ChatGPT : une menace pour les chatbots?

Un enjeu économique pour de nombreuses organisations. Une chronique d'Anthony Simonofski, professeur en transformation numérique au département de gestion de l’UNamur.

Contribution externe
ChatGPT illustration
L’écart de géant entre ChatGPT et les chatbots existants sur le marché actuel réside dans l'intelligence perçue de Chat GPT et son anthropomorphisme. ©Shutterstock

Les dernières semaines de 2022 ont été marquées par l'émergence de ChatGPT, le chatbot de l'entreprise OpenAI. À titre d'illustration, si je demande à ChatGPT de m'expliquer ce qu'est un chatbot, il me répondra que c'est "un programme informatique conçu pour simuler une conversation avec des humains, avec l'aide de l'intelligence artificielle. Ils peuvent être utilisés pour répondre à des questions, fournir des informations, aider à la prise de décision et même pour divertir". Clair, non ?

Les chatbots, ça date de 2022 ?

Après cet énorme retentissement, une remise en perspective de l’utilité économique des chatbots pour les organisations est d’abord nécessaire. Les chatbots ne datent pas d’hier. En 1950, Alan Turing, mathématicien fondateur de l’informatique, se demandait déjà comment un programme informatique pourrait dialoguer avec des personnes en leur donnant l’impression d’échanger avec un être humain. Depuis, les chatbots ont été utilisés par des organisations dans le cadre de leur transformation numérique afin de mieux dialoguer avec leurs utilisateurs. Les gouvernements souhaitent les utiliser pour expliquer aux citoyens les démarches administratives, les entreprises principalement pour répondre aux questions courantes des clients et certains établissements d’enseignement comme assistants pédagogiques.

Avec l’arrivée de ChatGPT, une question se pose donc pour les nombreuses organisations utilisant actuellement des chatbots : faut-il laisser tomber les efforts de développement en interne avec ce nouvel arrivant ? En effet, le bilan de la satisfaction des utilisateurs envers les chatbots reste mitigé, dû à la qualité variable de l’information reçue, le manque d’interactivité conversationnelle ainsi que la nécessité fréquente de solliciter un acteur humain pour recevoir une réponse plus complète. Le potentiel économique est là, mais une adoption à grande échelle manquait.

Pourquoi utilise-t-on les chatbots ?

Dans mon domaine de recherche, l’étude des systèmes d’information, de nombreux facteurs sont avancés pour comprendre ce qui pousse à utiliser un chatbot. Trois d’entre eux sont souvent mis en avant : premièrement, l’intelligence perçue du chatbot ou sa capacité à répondre aux tâches des utilisateurs de manière satisfaisante ; deuxièmement, l’anthropomorphisme du chatbot ou sa capacité à répondre à l’utilisateur de manière naturelle ; finalement, la confiance envers la réponse reçue qui diffère grandement par rapport au contexte de la question.

L’écart de géant entre ChatGPT et les chatbots existants sur le marché actuel réside dans les deux premières caractéristiques. Les développeurs d’Open AI, bien conscients de ces deux facteurs, ont permis à ChatGPT de répondre avec une telle assurance que nous avons effectivement l’impression de parler avec un humain sûr de lui (ce qui renforce l’intelligence perçue) et pédagogue (ce qui renforce l’anthropomorphisme).

Fais confiance…

ChatGPT peut mener à une adoption massive (nous l’avons vu avec le million d’utilisateurs atteints en quelques jours) mais la confiance des utilisateurs sera-t-elle toujours au rendez-vous ? Pour certains domaines d’application, avoir des réponses consistantes et sérieuses est le plus important pour les utilisateurs. Feriez-vous confiance à ChatGPT pour vous aider à remplir votre déclaration d’impôts ? Ou pour vous auto-diagnostiquer ? Au vu des nombreuses erreurs que ChatGPT commet, j’imagine (j’espère) que non. L’intelligence perçue n’étant pas égale à une intelligence réelle.

En conclusion, ChatGPT va-t-il rendre nos chatbots obsolètes ? Il va sans doute les pousser à s’améliorer (et même les aider grâce à une possible intégration) et à se distinguer mais sur la confiance que les utilisateurs leur accordent. Les organisations doivent donc reprendre une approche d’inclusion de leurs utilisateurs dans le développement de leurs chatbots afin de comprendre leurs besoins et créer des solutions spécifiques à certains domaines pour augmenter leur confiance. Le remplacement des chatbots par ChatGPT, c’est donc peut-être pour demain mais seulement si les utilisateurs lui accordent leur confiance… et elle ne sera pas facile à gagner.

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