Les conséquences de la sécheresse sur le secteur de la construction: les bâtiments aussi souffrent, mais à des degrés divers
Les bâtiments sur caves s’en tirent mieux que ceux qui sont posés sur le sol ou sur un vide ventilé.
- Publié le 13-08-2022 à 07h05
- Mis à jour le 15-08-2022 à 08h49
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Tous les bâtiments ne sont pas égaux face à la sécheresse. Cela dépend de leur sol, de leur sous-sol, de leur poids… Ils pourraient même ne pas être égaux devant leur assureur, mais cela, ce n’est pas encore très clair.
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Premier constat : les bâtiments souffrent aussi de la sécheresse, à tout le moins d'une période prolongée de sécheresse. Ce qu'ils expriment par des fissures dans leurs murs et leurs revêtements de sol. "Il peut y avoir des désordres après des périodes de sécheresse, confirme Morgan Van Beneden, ingénieur au CSTC (Centre scientifique et technique de la construction). Surtout pour le bâti qui serait posé sur un sol argileux. Les sols limoneux sont moins impactants." Pour faire simple : un sol qui sèche perd en volume, bouge, se rétracte, se fissure, ce qui peut engendrer un enfoncement du bâti, qui lui-même craque et se fissure à son tour. "Et tous les cas de figure sont possibles, ajoute l'expert, l'ensemble du bâtiment pouvant descendre de 1 centimètre ou une partie seulement, ce qui est plus délicat."
Question de caves et d’arbres
Deuxième constat : s'ils souffrent tous, ce n'est pas dans les mêmes proportions. Le sol sur lequel ils sont bâtis est un facteur plus ou moins influent. Mais il en est d'autres. "L'expérience montre que, si les fondations s'enfoncent à plus de 1,5 mètre, le bâtiment sera moins sujet à ce type de problème, ajoute Morgan Van Beneden. C'est le cas de bon nombre de bâtiments plus anciens qui sont sur caves. Mais moins celui des nouvelles constructions. Le coût de l'extraction des terres et de la construction de caves est tel qu'en règle générale les maîtres d'ouvrage optent aujourd'hui pour des systèmes directement posés au sol ou sur un vide ventilé d'environ 80 cm pour être hors gel."
Parmi les autres facteurs, il y a le poids du bâti. "Plus il est lourd, plus il joue un rôle de tassement et plus il aura tendance à se fissurer." Mais aussi son environnement. "La proximité d'un arbre qui puise ses ressources en eau à plus de 1,5 mètre peut risquer de créer une différence de niveau du sol", ajoute l'ingénieur du CSTC. Ce qui n'est pas le cas des fleurs et arbustes. "Car ce qui est problématique pour un bâtiment, c'est la stabilité du sol en dessous des fondations, pas de celui alentour."
Nouvelles obligations des assureurs
L'impact de cette sécheresse, les assureurs s'y intéressent aussi. Très certainement depuis début décembre 2021 et l'entrée en vigueur de la loi dite interprétative qui intègre la contraction du sol suite à une longue période de sécheresse dans les catastrophes naturelles, au même titre que les inondations, les tremblements de terre… "Depuis cette date, explique Nevert Degirmenci, porte-parole d'Assuralia, ce type de dégâts doit être systématiquement couvert." Pas la cause (c'est-à-dire la stabilité du bâtiment), mais les dommages (les fissures…).
Une loi contre laquelle la fédération des assureurs a introduit deux recours. L'un en suspension, qui a été annulé. L'autre en annulation, qui est toujours en cours. "Il y a beaucoup de zones grises dans cette loi, qui risquent de donner lieu à des litiges, poursuit Nevert Degirmenci. Elle ne précise en effet pas les types de dégâts, ni ce qu'elle entend par 'une période prolongée de sécheresse', par exemple. Elle ne dit rien quant aux délais de prescription, ni sur le plafond d'intervention des autorités publiques." Et il n'y a aucune précision quant aux mesures que les assurés devraient prendre pour limiter la survenance de ce type de problèmes. "Or, en tant qu'assurés, c'est une de leur obligation."
Parallèlement, le secteur demande aux autorités publiques qu'elles l'aident à mieux évaluer les risques. "Par exemple en créant une carte des zones géologiques à risque au même titre qu'il y en a une pour les zones inondables, conclut la porte-parole d'Assuralia. Et en y limitant les constructions." Bref, une solution durable et… payable par les assurés.