Réduction des déchets: le ministre se félicite "d'objectifs ambitieux", selon vous on peut en faire plus

Nous sommes dans la semaine européenne de la réduction des déchets. Thème central : les emballages. Le ministre de l’Environnement wallon, Carlo Di Antonio, qualifie ses objectifs d’ambitieux, au-delà des critères européens. Associations et citoyens, eux, évaluent les mesures en place et estiment que davantage d’actions pourraient être menées.

Camille de Marcilly & Baptiste Erpicum

Nous sommes dans la semaine européenne de la réduction des déchets. Thème central : les emballages. Le ministre de l’Environnement wallon, Carlo Di Antonio, qualifie ses objectifs d’ambitieux, au-delà des critères européens. Associations et citoyens, eux, évaluent les mesures en place et estiment que davantage d’actions pourraient être menées.

Recycler, c’est bien. Réduire ses déchets, c’est mieux. Les avis d’associations impliquées s’accordent tous : le meilleur déchet c’est celui qui n’existe pas. Greenpeace tire la sonnette d’alarme depuis plus de dix ans quand a été découvert un "sixième continent", une vaste plaque de déchets de plusieurs millions de tonnes, formant une île plus grande que la France entre Hawaï et la Californie. Les chiffres concernant le sac plastique sont criants : 1 seconde de fabrication, 20 minutes d’utilisation (9 fois sur 10 unique), 450 ans dans la nature. La nocivité des déchets pour l’environnement n’est plus à démontrer et les campagnes de sensibilisation se multiplient à l’occasion de la semaine européenne de réduction des déchets. En Belgique, une série de mesures sont mises en place mais sont-elles suffisantes ?

Le pays figure dans le peloton de tête européen en termes de gestion. En 2014, le recyclage et le compostage ont représenté près des deux tiers du traitement des déchets en Allemagne, suivie par la Slovénie (61 %), l’Autriche (58 %), la Belgique (55 %) et les Pays-Bas (51 %), d’après les statistiques d’Eurostat. Au niveau associatif et politique, des actions sont menées. Le 25 octobre, Fadila Laanan, secrétaire d’Etat chargée de la propreté publique a inauguré à Bruxelles le centre Recy-K, "nouveau fleuron régional de l’économie circulaire".

"La Belgique est dans le top mondial pour le recyclage", explique Bruno Fierens de Recupel, l’asbl qui organise la collecte et le recyclage de déchets électro. Dans le monde, 50 millions d’appareils sont jetés, "l’équivalent de 300 000 baleines bleues", précise Bruno Fierens, "et pas un tiers sont recyclés correctement". En Belgique, Recupel parvient à recycler 99 % des objets collectés. Cette récupération permet de participer à l’économie circulaire : les matériaux remployés forment autant de composants qui ne sont plus puisés dans les mines. Pour atteindre les objectifs, la sensibilisation est la clef selon Recupel, surtout quand on sait qu’une famille belge possède en moyenne 77 appareils dont 10 qu’elle n’utilise jamais. "Un jour, on a appris à jeter le verre dans la bulle à verre, cela doit être la même chose pour l’électro."

Si la Belgique est une bonne élève concernant le recyclage, elle reste dans la moyenne pour le volume de déchets générés par habitant. Afin de les réduire, il faut changer nos habitudes préconise Marc Sautelet, membre du mouvement Zero Waste. Le Bruxellois vit depuis le 1er janvier 2016 en ne produisant presque aucun déchet. "Le recyclage n’est qu’une des solutions, la meilleure façon c’est la prévention. A ce niveau-là, on ne va pas assez loin en Belgique, les initiatives sont encore trop timides. Il faut par exemple généraliser le sac organique, cela représente 30 % de la poubelle et un gaspillage d’énergie dans l’incinérateur. On pourrait aussi imaginer des consignes sur les plastiques, des emballages en papier, etc."

"On n’en fait pas assez"

La sensibilisation des citoyens est au cœur de l’action menée par l’association GoodPlanet qui œuvre notamment auprès des écoles. "Même par de petits gestes, on invite les enfants à réfléchir aux alternatives", explique Séverine Hervé. Mais en termes de développement durable, "on n’en fait pas assez. Ce que l’on prône, c’est la réduction des déchets, pas le recyclage, même si c’est important. Il faut se poser des questions sur la manière dont nous consommons.". Trop de personnes ne voient pas (encore) l’intérêt de trier estime Séverine Hervé, "en Flandre, acheter des sacs poubelle pour les déchets ménagers, cela a un coût, ce qui n’est pas le cas à Bruxelles. La carotte économique n’est pas idéale mais c’est aussi une façon de motiver les gens."

Si les citoyens doivent redoubler d’efforts, ils se heurtent rapidement à la quantité d’emballage emporté chez soi au moindre achat. "Il y a un début de conscientisation des entreprises par la pression des politiques et des citoyens, estime GoodPlanet. Mais il reste encore beaucoup d’efforts à mener dans le secteur agroalimentaire. Une part importante de la responsabilité appartient aux entreprises. Le marketing des industriels est tourné vers les enfants, il faut sans cesse ramer à contre-courant". Les distributeurs affichent souvent leur volonté "verte" d’éliminer les sacs plastiques aux caisses "mais quand on voit les fruits et légumes préemballés… où est la cohérence ?" s’interroge Séverine Hervé.

Un plan wallon devrait entrer en vigueur en 2017

Au niveau politique, des actions sont menées même si elles sont encore jugées insuffisantes par certaines associations. Pourtant, "en Wallonie, on ne s’arrête pas aux objectifs européens, on est bien plus ambitieux", affirme le ministre de l’Environnement Carlo di Antonio. Un plan wallon des déchets-ressources devrait entrer en vigueur en 2017. Dès le 1er décembre, les sacs plastiques seront interdits. "Nous prévoyons aussi un tri des déchets organiques généralisé d’ici 2022-2025, le tri des plastiques et la taxation au poids. Nous encourageons les Wallons à aller vers les circuits courts et le vrac pour réduire leurs déchets", ajoute Carlo Di Antonio.

Une cinquantaine d’entre vous ont participé à notre débat sur LaLibre.be (lire extraits ci-dessous). A une exception près, vous avez le sentiment d’en faire déjà pas mal pour tenter de réduire vos déchets, même si environ la moitié d’entre vous pense qu’il y aurait moyen de faire encore mieux. Achats en vrac, réutilisation, visites au parc à conteneurs : à ce stade, déjà, les gestes concrets sont nombreux. Par contre, les politiques menées en la matière font l’objet de moins d’indulgence. La grosse majorité des commentaires demande d’aller bien plus loin, en particulier pour lutter contre le suremballage.

Quelques-unes de vos réponses partagées sur LaLibre.be

Oui - Caroline, 36 ans

Si j’essaie de réduire au maximum mes déchets ? J’achète la nourriture en vrac plutôt qu’emballée. Je choisis des habits, des meubles et des jouets solides, qui pourront être recyclés. Concernant les appareils “informatiques” – GSM, ordis portables – je ne les renouvelle que quand ils ne sont plus utilisables. Et encore, je privilégie leur réparation quand c’est possible. J’achète aussi beaucoup de choses en seconde main, et j’utilisais des langes lavables quand les enfants étaient petits. Etc.

Oui - Stéphanie, 34 ans

Les enfants en sont de grands consommateurs : ballon gonflable au supermarché, qui survit rarement au trajet jusqu’à la maison, jouets Kinder et autres jouets en plastique qui se cassent rapidement. J’essaie doucement de leur faire comprendre que c’est peut-être parfois mieux de refuser tous ces “goodies”. Il y a 1 001 autres petits gestes possibles. Béa Johnson et la famille “zéro déchet” sont mes sources d’inspiration principales en la matière.

Oui - Michel, 52 ans

J’emmène des raviers en plastique réutilisables quand je vais au marché. D’ailleurs je vais de moins en moins dans les grandes surfaces. J’achète aussi mon lait à la ferme et je le conditionne dans des bouteilles en verre. Si les politiques n’en font pas assez pour nous encourager à réduire nos déchets, ce n’est pas une excuse : c’est à chacun d’agir.

Oui - Irène-Marie, 49 ans

Avant d’acheter quoi que ce soit, j’évalue les besoins du ménage et je calcule les quantités. Côté alimentation, je choisis exclusivement les produits non transformés, tout en vrac. Si j’estime en faire assez pour réduire mes déchets, je ne sens pas la même volonté chez les politiques : pourquoi autoriser à mettre dans les écoles les distributeurs automatiques de boissons et de friandises ? Chaque produit, c’est un emballage en plus (et en trop).

Non - Mickaël, 32 ans

La Belgique compte parmi les leaders mondiaux du recyclage mais nous nous faisons rattraper. J’ai appris que dans certaines communes, les sacs plastiques d’emballage pouvaient être recyclés au parc à conteneurs, mais pas chez moi, à Jodoigne. Je pense aussi que le triage de déchets verts devrait être encouragé. Même pour les gens qui vivent en appartement, comme moi. Pour éviter l’apparition de mouches indésirables, il y a une solution : une fois le sac rempli, je le mets dans mon congélateur. Avec cette méthode, je n’ai plus aucun désagrément !

Non - Popol, 67 ans

Je brûle mes déchets. C’est que je me fiche complètement de l’écologie. Et je me moque aussi de savoir si les politiques en font assez pour qu’on réduise notre consommation.

Non - Olivier, 39 ans

Nous tentons de réduire notre production de déchets, mais nous pourrions sans doute en faire davantage. C’est que ce n’est pas toujours évident et le manque de temps n’aide pas. Bon, il faut dire que, chez nous, nous sommes tous les deux employés à plein temps et parents de trois enfants… On court tout le temps, quoi !

Non - Mireille, 74 ans

En ce qui nous concerne, nous faisons des efforts pour réduire nos déchets : nous avons des poules, nous réutilisons nos déchets… Par contre, je trouve que les politiques n’adoptent pas la bonne démarche. Chez nous, à Jalhay (province de Liège), les sacs-poubelles sont ramassés une fois par semaine, et ces sacs sont trop chers. Ce qui fait que certaines personnes jettent leurs déchets n’importe où.

Non - Daniel, 53 ans

J’habite à Herve et je recours à une petite entreprise à vocation sociale pour récupérer mes déchets plastiques. C’est le genre de chouette initiative qui n’est pas assez encouragé par le politique. Sans doute parce que ce n’est pas assez porteur électoralement parlant.

Non - Robinson, 28 ans

Selon moi, les décisions des politiques sont trop molles, par peur d’impopularité. Il faudrait pourtant des décisions impopulaires pour que les personnes fassent plus attention à leur production de déchets: faire payer les déchets plus cher, interdire le suremballage, développer et encourager le compostage des produits verts… Puis, surtout, les politiques devraient encourager l’éducation à la consommation. Une grande partie de la jeunesse ignore que consommer tout et n’importe quoi crée des déchets…

Non - Thierry, 35 ans

A Tournai, le prix des sacs-poubelles a augmenté. Cela découle sans doute d’une volonté du politique de réduire les déchets. Je ne suis cependant pas sûr que cela aura une influence sur le comportement des consommateurs. Personnellement, j’évite d’acheter des produits qui sont suremballés. Ainsi, je pense que je suis sur le bon chemin en matière de réduction des déchets, mais je pourrais encore en faire plus.

Non - Florent, 28 ans

J’invite les politiques à envisager de consigner les canettes. Cela permettrait d’éviter leur abandon dans la nature. Et, en plus, cela s’inscrirait dans une dynamique positive pour l’emploi si l’on considère les innovations présentées récemment pour la récupération du métal en Wallonie.


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