Jean-Christophe Lagarde: "Pas de fan-zones, la priorité des politiques c'est que l'Euro ne soit pas endeuillé"
" Pas d’organisation de fan-zones chez nous pour éviter de disperser les forces de l’ordre. Celles-ci doivent d’abord assurer la sécurité des écoles, des magasins, des transports… La priorité des politiques, c’est de faire en sorte que la fête ne soit pas endeuillée. Vous imaginez si demain il y avait un attentat faute d’appliquer les principes de précaution ? Que diriez-vous, vous, les journalistes ?"
Publié le 25-05-2016 à 10h58 - Mis à jour le 25-05-2016 à 11h04
Jean-Christophe Lagarde, homme politique français, maire de Drancy et président de l'Union des démocrates et indépendants (UDI): "Pas d’organisation de fan-zones chez nous pour éviter de disperser les forces de l’ordre. Celles-ci doivent d’abord assurer la sécurité des écoles, des magasins, des transports… La priorité des politiques, c’est de faire en sorte que la fête ne soit pas endeuillée. Vous imaginez si demain il y avait un attentat faute d’appliquer les principes de précaution ? Que diriez-vous, vous, les journalistes ?"
En tant que maire de Drancy, vous avez décidé de ne pas organiser de fan-zones sur votre territoire. Pourquoi ?
Alors que les forces de l’ordre sont déjà extrêmement sollicitées depuis les attentats de janvier et novembre 2015, l’Euro leur impose une surcharge de travail considérable. En rajouter davantage avec des fan-zones me paraît totalement déraisonnable. On le sait désormais, la France est une cible privilégiée des barbares de Daech. Aussi, je préfère que la police se concentre sur l’essentiel : les entrées et les sorties d’école, les grands magasins, les manifestations publiques, les marchés aux comestibles, les transports en commun, etc. Enfin, les incidents qui se sont déroulés lors de la Coupe de France, ce samedi, me donnent à penser que certaines mesures de sécurité ne sont pas suffisantes pour éviter les mouvements de foule, au contraire (NdlR: le dispositif autour du Stade de France n’a pas résisté à la pression des supporters de l’OM et du PSG, des objets illicites ont également été introduits dans l’enceinte).
N’est-ce pas gâcher l’esprit de la fête ?
On peut tout aussi bien regarder un match entre amis ou se rassembler dans un bar. La fête n’en est pas moins belle. Certes, il y a quelque temps, j’écrivais dans mon bulletin municipal qu’on regrettait tous de ne pas pouvoir célébrer l’Euro comme si de rien n’était. Il faut pourtant se montrer prudent. On ne s’arrête pas de vivre, mais on est bien obligé de tenir compte de la menace; de s’adapter aux temps qui courent…
Les supporters vont-ils le comprendre ?
A titre de comparaison, il y a 40 ans, on prenait l’avion comme le bus, et désormais on accepte tous d’être fouillés avant d’embarquer. De la même manière, on comprend qu’il y a des mesures inévitables pour la sécurité comme la fouille des sacs à l’entrée de certains bâtiments.
Certains disent qu’ainsi les terroristes ont gagné.
S’adapter aux gens qui vous font la guerre, ce n’est pas la perdre, c’est résister. Si on leur offre des cibles et si on disperse nos forces de sécurité, là on perd. Le pire ne serait pas que la fête ait seulement lieu dans quelques bars et entre amis, le pire serait qu’il y ait un attentat, dans les fan-zones ou ailleurs, parce qu’on aurait trop dispersé nos forces.
Mais ne pourrait-on pas solliciter l’aide de sociétés privées pour sécuriser les fan-zones ? Ou est-ce trop coûteux ?
C’est surtout qu’il ne faut pas faire semblant. Si les agents de sécurité privés peuvent se rendre utiles pour la fouille à l’entrée des stades ou des fan-zones, ils ne sont pas capables d’empêcher que quelqu’un arrive avec une kalachnikov dans un gymnase ou sur une place publique, là où on aurait réuni des centaines de supporters. Ce n’est pas qu’une question de budget. Les agents de sécurité ne sont pas armés et ne sont pas préparés à répondre aux attaques, comme le sont peu ou prou les policiers nationaux, qui sont désormais équipés de gilets pare-balles et, pour quelques-uns, d’armes de guerre.