Les socialistes signent l’arrêt des dispenses de cotisations sociales à vie pour les entreprises
Un projet d’arrêté royal des ministres Vandenbroucke et Dermagne prévoit de mettre fin au système de dispense de cotisations à vie né sous l’ère “Michel” en 2016. Des tensions sont en vue au sein de la Vivaldi...
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- Publié le 23-06-2021 à 18h49
- Mis à jour le 24-06-2021 à 09h36
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Attention, sujet qui fâche. Un vent favorable nous a fait parvenir un projet d’arrêté royal du ministre des Affaires sociales Franck Vandenbroucke (Vooruit) et du ministre de l’Économie Pierre-Yves Dermagne (PS) portant sur les dispenses de cotisations sociales pour les entreprises. Le projet fâche tellement que les discussions vont immanquablement rebondir bientôt sur la table du gouvernement, au cours d’un comité ministériel restreint (kern), “probablement houleux”, nous dit-on.
Un coût multiplié par cinq
De quoi parle-t-on précisément ? De l’une des mesures fortes du gouvernement de Charles Michel : la mesure dite “zéro coti”, qui exonère à vie de toutes cotisations sociales le premier engagement d’une entreprise, et réduit substantiellement celles des cinq engagements suivants.
Le comité de gestion de l’Office national de sécurité sociale (ONSS), qui réunit les partenaires sociaux, avait été chargé de faire l’évaluation du dispositif. Début juin, il a remis son avis. Il recommande de limiter en temps et en montant cette dispense de cotisations “à vie”. La mesure était sujette à critiques, il est vrai, et pas seulement de la part de l’ONSS. Cette dispense de cotisations à vie avait fait l’objet de critiques acerbes de la Cour des comptes dans un rapport datant d’avril 2021. Pour des raisons budgétaires d’abord. Le précédent gouvernement avait estimé le coût de la mesure à environ 200 millions d’euros. Pour la période 2016-2020, le surcoût a été chiffré par la Cour à plus de 500 millions d’euros, et “cerise sur le gâteau”, le coût annuel, d’ici 2024, monterait à un milliard d’euros par an. Le Bureau fédéral du Plan, lui aussi, avait pointé le coût exorbitant de cette mesure, dont l’efficacité est en outre mise en doute, même si l’institution reconnaît que la mesure a amélioré le taux de survie des entreprises.
Le MR n’en veut pas…
Pour les libéraux, à l’origine de cette mesure en 2016, c’est la soupe à la grimace. Pour eux, la dispense de cotisations a été utile. “Au cours du troisième trimestre 2020, 50 698 employeurs ont eu recours à la mesure 'zéro coti', surtout dans les secteurs de la construction et de l’Horeca. Ils sont répartis entre les trois régions du pays de la manière suivante : 54,6 % en Flandre, 29 % en Wallonie et 15,1 % à Bruxelles. Cette proportion est restée relativement stable depuis l’entrée en vigueur de la mesure début 2016”, nous explique-t-on dans le clan libéral. Où l’on fait valoir aussi – et surtout – que “dans le contexte sanitaire actuel, il est essentiel de prendre et de maintenir des mesures qui contribuent à la création d’emplois et soutiennent l’activité économique. La mesure est ainsi d’autant plus essentielle dans le cadre de la crise sanitaire.”
Le contenu du projet d’arrêté royal
Certes. Mais le projet d’arrêté des ministres Dermagne et Vandebroucke limite fortement la mesure de dispense, et pas seulement pour le premier emploi d’une entreprise. L’idée est de limiter l’exonération de cotisations sociales pour le premier engagement à deux fois ce qui existe pour le deuxième engagement. La mesure de dispense totale de cotisations s’accompagne en effet aussi de réductions, dégressives, jusqu’au sixième engagement. Pour le deuxième engagement, actuellement, le montant forfaitaire de la réduction s’élève à 1 550 euros par trimestre pendant les cinq premiers trimestres, ensuite 1 050 euros pendant les quatre trimestres suivants et finalement 450 euros par trimestre pendant les quatre derniers trimestres.
Le projet d’arrêté royal prévoit donc une réduction deux fois supérieure, en temps et en montant, pour le premier engagement : 3 100 euros pour les 10 premiers trimestres, 2 100 euros pour les 8 trimestres suivants et 900 euros pour les 8 suivants. Soit une durée limitée de réduction de cotisations sociales de 26 trimestres, à appliquer sur une période de 33 trimestres. Pour les troisième, quatrième, cinquième et sixième engagements, le montant forfaitaire de la réduction groupe-cible s’élève à 1 050 euros par trimestre pendant les neuf premiers trimestres et 450 euros par trimestre pour les quatre derniers trimestres. La mesure n’entrerait en vigueur qu’à partir du 1er janvier 2022. Le conditionnel reste de rigueur…
Un prochain kern mouvementé
En coulisses, les tensions sur le dossier entre partenaires de la Vivaldi sont en effet palpables. C’est que l’accord de gouvernement ne prévoit pas texto cette limitation. Une brèche dans laquelle les libéraux de Georges-Louis Bouchez se sont immédiatement précipités. L’accord prévoit qu’“au cours de l’année 2021, en consultation avec les partenaires sociaux, une évaluation du système aura lieu, qui pourra conduire à une modification. L’objectif est d’éviter le non-recours en simplifiant et en automatisant le système, mais aussi de prévenir l’utilisation excessive et les abus”. Bref, si tout le monde est d’accord pour limiter les abus (ce que l’arrêté prévoit bel et bien), la limitation est plus sujette à caution. Débats politiques et mécontentement patronal en vue ! Peut-être déjà dès vendredi…