Covid-19 : Pourquoi le variant britannique risque de ralentir la reprise belge

Une chronique signée Koen De Leus - Chief Economist à BNP Paribas.

Koen De Leus
Covid-19 : Pourquoi le variant britannique risque de ralentir la reprise belge
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Un nouveau variant plus contagieux de la Covid-19 se propage en un temps record au Royaume-Uni. Il a forcé le Premier ministre Boris Johnson à annoncer un confinement plus strict du pays, y compris la fermeture des écoles. L’Europe doit mettre tout en œuvre pour éviter que la mutation britannique n’entre sur son territoire. Sinon, la voie du retour à la normale risque d’être soudainement beaucoup plus longue et la relance économique escomptée bien moins importante. Le R constitue un élément central dans la lutte contre le coronavirus. Le taux de reproduction de base R0 exprime le nombre moyen de personnes infectées par une personne contagieuse. Au début, avant la prise de mesures telles que le port du masque, la distanciation sociale et bien sûr un confinement partiel, ce taux était de 3,3 et le virus se propageait comme un feu de forêt. Pour éradiquer le virus, il faut faire baisser et garder ce chiffre sous 1.

Contagiosité

Le taux de reproduction R est déterminé par trois éléments : le nombre de jours pendant lesquels quelqu’un est contagieux ; le nombre moyen de contacts quotidiens de chaque individu ; et la probabilité qu’une personne exposée soit infectée par une personne contaminée. Les autorités britanniques estiment que le taux de reproduction du variant plus contagieux a suscité une augmentation comprise entre 0,4 et 0,9. Par quel paramètre cette augmentation a-t-elle été causée ? Le nombre de personnes infectées s’est accru alors que le niveau de confinement et les mesures d’hygiène n’ont pas changé. Le taux de contamination plus élevé est donc le coupable.

JP Morgan a calculé que la contagiosité du coronavirus avait reculé d’un taux initial de 3,17 % à 1,6 % grâce au port du masque et à l’application de certaines mesures d’hygiène. À présent, le nouveau variant de la Covid-19 a cependant fait augmenter le taux de contamination à 2,5 %, une hausse de 53 %.

Les conséquences sont considérables. Une contagiosité plus importante implique un confinement plus strict afin de ramener sous 1 le taux de reproduction accru. Comment ? Par exemple, en fermant à nouveau entièrement les écoles, comme l’ont fait les britanniques. Une autre manière de compenser la contagiosité plus élevée est de faire en sorte que moins de personnes puissent être contaminées. En d’autres termes, il faut que la vaccination passe le plus rapidement possible à la vitesse supérieure.

Moins de vaccins en réserve

Cela ne fait qu’augmenter l’enjeu du débat crucial qui s’ouvre déjà aujourd’hui dans bon nombre de pays. Faut-il, par précaution, lors de chaque première vaccination d’une personne, mettre immédiatement de côté sa deuxième dose, qui permet d’améliorer la protection de 50 % à 95 % ? Ou vaut-il mieux administrer les vaccins livrés à une plus grande population, et donc réduire la réserve de vaccins ? Si l’on choisit la deuxième option, le risque est que lors d’une grande rupture de livraison, la deuxième piqûre ne pourra pas être administrée à certaines personnes après X semaines et le niveau de protection du vaccin pourrait diminuer. Quoi qu’il en soit, une étude de Tuite & al.[1] montre que dans les scénarios les plus plausibles, une approche plus équilibrée – qui consisterait à réserver moins de doses au début de la distribution, afin de vacciner au plus vite le plus grand nombre de personnes – pourrait grandement accroître les avantages des vaccins, tout en permettant à la plupart des personnes vaccinées de se faire injecter une deuxième dose à temps.

Cependant, même dans le cas d’un déploiement plus rapide de la vaccination, des mesures plus strictes s’imposeront en cas d’invasion du variant britannique du virus. Sinon, le nombre de contaminations repartira très rapidement à la hausse, tout comme le nombre d’hospitalisations. La pression dans les hôpitaux risque alors elle aussi de redevenir intenable.

Sur le plan macroéconomique, cela aura pour conséquence que la reprise potentielle en 2021 sera limitée. Tout d’abord, il y a le confinement plus strict et la baisse de la mobilité. Ensuite, un taux de reproduction plus élevé signifie qu’une plus grande partie de la population doit être vaccinée afin d’obtenir l’immunité collective nécessaire. La voie empruntée d’un retour progressif à la normale grâce au déploiement du vaccin est alors soudainement bien plus longue. Dans ce scénario, ce qui devait être l’année de l’espoir prend un mauvais départ…

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