Fusion Carrefour-Couche-Tard avortée : "Les franchisés ont intérêt à avoir un CEO et une direction stables"
Les velléités de reprise du géant français de la distribution par un groupe canadien ouvrent la porte à des réflexions sur les franchisés. Une chronique de Luc Bormans, président d’Aplsia, l’Association professionnelle francophone du libre-service indépendant en alimentation.
Publié le 17-02-2021 à 08h00
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Le 2 janvier, le numéro un canadien de la grande distribution entamait une procédure pour tenter d’acheter Carrefour en France. Tout semblait bien se passer pour Robert Bouchard, le fondateur de Couche-Tard, jusqu’au moment où le ministre français de l’Économie, Bruno Le Maire, rend son verdict : "Un non courtois et définitif" ! Il se base pour cela sur un décret de décembre 2019 qui permet de refuser des investissements étrangers dans des secteurs stratégiques, comme la grande distribution.
Il n’est pas inintéressant de constater que l’État français, en la personne du ministre Bruno le Maire, a le pouvoir, en une journée, de décider seul, avec l’accord de l’Elysée, d’interdire la vente d’un fleuron de la grande distribution française.
Où est notre fierté, à nous les Belges ? GB et Delhaize sont partis dans des mains étrangères sans aucune, ou avec très peu de réactions défensives de la part de nos hommes politiques.
Était-ce le rôle de l'Etat français ?
Revenons à la France et intéressons-nous au dossier Couche-Tard. Les représentants de la famille Moulin, qui, avec 12,6 % du capital de Carrefour, en est le premier actionnaire - suivie par Bernard Arnault second actionnaire avec 6 % des parts - étaient tous d’accord de vendre leur participation, et se seraient sortis sans le moindre frais de cette belle affaire…
Cette dernière information nous oblige, nous les franchisés indépendants, à nous poser les bonnes questions !
Un, faut-il faire partie d’un groupe dont les actionnaires principaux préfèrent quitter le navire faute de projet commercial valable à terme ? Tout le monde sait que le modèle des hypers a vécu, et que la vente du non-food est chaque jour un peu plus menacée par l’e-commerce.
Deux, ou bien est-ce justement le fait d’être repris par un groupe étranger qui permettra de se remettre en question, et donner un nouvel avenir à une entreprise ?
Trois, est-ce le rôle et le devoir d’un État de sauver une entreprise dont l’actionnariat actuellement en place n’a plus la volonté de développer un modèle commercial adapté aux besoins actuels ? L’intervention d’un État doit avant tout servir à soutenir le développement d’une entreprise dans le pays, pour qu’elle reste garante de prospérité, de création d’emplois et de défense des intérêts économiques de ce pays.
Dans les mains du conseil d'administration
L’avenir nous dira, dans quelques années, si Carrefour se portera mieux sans la participation, ou sa reprise, par Couche-Tard.
Mais cette histoire démontre une fois de plus, que l’avenir d’un franchisé indépendant dépend aussi (surtout ?) de la capacité d’un conseil d’administration, défendant les intérêts des actionnaires, de développer un plan commercial ou industriel qui sera correctement mis en œuvre par son comité exécutif de direction.
Les franchisés ont intérêt à avoir un CEO et une direction stables qui connaissent bien le fonctionnement de leurs clients-franchisés et qui savent que leur satisfaction contribue aux attentes des actionnaires.