Un Brexit perdant-perdant, un accord gagnant-gagnant
" Par rapport à un no deal , cet accord est positif mais, rapport à la situation actuelle, c’est perdant-perdant !”
- Publié le 01-01-2021 à 11h32
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Jonathan Portes, professeur d’économie à l’Université Kings College London, est catégorique : les échanges entre le Royaume-Uni et l’Union européenne seront affectés négativement par le Brexit. En effet, alors qu’un accord de libre-échange vise normalement à rapprocher deux économies régies par des règlements différents afin d’accroître leur commerce, pour la première fois, les négociateurs devaient entériner la divergence partielle de deux économies complètement alignées réglementairement, interconnectées et ayant de hauts niveaux d’échanges commerciaux tout en tâchant de ne pas trop affecter leur interaction.
Le professeur estime que “les principales conséquences de la sortie du marché unique et de l’union douanière ne seront réellement perceptibles qu’à moyen et long termes pour le Royaume-Uni”. Dans un rapport coécrit sous la bannière du centre de réflexion UK in a Changing Europe, il indiquait que, “quoi qu’il en soit, les conséquences du Brexit sur les finances publiques seront supérieures à la contribution britannique au budget européen”. Concrètement, si l’accord a permis d’éliminer la plupart des tarifs douaniers, les fameuses barrières non douanières affecteront les échanges. “Les multinationales pourront absorber les coûts engendrés par les nouvelles tâches administratives mais, sur le long terme, elles seront moins encouragées à investir dans le pays”, prévient-il. Certaines PME, de leur côté, peineront à faire face aux demandes informatiques initiales.
En 2018, le gouvernement avait estimé qu’un accord de libre-échange entraînerait une baisse de 25 % du volume des échanges entre le Royaume-Uni et l’UE. Même s’il devait en partie être compensé par une hausse des échanges avec le reste du monde, l’ensemble du volume des échanges commerciaux britanniques diminuerait de 10 %. Le salaire réel baisserait de 6,4 % et le PIB, de 4,9 %. À chaque fois, la même cause : les coûts des barrières non douanières (obligation de respecter la réglementation, tâches administratives, etc.) et des droits de douane.
Les secteurs les plus affectés seront la manufacture (-8 % des échanges), l’agro-alimentaire et les services financiers (-7 %). Ces derniers sont les grands absents de cet accord. L’ancienne Première ministre Theresa May l’a rappelé mercredi à la Chambre des communes : “Les fournisseurs britanniques de services ne disposeront plus d’un accès automatique à l’UE et ils devront respecter les règles individuelles des États […]. Nous avons un accord pour le commerce, qui bénéficie à l’UE, mais pas dans les services financiers, qui aurait bénéficié au Royaume-Uni.”
L’économiste Julian Hessop se veut, lui, plutôt optimiste. “Dans le commerce, les échanges ont lieu car ils bénéficient aux deux parties, et à l’inverse leur diminution leur coûterait. Des mesures pour simplifier les procédures ont donc été intégrées à l’accord.” Enfin, rappelle-t-il, “les études les plus récentes montrent que l’attractivité du Royaume-Uni demeure élevée”.