Que faire contre la surpopulation carcérale ?
La surpopulation dans les prisons est-elle conjoncturelle ou est-elle devenue structurelle ?
Publié le 29-03-2012 à 12h40
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La surpopulation dans les prisons est-elle conjoncturelle ou est-elle devenue structurelle ?
Malheureusement, c’est une situation structurelle parce qu’il y a eu une augmentation progressive de cette surpopulation. Nous sommes dans un déficit de près de 2 000 places, soit 20 % des places totales. Ce qui est énorme. Bien entendu, il y a eu des décisions prises au niveau du gouvernement avec le master plan qui devrait améliorer progressivement la situation.
Quelles en sont les causes ?
Il y a un taux de détention préventive qui est très élevé en Belgique, plus élevé que la moyenne européenne. On doit se poser la question de savoir pourquoi. Il y a encore des personnes en prison qui ne devraient pas y être et des personnes en liberté qui devraient être en prison. Manifestement, on a un problème d’adéquation par rapport à la justification de l’emprisonnement. Je pense aussi que la détention préventive est élevée chez nous parce qu’on n’exécute pas les peines de manière stricte et qu’il y a donc parfois une tendance à utiliser la détention préventive comme une peine avant la lettre.
Certains disent qu’il faudrait introduire une sorte de “numerus clausus” : quand une personne entre en prison, une autre devrait en sortir. Qu’en pensez-vous ?
Cela n’a pas de sens. L’emprisonnement doit protéger la société et on n’interne pas des gens pour le simple plaisir de les interner. Pour moi, la peine de prison a essentiellement une fonction de protection de la population, avant sa fonction de réinsertion. S’il ne s’agit pas de protéger la société, il y a d’autres types de sanction. Il y a les amendes, les peines de travail. J’ai été l’initiateur de la peine de travail en Belgique parce que j’ai fait voter à l’époque cette proposition. Il y a actuellement plus de 10 000 peines de travail annuelles. Cela correspond donc à un réel besoin au niveau de la société. Pour les individus qui ne comportent pas un risque pour les gens, si on peut leur appliquer ces peines, c’est positif. Cela évitera les récidives, ainsi que la désocialisation et cela permet de ne pas mettre des gens dans un milieu extrêmement criminogène.
Ouvrir de nouvelles prisons, entend-on parfois, ne servira à rien parce qu’il faudra remplacer les vieilles et que, plus on ouvre de prisons, plus on enferme.
Je ne pense pas que cela soit vrai. Il faut créer de nouvelles places, très clairement, parce qu’il en manque 2 000 à l’heure actuelle. Je rappelle aussi que les 600 places dont on dispose à Tilburg, aux Pays-Bas, arrivent à échéance en 2014. Il faut restaurer les prisons les plus anciennes ou les remplacer et il faut que les conditions d’emprisonnement respectent la dignité humaine.
Maître Dermagne propose (lire ci-contre) qu’on légalise le commerce de la drogue pour vider substantiellement les prisons. D’accord ?
Pas du tout. Elle entraînerait une criminalité propre. La prison n’est pas la peine utile pour des consommateurs. Par contre, on ne peut pas prendre comme prétexte la surpopulation pour légaliser le commerce de la drogue. Au contraire. Le commerce et le deal doivent être davantage poursuivis.