Que peut-on construire en zone agricole ?
Qu’est-ce qui est autorisé ? Et à quelle(s) condition(s) ? Focus sur les règles applicables en Région wallonne. Une chronique de Caroline Delforge, avocate au Barreau de Charleroi et assistante à l’UCLouvain.
Publié le 18-04-2022 à 08h36
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Qu’il s’agisse de réaménager une ancienne grange, d’agrandir un bâtiment existant ou d’y implanter une nouvelle construction, les projets urbanistiques en zone agricole sont fréquents. En Région wallonne, la construction en zone agricole fait toutefois l’objet de règles strictes et tous les projets n’y sont pas admis.
1. Qu’est-ce qu’une zone agricole ?
La zone agricole est une zone définie par les plans de secteur applicables en Région wallonne. Ces plans divisent le territoire wallon en différentes zones, auxquelles correspondent des affectations spécifiques. Parmi ces zones, il est prévu que certaines sont destinées à l’urbanisation (par exemple, la zone d’habitat ou la zone d’habitat à caractère rural) alors que d’autres ne le sont pas (par exemple, la zone forestière).
La zone agricole fait partie des zones non destinées à l’urbanisation. Ceci n’implique toutefois pas que toute construction y serait interdite. Certaines constructions y sont bel et bien autorisées, pour autant qu’elles respectent des conditions strictes.
2. Une zone destinée aux activités agricoles
La zone agricole est une zone principalement destinée à accueillir les activités agricoles. Seules peuvent, en principe, s'y implanter les constructions "indispensables" à l'exploitation agricole. Selon la jurisprudence, cette condition est satisfaite lorsqu'il est démontré que la construction est "nécessaire". Pour apprécier le respect de cette condition, seront notamment prises en considération la nature et l'importance des activités agricoles auxquelles la construction est destinée. Cette condition pourra, ainsi, être considérée comme remplie s'il est démontré que "les bâtiments qui existent sont insuffisants ou inadaptés […]" au regard de l'activité agricole déployée.
Diverses autres constructions sont également autorisées en zone agricole. Celles-ci sont limitativement énumérées. Il s'agit, notamment, des constructions destinées aux "activités de diversification complémentaires" à l'activité agricole des exploitants. À titre d'exemple, tel est le cas des constructions destinées à l'hébergement touristique à la ferme ou à l'accueil de fermes pédagogiques.
Enfin, la zone agricole peut également accueillir les constructions constituant le logement d’exploitants dont l’agriculture constitue la profession. À cet égard, il convient de préciser qu’il n’est pas requis que l’agriculture soit la profession principale de l’exploitant. Il doit néanmoins s’agir d’une profession effective. S’il s’agit d’une activité "accessoire", l’autorité saisie de la demande de permis devra vérifier qu’il s’agit d’une véritable profession et non d’un "prétexte". Par ailleurs, le logement peut, logiquement, également accueillir les personnes composant le ménage de l’exploitant.
3. Des dérogations limitées
Au-delà des constructions liées à l’activité agricole, d’autres constructions peuvent également être autorisées par "dérogation".
Les hypothèses dans lesquelles une telle dérogation peut être octroyée sont, toutefois, limitativement énumérées et impliquent, à nouveau, le respect de conditions strictes.
Une telle dérogation est, par exemple, envisageable lorsqu’il s’agit d’agrandir, de transformer ou de créer un logement au sein d’une construction existante qui a été autorisée et dont l’affectation future ne correspond pas aux prescriptions du plan de secteur. Cette hypothèse de dérogation peut, par exemple, être mobilisée pour transformer une grange située en zone agricole en habitation destinée au logement de personnes autres que l’exploitant agricole.
Par contre, les hypothèses de dérogation ne paraissent pas permettre l’implantation d’une nouvelle construction destinée au logement de personnes autres que des exploitants dont l’agriculture constitue la profession.
La pertinence d’octroyer une dérogation est appréciée au cas par cas par les autorités compétentes.
Les projets en zone agricole seront, par ailleurs, toujours examinés par les autorités compétentes en prenant en considération le bon aménagement des lieux. Bien qu’il soit théoriquement admissible au regard des règles évoquées ci-avant, un projet pourra ainsi toujours être refusé si l’autorité considère qu’il ne s’intègre pas dans le cadre bâti et non bâti existant. L’autorité dispose, à cet égard, d’un pouvoir d’appréciation discrétionnaire… mais pas arbitraire.