Des cours de gym mixtes en secondaire? Vous êtes nombreux à nous avoir donné votre avis
La ministre de l'Egalité des chances rêve de réunir garçons et filles de 12 à 18 ans au cours d'éducation physique. Cela faciliterait, selon elle, la construction d'une société plus égalitaire entre les hommes et les femmes. Sur plus de 3400 personnes ayant participé au sondage sur LaLibre.be vous étiez 56% à aimer l'idée. Ripostes.
Publié le 05-10-2016 à 12h44 - Mis à jour le 06-10-2016 à 09h54
La ministre de l'Egalité des chances rêve de réunir garçons et filles de 12 à 18 ans au cours d'éducation physique. Cela faciliterait, selon elle, la construction d'une société plus égalitaire entre les hommes et les femmes. Sur plus de 3400 personnes ayant participé au sondage sur LaLibre.be vous étiez 56% à aimer l'idée.
Sans doute la ministre de l’Egalité des chances et des droits des femmes, Isabelle Simonis (PS), s’est-elle avancée un peu vite, en lâchant mardi matin dans la presse que les cours de gymnastique seraient bientôt mixtes dans l’enseignement secondaire. Apparemment, un projet se trouve bel et bien sur la table du gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Seulement, c’est logique, il doit être travaillé en collaboration avec Marie-Martine Schyns (CDH) qui a l’Enseignement dans ses compétences… Or, tandis que Madame Simonis restait bizarrement injoignable dans la journée, Madame Schyns ne se gênait pas, elle, pour donner son avis… Plutôt négatif ! Une circulaire existe depuis 2014, rappelle cette dernière, qui laisse le choix aux écoles d’organiser un cours de gymnastique mixte ou pas. Donc, pas besoin d’imposer quoi que ce soit.
Plus d’égalité
Sur le fond, le sport non mixte à l’école est presque une spécificité belge même si régulièrement, la question de la mixité refait surface. Si la ministre de l’Egalité des chances revient cette fois avec l’idée de l’imposer, c’est dans le but de construire une société plus égalitaire entre hommes et femmes. D’après le journal "L’Echo", elle devrait d’ailleurs consacrer une enveloppe de 100 000 euros pour encourager la mixité dans les clubs sportifs.
Qu’en pense-t-on du côté des réseaux ? Au CPEONS (Conseil des Pouvoirs organisateurs de l’enseignement officiel neutre subventionné organisé sous l’égide des communes, des villes et des provinces), on est plutôt pour. "Aujourd’hui, dans nombre d’établissements scolaires, on favorise la citoyenneté, on travaille le vivre ensemble au quotidien, on lutte contre toutes formes de harcèlement sexuel et de violences à l’égard des filles, on promeut les principes de neutralité, on souhaite développer l’enseignement du genre. A côté, comment peut-on maintenir une forme de ségrégation entre garçons et filles dans un cours, ici d’éducation physique ?", argumente Roberto Galluccio, administrateur-délégué du CPEONS. "Quand un garçon et une fille font équipe ensemble dans un sport, ils apprennent à se connaître. Ce mieux-être diminue les risques de dérive sexiste voire de débauche" , continue cet ancien enseignant et directeur d’école qui regrette amèrement la tendance actuelle à séparer nageurs hommes et nageuses femmes dans certaines piscines. "La difficulté d’appréhender et de bien communiquer avec les femmes crée les conditions de violence à leur égard."
Faut-il craindre que, si la mixité devenait obligatoire, de nombreuses filles, élèves d’écoles multiculturelles, ne participent plus aux cours de gym ? "C’est le risque, et c’est déjà le cas , reconnaît Roberto Galluccio. Oui, certains préjugés religieux ou culturels qui considèrent que des filles en tenue de sport sont dénudées s’avèrent tenaces. Oui, il faudra un temps d’adaptation. Mais ce sera plus facile à gérer si toutes les écoles jouent le jeu."
Un argument se répète régulièrement chez les opposants à la mixité : imposer l’égalité garçons/filles aux cours de gym revient à nier qu’il existe des différences physiques. L’administrateur-délégué du CPEONS le balaye et fait confiance aux connaissances pédagogiques et psychologiques des enseignants qui doivent être capables de valoriser tous les élèves, notamment les plus faibles. "Mais c’est valable pour tous les cours" , souligne cet homme qui, ado, ne brillait guère au football dans son école. Enfin, rassembler dans la même salle des filles et des garçons qui suivaient séparément des cours jusqu’alors aura-t-il un impact au niveau du nombre de professeurs requis ? Là, un flou apparaît. "Des regroupements épisodiques garçons/filles sous l’égide d’un professeur existaient déjà. On verra lors de la période d’adaptation." Et au niveau formation ? "Non, un prof d’éducation physique pour garçons ne doit pas être formé pour s’adapter à des filles."
Le son de cloche est moins enthousiaste du côté du Segec (Secrétariat général de l’enseignement catholique). "Les cours d’éducation physique en formation commune doivent être organisés séparément pour les garçons et pour les filles" , peut-on lire sur son site. Il est même "préférable que ce soit une enseignante qui prenne en charge les groupes de filles et un professeur masculin, les groupes de garçons. En effet, des moments importants du cours peuvent se dérouler dans les vestiaires (sensibilisation aux questions d’hygiène, explications théoriques utiles pour le cours qui va avoir lieu, contacts informels avec les élèves sur des problèmes de santé ou de certificat médical, … )". Et enfin : "L’organisation du cours d’éducation physique en mixité ne peut se justifier que pour des raisons pédagogiques : projet global pour les élèves d’un même niveau d’étude, organisation particulière du cours pour favoriser l’intégration de chacun, préparation de compétitions interclasses."
56 % de "oui"
Sur le terrain, l’idée semble plutôt plaire si l’on en croit le rapide sondage réalisé sur notre site lalibre.be. Sur plus de 3 400 réponses, vous êtes 56 % à dire "oui" au cours de gymnastique mixte dans le secondaire, pour 32 % de "contre" et 12 % sans avis.
Vous êtes plus de 190 à avoir également répondu à notre appel à témoignages et donné votre avis (lire ci-dessous). Parmi les principaux arguments de ceux qui sont séduits par l’idée, pointons l’abolition des différences et l’apprentissage du respect mutuel. Et, dans le camp des détracteurs, la gêne et l’inégalité des performances.

Quelques unes de vos 190 réflexions
Laetitia
Contre: Un cours de gym mixte ? Mauvaise idée ! A l’adolescence, j’étais très complexée par rapport aux autres filles, et j’imagine que cela aurait été encore pire si j’avais dû faire du sport avec des garçons. Sans compter qu’avoir une femme comme prof de gym pour les filles et un homme pour les garçons permet à chacun de pouvoir aborder des problèmes personnels propres à chaque sexe. Personnellement, je me rappelle de certaines discussions qui sont nées durant les cours de gym.
Emmanuel
Contre: Pour certaines activités, notamment les sports d’équipe avec ballon, les filles vont être mises de côté par les garçons qui leur reprocheront de ne pas courir assez vite, de ne pas shooter assez fort, etc. L’effet désiré, à savoir réduire les inégalités entre hommes et femmes, ne sera pas rencontré. Au contraire : les filles seront placées en condition d’infériorité et intérioriseront cette condition. D’ailleurs, on peut légitimement penser qu’elles se désintéresseront rapidement d’une activité où elles sont systématiquement à la traîne.
Anna
Contre: Je pense que rendre les cours de gym obligatoirement mixtes risque d’augmenter le taux d’absentéisme. Et pas seulement de la part des jeunes musulmanes ou d’autres confessions. A cet âge-là, on n’est pas toujours à l’aise avec son corps, on est un peu complexé… C’est déjà compliqué de faire en sorte que toutes les filles de la classe aillent à la piscine, alors au cours de sport mixte...! Il y a bien assez de médecins complaisants qui donneront sans soucis un certificat médical dispensant du cours de sport…
Alex
Contre: Pendant l’adolescence, avoir un cours de sport entre garçons est important, ça compte d’ailleurs parmi mes meilleurs souvenirs de secondaire. Ça remplace en quelque sorte le service militaire qui était une bonne chose pour certains gars qui ne font pas les scouts ou d’autres activités non mixtes.
Elodie
Contre: Devrait-on supprimer les séances de foot ou de gymnastique artistique qui sont soit trop masculines pour les filles, soit trop féminines pour les garçons ? Chacun a ses préférences en matière de sport. Il n’y a aucun sens à obliger tous les élèves à faire les mêmes exploits dans les mêmes disciplines.
Bee
Pour: On évoque le fait que certaines élèves musulmanes risqueraient alors de déserter les cours de gym, mais c’est idiot de ne parler ici que des musulmanes. Des garçons musulmans également pourraient refuser d’y participer, mais aussi d’autres élèves, croyants ou non, et ce pour toutes sortes de raisons. Même dans les groupes homogènes il y a des ados qui ne supportent pas le regard des autres. Je pense donc qu’il serait intéressant de proposer une sorte d’uniforme de gym qui convienne aux deux sexes, ne soit pas moulant et couvre suffisamment le corps, de manière à ce que chacun(e) se sente à l’aise face aux autres.
Gilles
Pour: Hommes et femmes, nous avons vocation à nous mélanger. Les petites filles et les petits garçons doivent dès lors apprendre à être ensemble, courir ensemble, sauter ensemble… Créer une fracture entre les garçons et les filles, au cours de gym, ne fait qu’alimenter les fantasmes des uns et des autres pendant l’adolescence. Nous sommes différents physiquement, et alors ? Prendre conscience de cette différence me semble plus intelligent que de la nier.
Mathias
Pour: Malgré ce que l’on dit, il y a encore de forts problèmes de mixité dans les écoles. Il n’est pas bienvenu pour un garçon de rester avec des filles pendant la journée et réciproquement. Mais des cours de gym mixtes permettraient de démontrer qu’il n’y a pas tant de différences entre les sexes et qu’une personnalité reste une personnalité. De plus, on pourrait aussi être étonné de voir des garçons accrochant complètement à la danse et, enfin, on arrêterait de se moquer d’eux.
Anonyme
Pour: Je suis favorable aux cours de gym mixtes car il ne faut pas cantonner les garçons et les filles dans des activités “typiquement” masculines ou féminines. Et s’il y a des différences de niveau, cela se gère – on peut faire plusieurs groupes par exemple. Et puis, attention aux clichés, aux 20 kilomètres de Bruxelles, beaucoup d’hommes terminent la course derrière les premières femmes…
Vincianne
Pour: J’ai été la première fille de l’institut Saint-Ferdinand à Jemappes à avoir cours de gym avec des garçons, et j’étais seule… Au moins, c’était de la vraie gymnastique ! Foot, futsal, courses d’endurance, handball et j’en passe. Si je ne suis pas certaine que les cours de gym mixtes favorisent l’égalité entre les hommes et les femmes, je peux vous dire que moi j’étais respectée en tant que fille. C’est qu’il n’y avait pas de différence en termes de performance entre les garçons et moi.
Baptiste
Pour: Il s’agit de réaliser des activités physiques dans le cadre d’un cours scolaire, et non d’enfermer des adolescents “à poil” dans des vestiaires communs. Que croit-on ? Que l’on va lâcher de jeunes hommes bourrés de testostérone sur de jeunes filles frêles ? On sent que la mention d’un cours mixte libère une série de fantasmes atroces. Il ne s’agit pas de libération sexuelle mais, je le répète, d’activités sportives dans un cadre scolaire.