"L’économie de plateformes n’est pas très bien régulée, ça, c’est clair"

Pour le ministre des Finances, un consensus gouvernemental est possible en matière d’emploi.

Vincent Van Peteghem
©Marie Russillo

Il est 7 heures 15 du matin. Le ministre des Finances Vincent Van Peteghem (CD&V) est ponctuel, prêt à en découdre dans le cadre d’un rendez-vous radio un peu particulier de près de 30 minutes dans les studios de nos confrères DH Radio. Les sujets d’actualité ne manquent pas…

500 millions de surprofits en 2022

À commencer par l'accord sur l'énergie, naturellement, où il a été une cheville ouvrière en même temps que le poil à gratter du gouvernement, ne voulant rien concéder sur le mécanisme de "TVA intelligente" qu'il a promu jusqu'aux dernières heures de la négociation gouvernementale. Las. Il devra attendre. Ce n'est qu'en mars que la réforme des accises sera discutée. "Il fallait réagir à court terme, surtout pour montrer que l'État aidait les personnes qui en avaient le plus besoin mais la deuxième phase sera tout aussi importante. On va renouveler l'architecture financière des accises. L'objectif est de se donner plusieurs possibilités, de moduler les accises en fonction de la consommation d'énergie, par exemple, ou de les baisser un peu quand les prix grimpent", explique le ministre des Finances. Qui ajoute que les recettes supplémentaires en matière de TVA et d'accises engendrées par la flambée des prix, estimées à 500 millions en 2022 (815 millions en 2021), seront "intégralement reversées aux ménages".

Le Codeco de l’assouplissement ?

Autre sujet brûlant : le Codeco de vendredi. Les libéraux, après le vice-Premier ministre Georges Gilkinet (Écolo), mettent une grosse pression sur le Codeco de vendredi en plaidant pour un assouplissement dans certains secteurs d'activité (secteur de la nuit, Horeca, télétravail réduit dans les entreprises, etc.). Ne comptez pas sur Vincent Van Peteghem pour critiquer ces sorties jugées en coulisses "un peu prématurées" par d'autres partenaires de la majorité. Pas le genre de la maison. "Le baromètre donne des orientations. C'est une aide à la décision politique mais quand on regarde la situation sanitaire actuellement, nous n'y sommes pas encore, en matière d'hospitalisations ou de lits occupés en soins intensifs, qui sont des critères importants. On doit donc rester vigilant. Mais si cette tendance à la baisse se poursuit, une transition vers un code orange est possible."

La porte reste donc ouverte pour le vice-Premier

Vincent Van Peteghem se montre plus fermé lorsqu'on aborde avec lui les propos initiaux de Paul Magnette sur l'e-commerce ("la nécessité de sortir de l'e-commerce", le travail de nuit, et le paquet de mesures "emplois" qui sera pour la première fois examiné en kern vendredi). Sujet sensible. Les déclarations du président sont-elles de nature à nuire au débat de vendredi ? "Cela n'aide pas, évidemment. Mais il n'est de toute façon pas possible de faire marche arrière. Il n'y a selon moi pas de contradiction entre le fait de promouvoir le commerce de proximité et l'e-commerce. Il est nécessaire d'avoir une combinaison des deux, des magasins physiques attrayants et une offre en ligne. On doit par contre créer un secteur dédié à l'e-commerce qui soit durable en Belgique, ce qui veut dire que les conditions de travail des travailleurs de l'économie de plateformes doivent être correctes. Il faut allier flexibilité et sécurité, c'est important pour le marché du travail", explique le ministre des Finances. Lequel est "sûr qu'on peut arriver à un consensus sur le sujet en kern".

Sécurité pour le travail collaboratif

Et de poursuivre : "L'économie de plateformes n'est pas très bien régulée, ça, c'est clair, et il est important d'avoir un meilleur contrôle dans ce secteur." Si le gouvernement veut parvenir à atteindre son objectif d'un taux d'emploi de 80 %, pas le choix, de toute façon. "Il y a une loi qui existe déjà qui détermine si l'on a le statut d'indépendant ou de salarié. Cela vaut aussi pour l'économie de plateformes. Pour moi, il est nécessaire, dans cette discussion qui se joue aujourd'hui au niveau gouvernemental, d'apporter de la sécurité aux travailleurs de l'économie de plateforme. En faisant preuve de flexibilité", ajoute-t-il.

Pour conclure l'entretien, la réforme fiscale. L'un des chantiers majeurs de la législature. Il n'en dira pas grand-chose. Après la fuite sur le projet des experts révélé par La Libre, chat échaudé craint l'eau froide. " Ce que je peux dire, c'est que la réforme rendra notre système plus juste, plus durable et qu'il diminuera les charges sur le travail." N'est-ce pas un peu "large", comme fil conducteur ? lui demande-t-on. "C'est la direction qu'on veut prendre. Je suis ambitieux parce que tous les partis, même de l'opposition, réclament cette réforme fiscale, mais il faudra du temps pour la mettre en œuvre. L'accord de gouvernement parle de préparation en vue d'une mise en œuvre pour la prochaine législature. On s'y attelle, mais il faut aussi que la sécurité juridique soit assurée. Cela dit, il y a déjà des décisions qui ont été prises, et qui s'inscrivent totalement dans le projet global voulu par le gouvernement, avec le verdissement du parc de voitures de société (durabilité), la taxe compte-titres (plus de justice fiscale) et le mini-tax shift (baisse des charges sur le travail)", conclut le ministre des Finances.

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