La dette n’est pas tout : pourquoi les agences de notation ne paniquent pas avec le cas belge
Libre Eco week-end | Le Dossier. Avoir une énorme dette est loin d’être confortable pour un Etat. Mais d’autres critères sont pris en compte pour déterminer l’état de santé économique d’un pays.
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Publié le 12-02-2023 à 11h05
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Faut-il s’inquiéter de cette dette publique énorme en Belgique ? Pas vraiment, selon les agences de notation qui n’ont pas dégradé leur note par rapport à notre pays lors de leurs plus récents rapports. Que ce soit Fitch, Standard&Poor’s (septembre 2022) ou Moody’s (décembre 2022), les organismes chargés d’évaluer le risque de non-remboursement d’une dette (qu’elle soit d’un État ou d’une entreprise) n’ont ainsi pas un discours alarmiste pour la Belgique. Les notations de l’État fédéral ont, à chaque fois, été confirmées, les perspectives étant jugées “stables.” Notons, toutefois, cette alerte, fin 2021, quand la notation de la Région wallonne et de la Fédération Wallonie-Bruxelles a été dégradée, les agences estimant que les déficits allaient continuer à se creuser. En cause, notamment la réponse à la pandémie et aux inondations.
Une économie “riche et productive”
Mais revenons au fédéral. Moody’s, en décembre dernier, évoquait ainsi un profil de crédit de la Belgique “soutenu par son économie diversifiée et bien équilibrée.” Selon l’agence basée à New York, “l’économie résiliente et un cadre institutionnel solide sont les principaux atouts de la Belgique”, même si “l’endettement sensiblement plus élevé du pays constitue un défi majeur.”
Même son de cloche du côté de Standard&Poor’s pour qui notre pays a “une économie riche et productive dotée d’institutions solides.” Et ce, même en “tenant compte des risques pour la croissance et de l’importante dette publique du pays, ainsi que des problèmes budgétaires suite aux retombées du conflit Russie-Ukraine.”
Comment expliquer cette relative zenitude des agences face à un pays, le nôtre, dont le déficit public est le plus élevé au sein de la zone euro ?
Il faut d’abord rappeler le rôle premier de ces agences internationales. Leur but n’est pas tant de juger de l’état d’une dette, mais plutôt d’évaluer le risque du non-remboursement de cette dernière. Une entreprise ou un État, qui a des solides bases économiques et financières, peut ainsi être très endetté, sans que cela ne lui pose de problèmes de remboursement. Et si les perspectives économiques sont bonnes, les investisseurs seront au rendez-vous. Malgré sa dette abyssale (262 % de son PIB), le Japon a davantage la confiance des grandes agences et des investisseurs que l’Argentine (70 % de son PIB). Et ce, grâce à une économie nippone plus performante.
Pas d’huissier de justice pour les États
Par leur côté “immortel”, les États sont aussi très différents d’une simple entreprise. Même si certains États, comme la Russie en 1998 ou l’Argentine en 2002, ont été techniquement en faillite (dans le sens où ils étaient en défaut de paiement), aucun pays n’a, jusqu’ici, mis la clé sous le paillasson, ni n’a vu la visite d’un huissier venu saisir ses actifs. Ces pays existent toujours et peuvent à nouveau emprunter, même si la dette russe est jugée “spéculative” par les agences depuis la guerre en Ukraine.
La dette n’est donc pas tout. Elle est même parfois vue d’un bon œil par les investisseurs. C’est notamment le cas quand les États s’endettent pour réformer leur économie, investir dans la transition énergétique ou des infrastructures, par exemple. Notons enfin que la Belgique n’est pas seule sur son île. Le Covid a touché la planète entière. Les agences de notation le savent. Avec la crise sanitaire, l’endettement public a augmenté de 10 à 30 points de PIB dans les pays développés. Sans que cela provoque de grave crise financière. Du moins, jusqu’à présent.