Accord UE-Vietnam : pour Saskia Bricmont, "voter l'accord de libre-échange est un pied de nez à nos valeurs"
Débattu ce mardi matin sur base d'un rapport de l'eurodéputé belge Geert Bourgeois (N-VA/Conservateurs et réformistes européens) l'"Accord de libre-échange entre l'Union européenne et la République socialiste du Viêtnam" a toutes les chances d'être adopté demain par le Parlement européen. Au grand dam d'une autre Belge, Sakia Bricmont qui en a suivi les négociations pour le Groupe des Verts. L'eurodéputée explique à La Libre pourquoi elle estime que le Parlement européen devrait rejeter l'accord.
Publié le 11-02-2020 à 14h50 - Mis à jour le 12-02-2020 à 17h08
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Débattu ce mardi matin sur base d'un rapport de l'eurodéputé belge Geert Bourgeois (N-VA/Conservateurs et réformistes européens) l'"Accord de libre-échange entre l'Union européenne et la République socialiste du Viêtnam" a toutes les chances d'être adopté demain par le Parlement européen.
Au grand dam d'une autre Belge, Sakia Bricmont qui en a suivi les négociations pour le Groupe des Verts. L'eurodéputée explique à La Libre pourquoi elle estime que le Parlement européen devrait rejeter l'accord. Lundi en ouverture de session, votre groupe a demandé – sans l'obtenir - un report du vote sur cet accord de libre-échange présenté comme "le plus ambitieux jamais conclu par l'Union européenne avec un pays émergent". Pourquoi cette démarche ?
Un tel report nous aurait donné un an pour poursuivre les négociations avec les autorités vietnamiennes sur deux axes fondamentaux. Le premier concerne le code du travail. Le Viêtnam adhéré à la Convention de l'Organisation Internationale du Travail, mais, à ce stade, nous n'avons pas la garantie que les réformes engagées permettront l'émergence de syndicats libres.
Le second est relatif au code pénal, domaine où aucune réforme n'est envisagée alors que se pratiquent des arrestations arbitraires y compris de journalistes, des confiscations de terres à des fins militaires sans préavis ni compensation, des répressions policières de manifestations pacifistes… Aucune amélioration n'a été notée durant ces trois derniers mois, bien au contraire. Quand on les interroge sur le sujet, les autorités vietnamiennes nous répondent en substance : "Mêlez-vous de vos affaires".
Voter cet accord un mois après l'adoption par le Parlement européen d'un rapport appelant à la promotion des droits de l'homme et de la démocratie par l'Union est un pied de nez à nos valeurs.
Qu'en est-il des normes environnementales ?
Là encore on est loin du compte. Le Vietnam pratique la déforestation et la surpêche ce qui a amené la Commission européenne à enclencher (en 2017, NdlR) une procédure "carton jaune" à son encontre (pour n'avoir pas pris de mesures pour lutter contre "la pêche illicite", NdlR).
A l'heure du Green Deal porté haut et fort par la Commission Von der Leyen, c'est un très mauvais message. Un grand écart inacceptable qui ne peut même pas être justifié par les intérêts économiques de l'Union puisqu'il apparaît que notre déficit commercial sera aggravé par l'accord.
Cet accord commercial sera selon toute vraisemblance adopté demain midi par une majorité du Parlement européen, à l'exclusion des Verts, de la Gauche Unitaire européenne, de l’extrême droite et d'une fraction des socialistes. Quelles seront alors les marges de manœuvre pour poursuivre les négociations avec les autorités vietnamiennes ?
Il nous reviendra d'être le plus efficaces possible au sein du groupe de monitoring. La grande question est de savoir qui seront nos interlocuteurs côté vietnamiens. La pluralité des acteurs est tout sauf assurée puisqu'il n'y aura ni syndicats indépendants, ni représentants de la société civile.
Nos moyens d'action en terme de suivi seront minimes par rapport à ce qu'on aurait pu obtenir par un report.