Le gouverneur de la Banque nationale tire la sonnette d'alarme : "Avec un tel déficit, on va droit dans le mur"
Un kern “budgétaire” se tenait en début de soirée. Sans qu’un dénouement rapide soit envisageable. La BNB a remis une couche de pression sur la Vivaldi.
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Publié le 21-03-2023 à 19h12 - Mis à jour le 21-03-2023 à 19h16
”Chaotique.” C’est le mot utilisé par l’une de nos sources, libérale, pour qualifier les discussions budgétaires actuelles, l’une des deux grosses priorités du moment avec l’énergie – l’accord avec Engie sur la gestion des déchets nucléaires. De toutes parts (Commission européenne, Bureau fédéral du Plan, Comité de monitoring, BNB, …), les pressions s’accroissent sur la Vivaldi pour qu’elle aille un peu plus loin que prévu à l’automne 2022 sur la réduction du déficit. D’autant que le dernier rapport du Comité de monitoring publié la semaine dernière a accouché d’une relative bonne nouvelle pour 2023, à savoir la réduction dudit déficit de 6 milliards (5 en termes structurels) cette année, en raison d’une embellie conjoncturelle et de la baisse des prix de l’énergie (et de l’inflation). Le hic, c’est à plus long terme. Le déficit reste à des niveaux très élevés ces prochaines années. Même pour 2023, le déficit (4,8 % du PIB au lieu de 5,9 %) reste à 27,3 milliards tout de même, ce qui est beaucoup. Mais encore moins que celui attendu pour les années suivantes : de 27,6 milliards en 2024 à… 41,6 milliards en 2028 !
"Le taux d’emploi n’est pas tout"
”Avec un tel déficit, on va droit dans le mur”, a lancé Pierre Wunsch, Gouverneur de la Banque nationale (BNB), en commission des Finances ce mardi. “Je ne dis pas que nous ferons faillite l’année prochaine, mais le déficit est insoutenable à long terme. En cas de choc, cela limiterait notre capacité de réaction. On aurait très peu de réserves pour faire face à une nouvelle récession”, a-t-il déclaré. Et de poursuivre : “L’augmentation du taux d’emploi vers 80 % (72,3 % actuellement, ndlr) ne suffira pas à résoudre les problèmes. Miser tout sur ce taux serait même dangereux”, a-t-il averti. Ces propos mettent une couche de pression supplémentaire sur la Vivaldi, engluée dans les discussions budgétaires. Un kern débutait à 17h00 ce mardi. Sans perspective d’aboutissement au moment de mettre sous presse.
Le MR, l’Open VLD, surtout, suivis partiellement par… Vooruit sont d’avis qu’il faudrait muscler le retour à une trajectoire budgétaire plus saine. Pas le PS et Écolo. “On pense évidemment que l’on doit respecter la trajectoire budgétaire qui a été fixée. On doit rester donc sur cette ligne et ne pas chercher à durcir les choses maintenant. On ne peut pas se permettre de réclamer quoi que ce soit qui provoquerait un ralentissement économique. Voilà notre position actuelle car la situation est trop instable, au vu de la guerre et des problèmes des banques”, explique une de nos sources socialistes. “Est-ce que des freins seraient opportuns pour répondre aux défis sociaux et environnementaux”, s’interrogeait aussi Gilles Vanden Burre, chef de file Écolo à la Chambre. “On ne veut pas non plus en revenir aux vieilles recettes. Il est important de continuer à investir, notamment dans le rail, dans la transition climatique.”
Nouvelles demandes pas encore examinées
”C’est devenu un dogmatisme criminel, s’insurge une source libérale. Il est incompréhensible d’avoir des considérations politicardes qui hypothèquent l’avenir des jeunes générations au vu de notre situation budgétaire”, rétorque une source libérale. Le MR souhaite, lui, “tout faire pour soutenir le marché de l’emploi, afin d’arriver à ce fameux taux de 80 %. L’activation d’une partie des chômeurs et des malades de longue durée, quand c’est possible, est dans le viseur”, nous dit-on au MR, “où l’on va aussi proposer des mesures d’économie en sécurité sociale/Onem”.
Pour rappel, la Vivaldi s’était accordée en octobre sur un effort de réduction du déficit public de 1,2 % sur l’ensemble de la législature et de 0,6 % sur 2023 et 2024. Des discussions techniques ont eu lieu ces derniers jours, notamment sur les ajustements concernant la politique d’accueil des migrants (surplus de 700 millions au total), l’aide militaire à l’Ukraine et la lutte contre le trafic de drogue, mais elles sont donc loin d’être mûres. D’autant que… les demandes nouvelles budgétaires des uns et des autres n’ont pas encore été débattues. “Il y a beaucoup de nouvelles demandes, pour des montants importants, ce qui donne un peu l’état d’esprit”, conclut une de nos sources.