journaliste… Après une licence littéraire, j’ai été accepté à l’école de journalisme de Marseille.
Après vos études, c’est grâce à votre livre “La Massalia” que vous avez été engagé à France Inter…
J’ai commencé à travailler dans une radio locale et animais une émission “Quartiers libres” diffusée par les dix radios locales du sud : on y parlait de la vie sociale, culturelle des quartiers. Pour les 2600 ans de Marseille, j’avais suivi le travail de ces associations qui avaient, pour cet événement, organisé une grande déambulation dans la ville. On m’a proposé d’en faire un livre. France Inter a repris mon livre “Massalia” dans sa sélection de livres. Le directeur de l’époque m’a proposé de réaliser des reportages radio sur les quartiers de Marseille. En 2003, on m’a confié l’émission Escale estivale, magazine d’actualité culturelle qui sera diffusé jusqu’en 2015.
Ensuite, on m’a demandé de remplacer pendant un mois, José Arthur, souffrant, pour présenter le Pop club… Un phénomène, un monument national ce José Arthur…
C’était une émission légendaire et José Arthur n’avait jamais été remplacé. La direction m’a dit : “Si tu te rates, on te vire. Et si tu réussis, n’espère rien… !” Tout s’est très bien passé. Comment est né le concept de La Librairie francophone que vous préparez et présentez depuis 17 ans… ? Le directeur des programmes de France Inter m’a présenté ce projet d’émission sur les livres, en collaboration avec les radios publiques de Suisse, Belgique et du Canada et m’a proposé de la présenter. J’ai cru à une blague. Il y avait deux conditions : la participation des librairies dans chacun des pays et, bien sûr, les livres comme base de départ. Il fallait tout créer.
Pourtant, vous n’étiez pas critique littéraire…
Non. J’arrivais d’une émission très généraliste Escale estivale, qui parlait de toutes les cultures, mais je n’étais pas un critique littéraire. Quand j’ai commencé La Librairie francophone, j’ai voulu qu’elle s’ouvre tout de suite à d’autres formes artistiques. Aujourd’hui, il y a chaque semaine, trois auteurs invités et des libraires dans chacun des pays partenaires : pour la Belgique, ce sont Déborah Damblon pour la librairie Filigranes du théâtre Le Public, et Nathalie Clérin de la librairie de La Mazerine à La Hulpe. Nous avons aussi ouvert notre champ en accueillant la bande dessinée, le livre d’art, la musique, la photo. Et nous avons un “live” par mois avec des artistes qui viennent jouer et croisent leur regard avec les auteurs. Il s’agit donc d’une émission culturelle généraliste mais au travers des livres. C’est en quelque sorte un voyage dans la francophonie culturelle.
L’originalité est que les livres servent de base à une confrontation de point de vue sur les sujets abordés dans ces ouvrages.
C’est ainsi, je crois, que nous parvenons à capter l’attention des auditeurs de toutes les tranches d’âge. Même s’ils ne lisent pas les livres, ils entendront des auteurs et des artistes parler de fraternité, de paternité, d’exil, de déracinement. Évidemment, nous évoquons aussi le style et l’écriture, mais cela n’est pas le cœur de la discussion : d’autres émissions littéraires s’en chargent. Le défi est aussi de toucher toutes les tranches d’âge. Notre mission de service public n’est pas de faire des émissions un peu “glauques”, de nonchalance où l’on s’écoute parler. Les gens n’ont plus envie de cela. Et s’ils le veulent, il y a des plateformes ou des podcasts dédiés. La radio doit vivre : elle n’est pas un média perdu, bien au contraire. Elle a un bel avenir si elle parvient à se renouveler et s’adresser au grand public. France Inter, la Première et les autres ont une forte influence sociétale. Il faut donner aux auditeurs ce qui les réconforte et les fait voyager à travers les thèmes et les pensées.
La France fait partie de la francophonie, elle ne la domine pas
Vous citez parfois l’écrivain Edouard Glissant pour qui la créolisation du monde est “irréversible”. Pourquoi ?
Nous avons tous des origines et des influences culturelles multiples. Nous avons des racines mais nous sommes tous empreints de charges, de forces culturelles qui viennent soit de nos parents, de nos amis, de nos métiers. Nous avons tous des influences qui viennent du monde. Nous sommes mêlés. Voyez l’île de la Réunion. Je sais qu’il y a pas mal de soucis mais il y a une tolérance, une ouverture sur toutes les cultures et les religions. Tout le monde se fond dans la masse sans qu’il y ait le moindre problème.
Votre “combat”, c’est la francophonie. Est-elle en recul ?
Aujourd’hui, la France fait partie de la francophonie. Elle est sur le même pied d’égalité que la Suisse, le Québec, la Belgique, la Côte d’Ivoire, le Sénégal : au total, la francophonie, ce sont 88 pays. Il faut intégrer cela. Or, dans certaines librairies ou aux rayons des grandes surfaces, il y a toujours une séparation entre littérature française et libraire francophone… là il y a un problème. La France doit prendre sa part de responsabilité : c’est ce qu’a fait le président de la République, dans son discours à l’Académie, annonçant notamment la création d’une cité internationale de la langue française, à Villers Cotterêts. Il a donc placé la francophonie au sommet de l’État. Mais il faut aussi que la population française, les intellectuels et le milieu politique puissent prendre la mesure de cette phrase forte : la France fait partie de la francophonie. Ce n’est pas parce que la racine étymologique est commune que la France est au-dessus des pays de la francophonie.
Fameux travail…
La langue française vit toute seule, elle évolue, elle s’enrichit dans tous les pays du monde où l’on parle le français. Ce n’est pas la France qui domine la langue française, c’est terminé cela. La France, comme le Québec le fait, doit faire attention de ne pas angliciser la langue. Elle doit plutôt s’enrichir d’expressions ou de dialectes africains. On dit parfois que l’anglais s’enrichit d’expressions françaises. Non ! Les anglophones, en effet, parlent de “croissant”, de “menu”, de “bœuf bourguignon” mais ils l’utilisent pour valoriser la qualité d’un produit. Mais c’est du commerce. Le danger est plus du côté de la langue anglaise que de la créolisation du français.
Vous allez vous faire des amis…
Il faut protéger la langue française, pas tellement en la fermant à de nouveaux mots. Il faut surtout, dans l’éducation que nous offrons à nos enfants, leur apprendre à bien s’exprimer. Avec des mots et une orthographe corrects. Or avec les réseaux sociaux, cela devient insupportable. Souvent, les ados écrivent : “Tu fé koi” ? Cela me rend dingue. En intégrant ce genre d’”orthographe”, ils n’arrivent plus à écrire. Mais il faut rester ouvert, évidemment : quand ils sont contents, les Français disent “yesssss” !
La francophonie a donc un potentiel et un avenir. Comment le développer, la protéger ?
Les directions des chaînes publiques doivent comprendre que la francophonie est fragile. Nous avons mis 17 ans à installer une telle émission. Il faut du temps pour que les gens comprennent que le terme “francophonie” ne signifie pas que l’émission est institutionnelle. Certains pensent que l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) ne sert à rien. C’est faux : ils font des choses extraordinaires. Mais c’est une institution mal comprise. D’où, si je peux me permettre ce plaidoyer pro domo, l’importance de démonter que la culture francophone peut s’exporter dans le monde et qu’elle peut susciter des échanges. Il est important que des Marocains puissent entendre des Québécois, des Belges, des Suisses auxquels ils n’auront jamais accès. Il faut donc prendre soin des émissions comme la nôtre… Les auteurs de l’espace francophone aiment venir chez nous et nous donnons aussi souvent la parole à de nouvelles voix que l’on n’entend nulle part ailleurs. Mais c’est long. Et la culture, cela marche. Rien qu’en France, à 14 heures le samedi, l’émission touche jusqu’à 850 000 auditeurs. Et quand on additionne les autres publics, les rediffusions, on dépasse les 3 millions.
"Pour moi, les fondamentalistes sont des minables barbares"
Votre rôle est aussi “citoyen”. La culture, la francophonie sont des remparts contre les extrémismes et fondamentalismes…
Ali Bécheur, écrivain tunisien, l’a dit haut et fort, dans notre émission : “La francophonie est le seul rempart face aux fondamentalisme”. J’ai cette phrase en tête tout le temps. Cela me vaut parfois quelques menaces parce que pour moi, ce ne sont pas des fondamentalistes mais des minables barbares. Je les présente comme cela à l’antenne. Notre émission est emblématique de cette opposition : c’est notre combat collectif. Non seulement on en parle toutes les semaines, mais c’est induit dans l’équipe et chez nos auditeurs. C’est en nous. Nous défendons la liberté d’expression, le droit au blasphème. Mais il faut dépasser cela. La cause importante est que l’éducation des enfants, dans le Maghreb et certains pays parasités par les fondamentalistes, puisse se faire avec des personnalités fortes qui portent ces valeurs-là.
Beaucoup d'auteurs portent ces valeurs-là…
Oui, bien sûr, mas on les entend peu parce que, dans les médias, on fait de plus en plus de divertissements. J’alerte les directeurs des chaînes : faites attention. Le rôle du service public est de porter des valeurs et des combats. C’est essentiel. Je lance un appel : nous pouvons faire plus ensemble, il faut juste qu’on nous laisse des créneaux. Je dois souligner que la RTBF a toujours été exemplaire avec nous.
Il y a un autre combat qui vous tient à cœur : c’est la défense des librairies indépendantes…
Quand je vais faire mes courses, dans une grande enseigne, je constate que les rayons librairie sont bien agencés et se développent. Cela dit, le combat pour les librairies indépendantes est fondamental. Nous en avons sauvé une à Châteaugiron, en Bretagne. Une amie de la libraire nous avait appelés pour expliquer les difficultés qu’elle rencontrait. Nous avons diffusé une séquence en début d’émission. Des auditeurs ont appelé leurs amis et connaissances en Bretagne pour les inviter à aller acheter leurs livres là-bas. Ils ont été débordés. Des artistes et des auteurs y ont organisé des séances de dédicace : la librairie a été sauvée !
Les jeunes lisent de moins en moins. Pourquoi ? Comment relever le niveau de lecture?
Les parents ne doivent pas s’inquiéter. Ils doivent ouvrir leur bibliothèque aux enfants et les inviter à lire ce qu’ils ont. Il faut, très tôt, les initier aux livres, à l’objet livre. Mais il y a des jeunes qui ne lisent pas - j’en ai fait partie – qui se mettent à lire après. Par pur plaisir.
Il y a des familles où il n’y a pas de livres…
D’où, en effet, l’importance de l’éducation, de la sensibilisation aux livres. À la maison et à l’école. La bonne nouvelle est que la littérature jeunesse se porte bien et est d’excellente qualité. Il y a des best-sellers : des romanciers aimeraient connaître les mêmes résultats. Que ce soit des livres ou des livres illustrés ! Personne n’en parle.
Diriez-vous que l’important est de lire, peu importe ce qu’on lit?
Oui, même des magazines. Jeune je ne lisais pas de livre mais consacrais tout mon argent de poche allait dans les magazines : de musique, de moto, d’autres sujets.
Vous êtes confrontés à des montagnes de livres, chaque année. Cela reste-t-il un plaisir ?
C’est un travail, en effet. Je lis quelque 200 livres par an, soit trois à quatre par semaine. C’est un plaisir de tomber sur un livre qui me captive et que je n’arrive pas à lâcher. Il n’y en a pas beaucoup. J’en lis tellement. Quand un lecteur achète un livre, c’est parce que quelqu’un, un ami, un critique, en a dit du bien. Moi, je les lis pour mon travail. Quand je dis qu’un livre est magistral, je pense, en toute modestie, qu’il va marcher.
Sentez-vous les futurs livres à succès ou ceux qui remporteront des prix ? Je sens vite si un livre peut avoir un prix. Moi et mon équipe, on ne s’est jamais trompés sur les Goncourt, par exemple. Disons ceux qui atteignent le dernier carré.
Cette année ?
Oui, j’ai un nom déjà… Je vous promets de vous dire si je me suis trompé ou pas.
N’est-ce pas aussi une bataille entre maisons d’édition…
Vaste sujet ! Oui, cela peut intervenir. Les choix sont subjectifs. Est-ce truqué ? Je ne le pense pas. Y a-t-il un jeu d’influence ? Il existe de toute façon dans le métier. Certains éditeurs ciblent des auteurs pour qu’ils soient “goncourables”. Mais ce jeu va-t-il jusqu’aux magouilles ? Je ne le pense pas.
Comment lisez-vous ?
Jamais au lit ! Je m’endors… Je lis le matin, après le petit-déjeuner. Souvent dans le train.
Comment vous ressourcez-vous ? Pas en lisant, j’imagine…
Je fais du sport, beaucoup de VTT, un peu de musculation. J’adore nager l’été dans la mer. Et avec des apéros, avec du bon vin. J’ai une petite maison à la sortie de Toulon.
En qui, en quoi croyez-vous ?
Je crois d’abord en la sincérité et la ténacité.
Spirituellement ? J’ai une croyance particulière, mais elle ne m’encombre pas, ne m’envahit pas. J’ai une religion à laquelle je crois mais je la pratique intérieurement. Je pars du principe qu’une prière peut passer par une méditation en écoutant de la musique, en contemplant une œuvre. Je convoque alors tous les disparus qui me sont chers. Dans les moments difficiles, je sais qu’ils sont là.
Pensez-vous à la mort, parfois ?
Ah oui… Avant j’avais peur de la mienne, à présent, j’ai peur de celle des autres. J’ai toujours une grande phobie de l’avion. Je n’ai pas peur de ma mort, mais je me demande comment cela va se produire.
Qu’y a-t-il après la mort ?
Je n’en sais rien. Je trouve naïf que certains soient persuadés qu’il y ait quelque chose après. Et je trouve insupportable ceux qui disent qu’il n’y a rien.
Qu’est-ce qui vous a construit ?
Les épreuves mais surtout les voyages et les rencontres.
Êtes-vous un homme heureux.
Pas toujours…
Du côté de chez Proust
Quelle est votre vertu préférée ? L’intégrité.
La qualité que vous préférez chez un homme ? La loyauté.
Chez une femme ? Pareil.
Votre principal défaut ? Râleur !
Votre principale qualité ? On m’a souvent dit la générosité mais je préfère dire la bienveillance.
Votre rêve de bonheur ? Il est personnel.
Quel serait votre plus grand malheur ? Je ne le vous dis pas parce que j’aurais peur que cela arrive.
Votre auteur préféré ? Vous imaginez bien que je ne peux pas répondre à cette question. Même si, il y en a un auquel je pense beaucoup en ce moment : Jean Teulé, mort récemment. C’était un ami de l’émission. Il avait cette capacité à captiver le lecteur. Tous ses livres m’ont happé à chaque fois.
Votre compositeur préféré ? Ce n’est pas un francophone. David Bowie m’a accompagné pendant toute mon adolescence. J’aime son éclectisme et son ouverture sur le monde. Il m’a toujours inspiré.
Votre héros préféré dans la fiction ? Vous allez dire que je fais du “belge”, mais c’est sincère. Je relis régulièrement les aventures de Tintin. Ce n’est pas tellement le personnage de Tintin, qui m’a souvent un peu énervé. Mais le capitaine Haddock me fait rire.
Qu’est-ce que vous détestez par-dessus tout ? L’hypocrisie et la trahison.
Quel est le don que vous auriez aimé avoir ? Être invisible de temps en temps.
Comment aimeriez-vous mourir ? Sans m’en rendre compte.
Quelle est la faute, chez les autres, qui vous inspire le plus d’indulgence ? La bêtise, parfois.
Avez-vous une devise ou une phrase qui vous inspire ? Christian Mistral, auteur québécois : “Les départs ne comptent pas. Seuls les retours méritent une larme”.