Vous aussi, vous voulez quitter la ville?

Les dernières statistiques de population montrent que l'exode urbain continue en Belgique. Les familles sont de plus en plus nombreuses à émigrer au vert. Et cette tendance ne concerne pas que les communes de Bruxelles. Vos témoignages sont nombreux. Ripostes.

Thierry Boutte & Monique Baus
Vous aussi, vous voulez quitter la ville?
©Keystone/Gamma

Les dernières statistiques de population montrent que l'exode urbain continue en Belgique. Les familles sont de plus en plus nombreuses à émigrer au vert. Et cette tendance ne concerne pas que les communes de Bruxelles. Alors, vous aussi, vous voulez quitter la ville?

Non

Frédéric Lahaut, habite à Liège depuis sa naissance.

" Je reste citadin pour la proximité des commerces, pour l’histoire plus riche des villes, pour ma facilité dans les déplacements et pour contribuer à un développement plus intelligent du territoire."

Qu’appréciez-vous dans votre quartier ?

J’habite depuis deux ans dans le quartier des Guillemins, à trois minutes à pied de la gare, des bords de Meuse et de la nouvelle passerelle vers la Boverie. J’apprécie surtout la qualité du bâti (encore trop peu rénové) mais aussi que ce quartier soit en évolution constante avec de nombreuses réalisations plus contemporaines. Il bénéficie aussi désormais de nombreux avantages en offrant la proximité avec tous les modes de transport, les commerces (rue des Guillemins, hypercentre à 10-15 minutes à pied…) mais aussi avec plusieurs parcs/places (Boverie, Cointe, future esplanade…) et la Meuse avec ses quais rénovés.

Pourquoi préférez-vous habiter en ville ?

La ville a beaucoup plus à offrir que la campagne même si malheureusement les espaces publics et le bâti en Wallonie/Bruxelles sont souvent mal pensés, mal organisés et généralement mal entretenus, ce qui engendre l’envie pour beaucoup d’habitants d’aller vivre hors des centres urbains. Il y a aussi une envie plus personnelle de vouloir voir les centres urbains se (re)développer davantage pour une meilleure gestion du territoire et un développement plus harmonieux et important du pays. En se dépeuplant, les villes perdent de leur substance et de leur attractivité, et en construisant de plus en plus en périphérie et à la campagne on arrive aujourd’hui à une situation sans limites entre ville et campagne. Il n’y a pour moi déjà presque plus de campagnes en Wallonie - il suffit de voir plusieurs endroits comme le pays de Herve, autour de Waremme, dans le Brabant wallon… - et les villes wallonnes restent trop peu importantes pour être attractives nationalement et internationalement.

Votre travail a-t-il une incidence sur ce choix ?

Oui, même si dans le privé la plupart des emplois se trouvent aussi majoritairement hors des centres urbains en Wallonie (même quand l’entreprise n’a pas ou peu d’avantages à s’implanter hors des villes), ce qui contribue aussi à amplifier cet exode vers les périphéries et campagnes. La situation est différente à Bruxelles avec encore beaucoup de sociétés privées localisées sur son territoire.

Le trafic et la pollution ne vous gênent-ils pas ?

Oui, mais cela dépend beaucoup de chaque endroit (ce sentiment varie vraiment d’un quartier à un autre quand on se déplace). Ce trafic et cette pollution sont justement souvent générés par les gens qui viennent de leur habitation loin de la ville et qui sont dépendants d’une utilisation massive de leur voiture. Ensuite, cela résulte aussi d’une mauvaise gouvernance des pouvoirs publics avec un manque de transports publics de qualité. A Liège, on attend un tram depuis dix ans qui semble ne jamais venir, et pourtant à Bordeaux celui-ci (avec d’autres efforts) a permis de diminuer de 40 % le trafic. Mais pour avoir des transports efficaces, il faut atteindre une certaine densité de population, laquelle est souvent trop faible dans la plupart des centres urbains (Liège est la plus grande ville de Wallonie avec à peine 200 000 habitants en son centre et 700 000 dans son agglomération, difficile donc de créer un réseau rapide et économe sur l’ensemble de l’agglomération car la densité moyenne reste faible).

Pourquoi ne pas déménager à la campagne ?

Je pourrais envisager de déménager à la campagne si mon emploi s’y trouve. Mais s’il s’agit de vivre à la campagne et de devoir rejoindre quotidiennement une agglomération pour y travailler, il n’y a rien de plus frustrant et d’inutile que de perdre son temps des heures en voiture quotidiennement (et au passage de contribuer à la destruction des campagnes). Il y a aussi le refus total d’habiter dans une cité-dortoir/lotissement avec des habitations répétitives loin de son lieu de travail.

Si - avec une baguette magique - vous deviez changer une chose dans votre ville ?

La propreté, l’embellissement des quartiers. Une restructuration de l’espace public plus importante pour des villes plus agréables et attractives, avec une meilleure gestion des projets et une vision plus cohérente à l’échelle de toute l’agglomération (densifier le centre, mieux gérer la répartition des fonctions sur l’ensemble de l’agglomération…).

Oui

C’est vous qui le dites.

Pourquoi déménager de la ville vers la campagne ? Pour fuir une série de choses (bruit, pollution, promiscuité, embouteillages…) et profiter d’autres (nature, calme, authenticité…).

Thierry. Je me suis installé à la campagne parce que j’en avais assez de l’insécurité, de la pollution et de la saleté. A un certain moment, il faut se poser la question de la laideur urbaine.

Yochanan. Pour y acheter un grand terrain et y faire construire une maison à un prix raisonnable, fuir l’enfer de l’immobilité bruxelloise et jouir d’une qualité de vie nettement meilleure à 25 minutes en train de Bruxelles. Mon actuel temps de trajet en train est inférieur à celui qu’il me fallait auparavant pour rejoindre “intra-muros” mon lieu de travail avec la Stib.

Toni. J’en avais marre de Bruxelles. J’y ai vécu 50 ans mais je ne reconnaissais plus ma ville.

Fabrice. Anvers est une des villes les plus polluées d’Europe. La campagne est moins stressante et plus conviviale.

Marjorie. Pour la nature, les paysages, le calme et la maison quatre façades avec jardin sans voisins directs. Cela vaut bien un trajet un peu plus long pour aller au travail !

Meg. Pour offrir à mes enfants une meilleure qualité de vie, proche de la nature, sans stress (l’école est en face de la maison), avec plus de liberté et une vie sociale plus simple et plus riche.

Marianne. Habitant les environs de Wavre, je bénéficie d’un environnement assez calme tout en ayant tous les commerces dans un rayon de 5 km à la ronde. Mes filles, elles, habitent en ville et je vois toutes les contraintes qu’elles ont. Le harcèlement du citoyen est développé à son paroxysme en ville. Quand je vais rendre visite à mes filles, c’est les yeux rivés sur ma montre à cause de la zone bleue (pourtant un quartier résidentiel). Un sac-poubelle mal placé et c’est l’amende (plus de 100€ !). Tout cela me saoule au plus haut point.

Charles. J’ai vécu en ville durant 25 ans mais je n’arrive plus à y rester plus de 4 heures. J’ai besoin de me retrouver dans la nature. Maintenant je suis au calme, loin des tumultes et du manque de respect des gens.

Marie. La vie en ville, c’est bien pour les célibataires ou les couples sans enfants. Sinon c’est galère… Moi, je voulais un jardin pour mes enfants en bas âge, j’en avais assez de traîner dans les plaines de jeux de parcs sales et pas toujours bien fréquentés.

Delphine. A la base, en tant que citadine, c’était inimaginable pour moi de vivre à la campagne à cause du manque de proximité. Seulement les prix d’une maison en ville sont trop chers et les jardins à la campagne sont plus grands.

Olivier. Nous avons vécu en ville. Entre le bruit continu, la pollution, l’incivilité et le manque d’espace, c’était l’enfer au quotidien. Pour trouver le calme, la qualité de vie et l’espace, nous sommes donc partis à la campagne. Seulement nous avons des problèmes avec les voisins depuis quelque temps. Nous n’avons plus la qualité de vie espérée. Nous pensons donc déménager prochainement, toujours à la campagne.

Dominique. Pour la possibilité d’avoir un vrai jardin/potager.

Marie-Chantal. Pour une vie plus authentique.

Marie. Pour la douceur de vivre, la beauté des paysages, regarder par la fenêtre et voir un joli jardin arboré au lieu d’une série d’immeubles.

Les Belges partent des villes

Les citadins continuent de fuir les villes, titrait récemment la "DH" en se référant aux dernières statistiques de la population (SPF Intérieur) concernant les radiations et les déménagements. Au gré du temps, la tendance d’un exode urbain s’affirme. Le mois dernier, les villes les plus quittées étaient Anvers (2 527 départs), Gand (1 168 départs), Bruxelles-Ville (1 109), Liège (1 051) et Louvain (1 047).

Bruxelles s’en tire grâce aux flux des étrangers. En août 2016, 1 927 ménages ont déménagé de la Région Bruxelles-Capitale vers la Flandre. Les arrivées dans la capitale depuis la Flandre (702) sont, quant à elles, nettement moins élevées. De même, 1 262 ménages ont quitté la région de Bruxelles pour s’établir en Wallonie, et 711 sont passés de la Wallonie à Bruxelles. Curieusement, si les Belges quittent leur capitale, la Région de Bruxelles-Capitale gagne 1 % d’habitants. Grâce à qui? Aux nouveaux arrivants qui sont pour la plupart des étrangers, essentiellement des ressortissants de l’Union européenne.

Vous aussi, vous voulez quitter la ville?
©D.R.

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