Des monnaies pour contourner le système bancaire ?
Entre soutien aux commerces locaux et volonté de nouveaux modèles.
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Publié le 25-10-2020 à 08h00 - Mis à jour le 26-10-2020 à 12h50
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La défiance vis-à-vis du système bancaire n’est pas neuve. En particulier lors de crises économiques. Si l’on ajoute à cela l’épargne qui ne rapporte plus rien, voire coûte aux clients, la digitalisation à marche forcée qui en exclut certains et les multiples scandales fiscaux, ce même sentiment pourrait s’exacerber.
On est alors en droit de se poser la question : les monnaies locales, qui apparaissent souvent dans le sillon des crises économiques, sont-elles une réponse à cela ? Sont-elles une façon de contourner les banques commerciales classiques ?
"Une partie des participants s’inscrit dans cette réflexion de contrôle monétaire, de l’émission jusqu’au fonctionnement. Mais cette question est presque épistémiologique et assez technique", commente Marek Hudon, professeur à la Solvay Business School of Economics and Management. "Je pense que beaucoup de gens utilisent ces monnaies avant tout pour le caractère local et le développement de nouveaux modèles, souvent avec une dimension environnementale", nuance-t-il.
Selon le professeur, ces monnaies sont utilisées par des personnes déjà sensibilisées à ces thématiques. "Ces monnaies vont stimuler et renforcer l’esprit de communauté. Souvent là où des liens sociaux sont préexistants et où le sentiment de communauté est déjà fort, comme au Pays basque (où la monnaie "Eusko" circule, NdlR)", ajoute-t-il.
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Garder la motivation
Pour Marek Hudon, la crise du Covid-19 a, par ailleurs, souligné l’intérêt d’être moins dépendant de l’extérieur et de limiter les distances entre les échanges, ce qui rend les projets de monnaies locales d’autant plus consensuels. "Maintenant, comme tout exemple d’innovation sociale, le plus compliqué, c’est de garder une motivation sur le long terme et de structurer suffisamment la monnaie pour qu’elle puisse durer dans le temps. C’est l’une des difficultés", détaille-t-il.
Pour Pierre-Guillaume Méon, également professeur à la Solvay Business School, "les monnaies ne sont pas assez développées à l’heure actuelle pour avoir un impact macroéconomique" et contourner réellement les banques classiques. Mais le fait qu’elles se développent n’est pas anodin. "On a, par ailleurs, plus d’intérêt à utiliser une monnaie si on est nombreux à l’utiliser. Les systèmes de monnaies locales doivent donc trouver un équilibre subtil entre être suffisamment gros pour être attractifs et ne pas devenir trop lourds pour pouvoir rester local et flexible", ajoute-t-il.
Enfin, ces monnaies, pour les pays membres de la zone euro, sont également des réponses régionales à l’absence de mainmise sur la planche à billets, puisque les États membres ont confié l’émission monétaire à la Banque centrale européenne. "Pour faire simple, on a perdu en flexibilité mais on a gagné en stabilité. Maintenant, on peut toujours discuter du contrôle démocratique que l’on a sur la BCE, qui est très limité. Mais c’est un énorme sujet", commente Pierre-Guillaume Méon. Mais ces réponses sont assez symboliques car la valeur de ces monnaies locales est souvent calquée sur celle de l’euro. L’aspect social et le soutien aux commerces locaux sont donc primordiaux.
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